TROISIÈME PARTIE :
a) L'ÈRE DITE CHRÉTIENNE
LES QUATRE ÉVANGILES DANS LES QUATRE ÉVANGILES
LE CHRISTIANISME ENTRE LA PSYCHOSE DE L'AVOIR ET LA
PSYCHOSE DE L'ÊTRE
RÉALITES POLITIQUES DERRIÈRE LES MYTHES ET LES
DOGMES CHRÉTIENS. QUO VADIS DOMINE ?
PAUL DE TARSE
PAR CE SIGNE TU VAINCRAS
LA FRANCE, FILLE AINÉE DE L'ÉGLISE
... DE PAR L'ORDRE DE MELCHISÉDECH ...
TROISIÈME PARTIE :
L'ÈRE DITE CHRÉTIENNE
Les quatre évangiles dans les quatre évangiles.
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Au chapitre précédent, nous annoncions quatre éléments
partiellement inconciliables dans les Évangiles. Nous allons revoir
ces éléments de plus près, bien qu'en laissant au lecteur le soin de
reprendre, lui-même, une lecture critique du Nouveau Testament et
de compléter en détail l'analyse que nous abordons.
Le premier élément est le message d'un mystique galiléen,
message de liberté, d'aristocratie et d'amour face à une religion de
rigorisme formaliste, de démonisation de la femme et de la matière.
Nous nous sommes suffisamment étendus sur ce message dans le
chapitre précédent et il est inutile d'y revenir.
Le second élément est l'influence du judaïsme. En procèdent,
les discours moroses et morbides, les fulminations contre le vice, les
appels à la pénitence. En procèdent également les reflets du Dieu du
désert, exclusif et jaloux : « Si quelqu'un vient à moi et ne renie pas
son père, sa mère, sa femme et ses enfants, il ne peut être mon
disciple - Ceux qui ne sont pas avec moi sont contre moi - Et ceux qui
ne veulent pas que je règne sur eux, amenez-les moi et étranglez-les
devant moi. ». Ces paroles sont si contraires à la généreuse liberté
que manifeste par ailleurs le Galiléen qu'on est en droit de se
demander si elles sont authentiques, si elles n'ont pas été ajoutées à
des fins politiques pour rallier les juifs.
En procède aussi ce qu'on pourrait appeler l'islam évangélique.
Rappelons ici que le mot islam signifie « abandon à la Providence ».
Le prophète chrétien a les yeux fermés sur les duretés de la nature. Il
ignore quelle impitoyable sélection le froid, la faim, les carnassiers
opèrent sur ces petits oiseaux qu'il nous demande d'imiter dans leur
prétendue insouciance du lendemain.
Les aspects fanatiques de l'Évangile incitent à une comparaison avec
la générosité inconditionnelle du Bouddha, de Nietzsche, de Khalïl
Gibran. Les trois exhortent leurs disciples non à les suivre
aveuglément, comme « la voie, la vérité, la vie », mais à se trouver
eux-mêmes.
Pour conclure sur l'élément judaïque des Évangiles, citons une
phrase du Gai Savoir de Nietzsche : « Un juge, même clément, n'est
jamais un objet d'amour. Le fondateur du christianisme n'a pas senti
assez finement sur ce point : il était trop juif. ».
Le troisième élément est constitué par les remarques
fallacieuses qui ne sont point de la bouche du Nazaréen et ont pour
but de démontrer aux juifs que le Messie, le libérateur d'Israël
annoncé depuis des siècles par les prophètes est bien ce Jésus
condamné comme agitateur.
Pour comprendre ce troisième élément, il faut évoquer les
circonstances politiques contemporaines de Jésus. Les juifs sont
incapables d'assurer la sécurité des routes commerciales au Moyen-
Orient. Cette situation provoque l'intervention des grandes
puissances de l'époque. À peine libérés de la tutelle des Grecs par la
guerre des Macchabées, les juifs tombent sous la domination
romaine. Celle-ci poussait le respect de la personnalité des peuples
au-delà de ce qui est actuellement concevable. Ainsi, en Palestine,
les officiers romains firent retirer les effigies de César de leurs
enseignes afin de ne pas offenser la loi juive qui interdit non
seulement la représentation de Dieu, mais aussi « de tout ce qui vit
sur terre, dans les airs et dans les eaux ». Mais ces précautions ne
pouvaient empêcher la haine. La belle allure des légionnaires,
l'impression de force tranquille, leur aisance de comportement
allaient immanquablement allumer la haine dans le chaos racial
araméen. Une sourde et fanatique révolte agitait Israël, provoquant
attentats, répression et peur. Certains prêtres juifs, pseudo loyalistes
envers l'occupant, craindront que ce « roi des Juifs » ne suscite des
troubles suivis de représailles et tireront la conclusion politique
logique de cette situation « Plutôt voir périr un homme que tout le
peuple. ». Ils forceront la main à Ponce Pilate, pour bien se
démarquer des agitateurs, et évoqueront le risque d'accusation de
trahison : « Si tu es l'ami de César, tu ne dois point relâcher cet
homme. ». En jouant ce jeu abject, la haute prêtrise juive faisait coup
double : d'une part elle se mettait à l'abri en cas de troubles et de
brutale répression romaine, d'autre part elle se débarrassait d'un
prophète gênant tout en se donnant l'air de vouloir protéger le
peuple. Toute la savante hypocrisie de ce jeu apparaît dans la
préférence accordée à Barrabas qui, lui, était bien un agitateur
nationaliste.
La mort du prêcheur scandaleux ne suffit pas à la haute
prêtrise qui redoute l'action des disciples. Elle conseille aux Romains
de faire surveiller le tombeau, les disciples ayant l'intention de faire
disparaître le cadavre afin de prétendre à une résurrection et d'agiter
le peuple ( toujours la même hantise ! ) L'enlèvement résurrecteur
s'étant quand même produit. sans doute grâce à la corruption d'une
sentinelle, les juifs restent profondément divisés sur l'attitude à
adopter envers les Romains. Certains restent partisans de la
collaboration, comme ce Paul de Tarse qui persécute les chrétiens
par ordre du Sanhédrin, d'autres voudraient recommencer une guerre
des Macchabbées, comme ce Ben Hur qui donna matière à un livre
et à deux films. Les chrétiens, eux, pensent parvenir à dominer Rome
par noyautage de ses structures administratives et militaires. Et pour
être crédibles ils n'hésitent pas à distordre la figure de leur prophète
pour l'adapter à la sensibilité juive et aux annonces d'un Messie dans
l'Ancien Testament. Une preuve particulièrement évidente de ces
tricheries se trouve au début de l'Évangile, dans la généalogie de
Jésus. Celle-ci nous expose la lignée de David aboutissant à Joseph,
selon le dogme chrétien père seulement adoptif. Bientôt Jésus sera
pourtant appelé « fils de David », faute de quoi il ne serait pas pris au
sérieux par les juifs de la diaspora. La puissance financière de ces
derniers, leur masse démographique dans Rome étaient déjà
énormes. Les chrétiens avaient tout intérêt à se les concilier et ne
pouvaient démarrer leur projet qu'avec leur appui.
Nous ne faisons pas ici de la dispute théologique. Nos
considérations portent sur des choses qui nous semblent absurdes,
et même sordides. Mais il nous faut mettre à nu les méthodes et les
ressorts d'un mensonge qui a pesé lourd dans cette inversion du
christianisme si catastrophique pour l'Europe. Il ne s'agit pas
seulement d'éclairer et réécrire l'histoire. Il s'agit de préserver l'avenir,
de nos enfants. Actuellement, la vision prophétique de l'empereur
Julien, dit l'apostat, est en bonne voie de réalisation : « Si les
chrétiens triomphent, dans deux mille ans les juifs seront maîtres du
monde. ». Ils le sont déjà de manière occulte ; ils commencent à se
dévoiler et leur impudence croît d'année en année. Un jour, peut-être
proche, où ils pourront se dévoiler totalement, tout sera
définitivement perdu pour la liberté et la dignité. Comprendre avec
précision le jeu occulte est une question de vie ou de mort pour toute
la race blanche et les valeurs qu'elle porte dans ses gènes, y compris
celles qu'une gauche aveugle et mondialiste prône bruyamment tout
en oeuvrant à leur ultime destruction.
Car le danger pour ses valeurs ne vient pas d'hypothétiques
fascistes qui ne sont plus rien et ne seront jamais plus rien dans
l'histoire européenne. Il vient au contraire de ceux qui les dénoncent
le plus fort.
Le quatrième élément des Évangiles est le mythe populaire qui
s'accorde souvent avec la mystique galiléenne. Les Européens ont
campé un Christ assez semblable au meilleur d'eux-mêmes en se
basant sur quelques données des Évangiles. Le Jésus ami des
enfants, protecteur de la femme, chassant les marchands du temple,
dénonçant les Pharisiens est incarné dans l'imagerie européenne par
un superbe barbu blond qu'on serait moins surpris de rencontrer
dans Moscou ou Berlin que dans Jérusalem. La description des
avatars de la naissance et de la prime enfance du prophète s'est
fondue sans problème dans ce culte nordique de l'enfance qui
culminait au solstice d'hiver. Bien que basés sur l'Évangile, ces
éléments se sont développés principalement hors de celui-ci. Ils ont
donné non seulement la légende dorée, mais aussi une importante
partie de l'art européen.
Remarquons en conclusion de ce chapitre qu'un mythe
possède une forme de réalité qui fait de lui un événement historique
important : en tant que création de l'inconscient collectif, il représente
une poussée de l'idéal dans une direction donnée. Nous utilisons le
terme d'idéal dans le sens platonicien d'idées-forces capables de
remodeler une partie du monde en ce qui concerne l'éthique, les
institutions, la répartition des biens, les expansions et récessions
territoriales.
Le caractère composite des Évangiles contient les germes de
leur élimination. « Il est dans la nature de ce qui est composite de se
décomposer » a dit le Bouddha. L'Évangile s'exprime de manière
équivalente : « Une maison divisée contre elle-même périra. » ( Que
tout ceci est donc méchant envers le métissage et le chaos racial !
Ne faudrait-il pas interdire Bouddha et Jésus pour incitation à la
discrimination et à la haine raciale ? )
Que les bonnes âmes se rassurent : les Évangiles ne seront
pas plus interdits pour cela qu'ils ne le seront pour provocation au
meurtre ( « et ceux qui ne veulent pas que je règne sur eux, amenezles
moi et étranglez-les devant moi » ). Une légende tenace court
dans le peuple depuis plus d'un millénaire : la fin des temps verra la
conversion des juifs. Il est fort possible que ceux-ci adoptent
prochainement le christianisme. Tel qu'il est aujourd'hui, ce dernier
pourrait devenir leur plus commode instrument de domination. Les
juifs de ce siècle ne feraient alors que rejoindre les premiers
chrétiens dans leur entreprise de noyautage du pouvoir. Tout
penseur objectif ne pourra nier que les Évangiles sont bourrés
d'équivoques et d'incompatibilités. Nous allons examiner maintenant
dans quel terrain la semence de tant de contradictions a pu se
développer.
Le christianisme entre la psychose de l’avoir et la psychose de l’être.
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Nous avons vu que la puissance écrasante du Soleil engendre
le monothéisme et la monarchie absolue de droit divin. Face aux
dominateurs jaloux la vie de l'Oriental se fait discrète. L'Oriental
devient facilement obséquieux et il est prudent dans l'étalage de sa
richesse, de son bonheur. Il redoute de provoquer la convoitise et la
jalousie des puissants. Sa maison a des murs uniformes avec peu de
portes et fenêtres, ce qui est autant une défense contre la curiosité
que contre le Soleil. La beauté et le luxe sont tournés vers l'intérieur,
le patio. Les petites fenêtres sont grillagées et la porte puissamment
verrouillée. Il est difficile de juger de la condition sociale de l'Oriental
à son aspect. Un commerçant milliardaire peut fort bien se promener
dans la rue en blouse grise, comme un simple magasinier. L'Oriental
aime accumuler des richesses qui font sa force face au pouvoir
politique ; mais cette force est tenue soigneusement cachée et il est
difficile d'en obtenir l'aveu, encore plus difficile d'aborder la question
d'un prêt que le possédant ne demande pourtant qu'à consentir.
La mainmise juive sur l'Europe, déjà très avancée dans Rome avant
Jésus, s'explique en grande partie par ce qui précède. La partie fut
d'autant plus facile pour les juifs que, sauf rares exceptions comme la
réaction brutale de Philippe le Bel, les nobles et monarques
européens furent honnêtes avec les usuriers, car ils étaient liés par
leur sens de l'honneur. En Orient, les choses allèrent moins bien pour
les juifs, car ils eurent à faire à des semblables qui les voyaient venir
et à des puissants qui ne se gênaient pas pour les dépouiller.
L'Européen, le Nordique et le Romain surtout, sont affectés de
la psychose inverse : celle de l'être qui dégénère vite en besoin de
paraître. Alors que la misère de l'Orient s'étale en mendicité, celle de
l'Europe se cache, car la misère est assimilée à la faiblesse, donc
honteuse. Aucune notion de chance et de malchance, de « mektoub
», ne vient tempérer le sentiment d'écrasement du pauvre, rendu plus
cruel par l'ostentation du riche. On emprunte donc s'il le faut, on se
ruine en intérêts, on gage sa terre et autres biens, mais on étale des
signes de richesse sans lesquels il n'est pas de dignité sociale en
Occident. C'est ainsi que les usuriers purent dominer la noblesse et
les souverains ( pensons à Fugger et Charles Quint ) et que de nos
jours l'appareil bancaire, qui est devenu un gouvernement mondial de
fait, a endetté toute la production industrielle et artisanale, a imposé
les pires folies économiques, affamant d'une part le tiers-monde pour
alimenter les pays industriels en même temps qu'il ruine la
paysannerie de ces derniers.
Le philosophe américain Emerson a bien fait ressortir cette psychose
en écrivant que l'Angleterre était le pays où l'on exigeait le plus que
l'individu affiche sa condition sociale, abusivement assimilée à sa
valeur humaine : « Vous me dites que vous avez du mérite ... Mais
pourquoi n'avez vous pas un équipage de chevaux, des habits de
bonne coupe ? ». Nos critères de jugement n'ont pas changé depuis
Emerson et des millions de jeunes se sont vu refuser des situations
pour lesquelles ils avaient les capacités requises, simplement parce
qu'ils étaient trop pauvres pour afficher même un semblant d'aisance,
trop démunis de biens immobiliers pour obtenir un prêt. Les
inévitables timidités et inhibitions dues à la pauvreté ont aussi
gravement faussé le jeu de la nécessaire circulation des élites.
Au début de la pénétration chrétienne, l'Europe est plongée
dans une psychose d'affirmation de l'être par la violence, le besoin
maladif de remettre sans cesse l'existence en jeu. C'est l'époque du
cirque et des gladiateurs auxquels le spectateur s'identifie, tout
comme nous le faisons avec les gangsters, policiers et héros de
westerns, le derrière dans notre fauteuil. Chacun a besoin de
s'affirmer fort et vainqueur, soit personnellement, soit à travers la
puissance de Rome. Les Romains jouent leur fortune aux courses de
chevaux et parient sur des gladiateurs. Les Germains jouent aux dés
et ne se contentent pas de risquer leur fortune ; ils engagent aussi
leurs femmes, leurs enfants et même leur condition d'hommes libres.
Le prestige compte plus que la fortune, la famille et la vie. Une
maxime germanique enseigne « je sais une chose plus forte que la
mort : c'est la bonne renommée ». L'honneur aussi est une médaille
qui a son envers ...
Cette folie du combat ostentatoire sévira encore dans la
noblesse française au temps de Richelieu et motivera l'interdiction du
duel. À la même époque, la noblesse espagnole affronte les taureaux
à pied, la pique à la main et sans l'aide d'aucun assistant.
Ce sont donc le jeu et la manie du combat qui ont ruiné la
noblesse au Moyen-Âge et ont fait d'elle la proie des usuriers. Ceuxci
n'ont pas eu à se fatiguer pour piéger nobles, rois et empereurs.
C'est la propre démesure de ces derniers qui les a rendus tributaires
des prêteurs.
Aux victimes de chacune de ces psychoses, le christianisme
avait quelque chose à apporter.
Il consolait l'humiliation des uns en flétrissant la superbe des
forts et la richesse des possédants. Il promettait un monde de justice
compensatrice dans lequel « les derniers seraient les premiers. ».
À ceux qui étaient tourmentés par les artifices de la puissance
ostentatoire ou de la richesse, il apportait l'apaisement de l'humilité.
Au vide de l'orgueil et à l'inquiétude que donnent les trésors, il
opposait la sécurité de la petitesse et le soporifique du paradis.
En menant cette double action auprès des puissants et des
faibles, les missionnaires chrétiens se mettaient en position de
canaliser pour eux la force des masses ( vox populi, vox Dei ), la
richesse des riches et l'épée des forts. Ils y ont mis d'autant plus
d'habileté et d'acharnement que, n'agissant pas pour eux, mais pour
leur Église, ils se sentaient absous de toutes les manoeuvres.
Mais la subtilité dans les machinations et les vues lointaines
inspirant la stratégie ne suffisaient pas à une telle entreprise. Il y
fallait aussi un fanatisme inexorable, capable d'aller du mensonge le
plus grossier à l'hypocrisie la plus subtile, capable aussi des pires
cruautés comme des plus longues patiences. Or - et nous énonçons
la vérité la plus fondamentale à l'intelligence du phénomène
historique chrétien - UN TEL FANATISME NE PEUT EXISTER QUE
S'IL EST SOUS-TENDU PAR UNE FOLIE. Cette folie fanatique a fait
la force de l'Église romaine qui, par une suprême hypocrisie, prétend
reconnaître la protection divine dans les succès dus à ses crimes et à
ses mensonges. À ceux qui jugent impossible que des manoeuvres
aux vues lointaines, grandioses et cohérentes, soient basées sur une
folie, je citerai cette parole d'un psychiatre anglais : « Les fous ont
tout perdu, sauf la raison. ». Ce n'est pas une boutade et de nos
jours on ne parle guère plus de folie, mais de maladies de la
personnalité.
Oui, fanatisme nourri d'une folie, folie équilibrante par rapport
aux psychoses que nous venons de mettre à nu, mais folie tout de
même. Nietzsche fut le premier à reconnaître et dénoncer le
christianisme pour ce qu'il est : une maladie. Il nous montre aussi les
prêtres tels qu'ils sont : parfois des faibles haineux envers tout ce qui
est de bonne venue, souvent des refoulés victimes de leur propre
religion, parfois aussi des natures délicates qui ont cherché refuge
dans la seule religion connue d'eux.
C'est pourquoi il nous met en garde non seulement contre leurs
enseignements, mais aussi contre des sentiments de haine vulgaire
et injuste envers eux : « Voici des prêtres. Passez devant eux en
silence et l'épée au fourreau. Ce sont mes ennemis, mais mon sang
est parent du leur ; et je veux que mon sang soit honoré jusque dans
le leur. ». Il ajoute ailleurs : « Rien n'est plus vindicatif que leur
humilité, et quiconque les attaque peut facilement se souiller,
beaucoup d'entre eux ont trop souffert ; c'est pourquoi maintenant ils
veulent faire souffrir les autres. ». On lit aussi dans le Zarathoustra de
Nietzsche : « Là où la canaille vient boire, toutes les fontaines sont
empoisonnées ; et beaucoup ont cru se détourner de la vie, qui ne se
sont détournés que de la canaille. ». C'est sans doute le cas de bien
des prêtres.
Aujourd'hui les Églises chrétiennes ont perdu beaucoup de leur
puissance. Mais elles avaient préalablement détruit par la violence, la
calomnie, l'occultation, tout ce qui leur était vraiment contraire. Aussi
ceux qui se détournent d'elles ne rencontrent que le vide. Ne pouvant
se contenter du nihilisme contemporain, des natures d'élite
retournent dans les pièges usés du christianisme. C'est pourquoi on
rencontre plus fréquemment qu'autrefois parmi les prêtres des êtres
nobles, aptes au sacrifice, ardents et généreux. Nous devons donc
suivre le conseil de Nietzsche et nous distancer de cet
anticléricalisme né à l'époque scientiste et qui ne conduit qu'à un
christianisme sans métaphysique.
Nous devons maintenant examiner plus en détail quelles
stratégies et quelles tactiques a utilisées cette maladie qui s'est
affirmée contre deux psychoses opposées, mais non sans en être
bientôt elle-même imprégnée.
Réalités politiques dérrière les mythes et les dogmes chrétiens. Quo
vadis domine ?
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« Où vas-tu, Maître ? - Je vais à Rome pour y être crucifié une
seconde fois. ». L'apôtre Pierre fut découragé par l'accueil reçu dans
cette ville. Il rencontra alors le Christ avec lequel il eut le bref
dialogue que nous relatons. Il comprit alors que c'est en sa personne
que le Christ devait être crucifié une seconde fois et fit demi-tour vers
la ville rébarbatrice à son message. Que signifie cette fable ?
Les prosélytes chrétiens ont décidé de s'implanter dans la
capitale ennemie. La ville aux sept collines n'est-elle pas la bête aux
sept têtes de l'Apocalypse ? Celle qu'il faut abattre coûte que coûte ?
L'obsession a subsisté et le juif Freud n'a jamais réussi à prendre le
train pour Rome, ressentie comme l'ennemie absolue. Au Printemps
1968, un juif commentant en ma présence la situation dit : « C'est la
seconde mort de Rome. ». Le petit groupe chrétien recule,
découragé, lorsque son chef refuse l'échec. Rome doit être conquise
même au prix du martyre, car elle est le phare culturel de tout
l'Empire et rien n'a d'avenir sans sa consécration. C'est aussi à Rome
que se trouvent les têtes de l'administration, de l'armée et toute la
gigantesque machinerie impériale ne peut être dominée par l'infime
secte qu'en s'emparant de ces têtes.
Avec ses sept collines, Rome était aussi un épicentre religieux
de la plus haute importance. Sans doute les prosélytes chrétiens
l'avaient-ils compris. En tout cas, la curie romaine ne l'a pas oublié et
l' « Osservatore romano » écrivait à la fin des années 50 : « Rome
est le centre du monde. Toute pensée politique qui l'oublie en devient
éphémère ».
Cette volonté d'implantation dans Rome, marque d'une
entreprise impérialiste consciente, n'était pas spéciale aux chrétiens.
Nous avons vu précédemment que le culte d'Isis était une entreprise
égyptienne de mainmise religieuse et le culte de Mithra une similaire
entreprise perse. Le choc de cultures dégénérées et différentes, voire
même incompatibles, avait plongé tout le monde antique dans le
désarroi. Après neuf siècles de domination assyrienne, les Perses
s'étaient libérés après les révoltes d'Abtyn et de Féridun et avaient
reconquis le pouvoir. Mais ils sortaient de cette domination
gravement sémitisés et le zoroastrisme échoua dans sa tentative de
mariage entre la vieille religion aryenne de la Loi Pure et les cultes
magiques assyriens. Le mithraïsme et le manichéisme sont des
crises d'un monde qui ne parvient pas à trouver son équilibre. Le
Proche-Orient était un chaudron de sorcières que la paix égyptienne
avait déserté, qui avait besoin de la paix romaine et la refusait
pourtant, que le Coran, loi socio-politique autant que religieuse, ne
parviendra pas à apaiser durablement, qui, mise à part les époques
de la domination turque et du protectorat franco-anglais, est depuis
plus de deux mille ans ce qu'il est aujourd'hui au Liban, en Israël et
dans le golfe Persique. La Grèce avait sombré dans des rivalités que
la Ligue Maritime n'avait pas réussi à canaliser au service d'une
nation hellénistique. Le désordre s'accompagnait d'une atomisation
spirituelle en sectes philosophiques coupées du peuple, en
bavardages spéculateurs sans le moindre pouvoir de fondation
culturelle.
Alors, pendant deux millénaires, le monde va se tordre et se
déchirer dans la recherche de hiérarchies acceptées et de la paix par
une loi universelle. Ce point est fondamental si l'on veut comprendre
le côté de bonne conscience que pouvaient avoir des chrétiens dans
leur démarche à la fois apostolique et politique. Ils n'étaient pas les
seuls à agir ainsi, la séparation du spirituel et du temporel étant alors
inconcevable. Nous verrons successivement Alexandre, César,
Arioviste, Auguste, Marc Aurèle, Julien, Attila, Mohammed,
Charlemagne incarner la vision d'un empire universel ayant à sa tête
un monarque pontife investi d'une mission divine. Alexandre est fils
d'Amon Râ ; César est dieu de son vivant, affirmant, par là, qu'il
communique avec l'invisible ; Jésus s'affirmant fils de Dieu était dans
la note de son époque ... Julien, dit l'apostat, envisage l'unification du
monde sur la base du mithraïsme et se considère comme investi
d'une mission divine de successeur d'Alexandre ; Attila est le fléau de
Dieu et ne plaisante pas en le disant ; la meilleure preuve en est qu'il
respecte les monastères et les paysans, tournant sa fureur, comme
plus tard Gengis Khân, contre les villes corrompues ; Mohammed a
reçu le Coran, loi socio-politique, dicté par l'envoyé d'Allah ; et
Charlemagne légifère aussi en théologie, interdisant le culte marial,
ainsi que tous les cultes païens, par les capitulaires de Paderborn (
777 ). Nous trouvons donc constamment associés le souci sociopolitique
et le souci religieux. Cette recherche, qui se poursuit sans
succès depuis vingt-quatre siècles, était une hantise générale lors de
l'irruption chrétienne dans l'Empire romain, et cette hantise alla
s'aggravant. Les totalitarismes modernes, les marxistes surtout, sont
la continuation de ces tentatives anciennes.
Les philosophes reprochaient aux chrétiens leur ignorance, leur
refus de la discussion avec des gens capables de leur répondre. Sur
ce point on lira avec profit le Contre Celse d'Origène. Les
philosophes ne comprirent pas que la force des chrétiens était
justement d'ignorer, de ne pas discuter, de ne pas voir leurs propres
illogismes et contradictions ce qui leur permettait d'avancer là où les
autres hésitaient. Dans un monde sceptique et fatigué
d'intellectualité, écoeuré de brutalité, écrasé d'impuissance, les
chrétiens proposaient un remède fallacieux mais séduisant : un rêve,
une espérance irrationnelle, une folie.
Bientôt des foules de gueux partiront chaque soir au-devant du
Christ ressuscité, exaltées par le palabre d'un ivrogne, d'un mendiant
: « Il revient, on l'a vu ... » Les Romains regardent, goguenards. Ils ne
soupçonnent pas la puissance de contagion de la folie.
Ailleurs c'est le confort d'une micro-société offerte à la solitude
des blasés. des parias qui sera décisif. Nietzsche a bien vu cette
force captivante et nous parle dans le Gai savoir de « ces petites
communautés chrétiennes de la diaspora où l'on se sent bien entre
soi, où s'élève la température de l'âme ».
Sourdement, Rome et tout l'Empire se christianisent. Bientôt les
chrétiens deviennent agressifs, provocateurs. L'affaire de Polyeucte
mise en scène par Corneille ressemble à des centaines d'autres.
C'est cela et uniquement cela qui a déclenché les persécutions.
Encore faut-il préciser que celles-ci ne furent jamais qu'épisodiques,
qu'elles ne furent menées par les autorités romaines qu'avec la plus
extrême répugnance, qu'elles n'affectèrent jamais simultanément la
totalité de l'empire, ni même une partie importante de celui-ci, que le
christianisme ne fut jamais interdit, mais seulement combattu là où il
causait du scandale, enfin que les persécutions antichrétiennes sont
infimes, comparées à celles que les chrétiens exercèrent contre les
autres religions sur tous les continents. Nous n'avons pas besoin
d'aller chercher des exemples au Mexique ou au Pérou. Pendant
sept siècles, l'Inquisition a fait peser sur l'Europe une succession
presque ininterrompue d'horreurs. Et avant elle, il y eut les affaires
d'Abélard et de Verden-an-der-Aller dont nous avons déjà parlé.
L'Église serait bien en peine de faire état d'un exemple héroïque
d'une telle ampleur dans le camp chrétien. La totalité des chrétiens
mis à mort avant Constantin n'atteint même pas le nombre des
quatre mille cinq cents décapités de Verden.
Méthodiquement, administrations, magistrature, armée sont
noyautées. Bientôt un chrétien gaulois pourra braver le tribunal et
lancer à la figure des magistrats : « Si nous nous retirions, vous
seriez effrayés de votre solitude ; il ne vous resterait que vos
temples. ». Le réseau clandestin des chrétiens pourra décider du sort
des batailles et traiter avec les empereurs, en attendant de les
amener à Canossa. La stratégie choisie par l'apôtre Pierre était la
bonne et a parfaitement réussi.
On est en droit de nous demander : « Puisque le temporel et le
spirituel étaient indissociables, puisque les gouvernants de toutes les
cités antiques étaient tenus à l'allégeance aux dieux et à la
collaboration avec les hiérophantes, que pouvez-vous reprocher aux
chrétiens, sinon d'avoir gagné ? ». Nous leur reprochons tout, sauf
d'avoir gagné ; c'est même l'unique chose que nous trouvions à
admirer chez eux. Chronologiquement classés, voici nos principaux
griefs :
1) Nous leur reprochons leur intolérance, leurs insultes
stupides, leur incapacité de comprendre les religions qu'ils voulaient
remplacer, leurs actes iconoclastes comme celui de Polyeucte. Nous
leur reprochons les persécutions qu'ils ont subies, parce que c'est
eux qui les ont rendues inévitables.
2) Nous leur reprochons la destruction de milliers de merveilles
( temples, statues, fontaines ), destruction qui aurait été totale sans
l'intervention du « barbare » Théodoric de Vérone ( Dietrich von Bern).
3) Nous leur reprochons l'intolérance des Théodoses, la
persécution des pythagoriciens, le meurtre horrible de la belle
mathématicienne Hypatie, la canonisation du tortionnaire Cyrille,
l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie, la destruction de la plus
précieuse partie de la littérature grecque. Seul un dixième de l'oeuvre
d'Eschyle nous est parvenu ; nous n'avons presque rien d'Héraclite.
Ceux qui nous ont été transmis sont les décadents, les pré-chrétiens,
les négateurs et calomniateurs de la vie : Socrate, Platon, Aristote.
4) Nous leur reprochons d'avoir substitué la rivalité du spirituel
et du temporel à leur collaboration harmonieuse. L'équivoque débute
dès saint Augustin avec ses théories de la primauté politique du pape
qui ont empoisonné tout le Moyen-Âge de guerres entre papes, rois
et empereurs. Nous leur reprochons d'avoir opéré la scission de fait
du spirituel et du temporel que la séparation des Églises et de l'État
sous la troisième République n'a fait qu'officialiser.
5) Nous leur reprochons leur haine de la femme, de la vie, de la
nature, leurs dogmes absurdes qui ont jeté la science dans le
matérialisme, d'avoir fait de l'homme un exploiteur aveugle, d'être
responsables de tout le nihilisme contemporain et des catastrophes
écologiques qui nous engloutiront peut-être. Car comment espérer
des réactions salvatrices alors que les chrétiens et leurs complices
des autres religions du désert dominent tout l'appareil médiatique ?
Les chrétiens, leurs rivaux complices des autres doctrines du
désert, les nihilistes et matérialistes qu'ils ont suscités gouvernent le
monde sans partage depuis un millénaire et demi au moins en
Europe et Amérique. Leur responsabilité est totale, écrasante, et
nous allons la prendre sous la loupe.
Paul de Tarse
*****************
Qui était cet apôtre auteur d'un discours aussi éloquent
qu'abstrait sur la charité et de quantité d'autres phrases fort
concrètes contre la même charité ? La personnalité de Paul de Tarse
est trouble. Nous ne pouvons nous étendre sur ce sujet et nous nous
contentons de renvoyer le lecteur à l'ouvrage d'Émile Gillabert aux
éditions Metanoia : Saint Paul, ou le colosse aux pieds d'argile. Nous
sommes plus sévères que l'auteur dans nos jugements sur le
fondateur du christianisme, car nous pensons que dans toute folie,
dans tout mensonge envers soi-même, il y a une large part de fuite et
de consentement. Mais cet ouvrage met en lumière, avec courage et
rigueur psychanalytique, la paranoïa de Paul de tarse, paranoïa qu'il
a inculquée au monde auquel son christianisme a réussi à s'imposer.
Non moins trouble est le comportement du personnage,
empreint du fanatisme hérité de son éducation juive, de cette
mégalomanie du peuple élu transposée au bénéfice des chrétiens et
portant la semence de tous les génocides et crimes paranoïaques
commis ultérieurement par les dirigeants chrétiens.
Une juste part accordée à la folie, Paul de Tarse reste un
manoeuvrier très équivoque. Il est juif mais citoyen romain. La relative
banalité de la chose ne prouve que la naïveté des Romains qui, étant
tolérants, sont incapables de soupçonner les forces du fanatisme. Il
est citoyen romain mais persécute les chrétiens sur ordre du
Sanhédrin juif, alors que les Romains ne s'inquiètent nullement de
cette secte infime et n'en connaissent même pas l'existence. Après «
l'illumination » du chemin de Damas, dont il parle en termes divers, le
persécuteur devient lui-même prosélyte chrétien. Miracle ? Ou vient-il
de comprendre que ces chrétiens ont politiquement raison et qu'on
ne peut se rendre maîtres de Rome que par le noyautage ? Très vite,
il va devenir le véritable meneur de l'entreprise qu'il réprimait la veille.
Il est instruit, a des dons de parole et surtout celui de brouiller les
cartes dans l'esprit des auditeurs. C'est ainsi que profitant du culte au
dieu inconnu en honneur chez les Grecs et les Romains il prétend
leur apporter la connaissance de ce dieu. La tolérance, vertu
universelle de tous les « paganismes », la curiosité aussi lui ouvrent
les oreilles des foules. Mais il se garde bien de laisser entrevoir que
ce « dieu inconnu » est un monstre exclusif et jaloux qui veut abattre
toutes les autres divinités.
À Éphèse, Apollonios de Tyane a lancé l'espérance en un
Chrestos, roi oint capable de sortir le monde du chaos. Paul de Tarse
s'empare de l'idée et donne au Galiléen ce nom de Chrestos qu'il n'a
jamais prononcé. Paul bat ensuite le rappel de toutes les sectes
philosophiques, tient partout ses discours équivoques et confus qui
font rire les gens intelligents et cultivés, mais lui permettent de rallier
les esprits les moins critiques, les plus avides de fuir des problèmes
lancinants en plongeant dans des espérances irrationnelles et
anthropomorphiques. Le scandale provoqué par les attaques contre
l'Artémis d'Éphèse pouvait alerter et mobiliser les autorités et les
esprits libres. Mais, encore une fois, la tolérance est innée chez
l'Aryen et le rend désespérément naïf.
Parallèlement au regroupement de forces malsaines issues de
la sottise et de la veulerie, Paul de Tarse a déformé et même inversé
le message du Galiléen. Il n'en a retenu que les parties que nous
avons mises en lumière comme juives, en contradiction avec les
aspects généreux envers la femme, libre et aristocratique, de
l'Évangile. Si on compare les épîtres de Paul et la partie d'esprit
galiléen des Évangiles, on s'aperçoit que cet apôtre tardivement rallié
et qui n'a pas connu son prophète a détruit le message de la religion
de Vénus, de cette religion des Poissons que les chrétiens continuent
pourtant à prendre pour emblème. La fureur anticharnelle du
christianisme des saints du désert et du Moyen-Âge a ses premières
sources dans les épîtres de Paul. Cette fureur va refouler les instincts
sexuels et les inverser en folie sadomasochiste à prétexte vertueux et
expiatoire. Citons à nouveau la célèbre phrase de Nietzsche qui,
comme presque toute son oeuvre, devance la psychanalyse : « Le
christianisme a empoisonné Éros ; le petit dieu n'en est pas mort,
mais il est devenu vicieux ». Il faudrait des livres pour étudier
l'engrenage de malédictions que Paul de Tarse a mis en route dans
l'histoire de l'Europe. Ce publiciste juif américain n'exagérait pas en
écrivant qu'en comparaison de ce que nous avait infligé ce sinistre
inverseur de valeurs saines, le bolchevisme n'avait que la dimension
d'une bagarre de rue.
Paul de Tarse a envers le pouvoir séculier une attitude
hypocrite et servile : d'une part les fastes de ce monde sont
méprisables, d'autre part toute autorité vient de Dieu, ce qui
approuve tous les esclavages et condamne toutes les révolutions...
jusqu'au jour où elles ont gagné et transformé ainsi la violence
condamnable la veille en volonté de Dieu aujourd'hui. La monarchie
absolue de droit divin, issue du psychisme du désert, trouve donc
une base dogmatique chrétienne chez saint Paul.
Des théologiens chrétiens compétents et sincères m'ont
reproché mes attaques contre Paul de Tarse. Bien qu'ils ne m'aient
opposé que des protestations sans la moindre réfutation, je me suis
imposé une nouvelle lecture des épîtres. Je n'y ai trouvé que des
confirmations de mes points de vue. Je ne saurais que conseiller à
ceux qui cherchent, les relire avec des yeux neufs. Celle aux
Corinthiens est particulièrement significative, « ... Il y a chez vous une
impudicité telle qu'on ne la trouve même pas chez les idolâtres ...
C'est au point que l'un de vous a pris la femme de son père ... qu'un
tel homme soit livré à Satan pour la destruction de la chair afin que
l'esprit soit sauvé au jour du Seigneur Jésus. ». Ce texte suggère
deux réflexions. Les moeurs sémitiques actuelles incitent à penser
que le père devait être un vieux décrépit qui s'était acheté une femme
beaucoup plus jeune, laquelle trouva le fils plus à son goût que le
père. Pour nous, Aryens d'Europe, c'est le fait qu'un vieil homme
puisse contraindre une jeune femme à venir dans son lit qui est un
répugnant scandale, nullement que deux êtres jeunes aient rétabli les
droits de la nature. Quel peut bien être ce Satan à qui il faut « livrer
cet homme pour la destruction de la chair » ? Nous serions curieux
de consulter le texte original, au moins le plus ancien, car c'est
probablement du bourreau dont il était question ; en tout cas c'est
bien ainsi que l'ont interprété les Inquisiteurs qui « brûlaient la chair
pour sauver les âmes ».
Plus loin nous lirons : « Celui qui marie sa fille fait bien, celui
qui ne la marie pas fait mieux. » ; que la fille concernée puisse avoir
un avis sur la question ne l'effleure même pas !
Rabâchant l'affirmation de sa propre nullité, mais tenant devant
lui le bouclier de son Dieu, il insuffle aux hésitantes communautés
chrétiennes son fanatisme d'homme du désert, son mépris de la
chair, son hypocrite humilité qui cachent mal une effroyable
mégalomanie, sa haine des « idoles » dont le symbolisme et la réalité
cosmo-biologique lui échappent complètement. Il est le père des
Théodoses, des Polyeuctes, des Inquisiteurs, de tous les fanatiques
à la fois sanguinaires et mielleux, ainsi que des phallocrates. Il a
réduit à néant tout ce que Jésus avait tenté de restituer aux peuples
du Moyen-Orient et véhiculé sur l'Europe les poisons les plus mortels
de la pathogenèse du désert.
Les mêmes théologiens me reprochent une précision
insuffisante dans mes analyses de textes. Je refuse de me laisser
coller le nez sur tel ou tel arbre qui me cacherait la forêt. Aucune
analyse précise ne m'a convaincu. L'histoire du prophète chrétien et
du premier siècle de l'expansion chrétienne est inextricable. Le
penseur catholique Daniel-Rops lui-même a du convenir que «
quiconque affirme l'historicité du Christ le fait au risque de devoir un
jour défendre une personnalité toute différente de celle qu'il a
imaginée ». Nous refusons de gaspiller notre existence en des
recherches qui, de toutes façons, resteraient stériles parce
qu'anachroniques et inadaptées aux besoins actuels. L'opinion des
cénacles d'intellectuels nous est indifférente ; nous préférons
renoncer à faire une étude « exhaustive et scientifique », c'est-à-dire,
à fournir à des ânes blasés et prétentieux, incapables de percevoir
les plus criantes évidences, la paille dorée de l'érudition.
L'huissier de l'histoire sonne à la porte et nous présente la.
facture de l'ère dite chrétienne. Cette facture parle de surpopulation,
de famines, d'abêtissement, de drogues et névroses universelles, de
catastrophes écologiques, de menaces apocalyptiques, de
domination mondiale d'une véritable crapulocratie. Nous n'avons plus
le temps de concocter des sommes que personne ne lirait. Nous
écrivons pour le peuple, pour le petit reste qui mérite encore ce nom,
c'est-à-dire pour tout homme capable de réflexion et d'engagement,
quels que soient son niveau d'instruction livresque et ses origines
sociales. Ce que nous désirons susciter, ce sont des êtres capables
d'atteindre à une cohérence de leur vision des choses, de leur
éthique et de leur vie concrète et de mettre par là en route la
révolution culturelle de l'Europe.
Par ce signe tu vaincras
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Apocalyptique, haineux et fraternel à la fois, gros du mélange
contradictoire de toutes les sectes philosophiques, de toutes les
équivoques, méprisant l'esprit au point d'oublier sa présence dans
l'homme et de substituer la dualité corps et âme à la trinité antique
corps, âme et esprit, le christianisme n'en poursuit pas moins sa
marche inexorable de destruction du corps pourrissant de l'Empire.
On ne peut se mettre d'accord entre chrétiens, on ne possède aucun
texte écrit comme base de discussion, mais qui s'en inquiète ? Qui
s'aperçoit des désaccords implicites ? Les célèbres querelles de
chiffonniers des conciles seront pour plus tard, quand la bataille
contre Rome sera gagnée.
L'instant décisif viendra en 312, lors de l'affrontement entre
Maxence et Constantin. Le noyautage de l'armée est suffisamment
avancé pour que les chrétiens puissent décider d'avance de l'issue
d'une bataille entre Romains. On le fait savoir à Constantin qui
accepte de composer avec ces maîtres de l'ombre, lesquels lui
donnent la victoire promise. L'Église a ensuite répandu la fable de la
vision de l'empereur : « Par ce signe ( la croix ) tu vaincras. ». Nous
retrouverons une foutaise analogue au sujet de la « conversion » de
Clovis à la bataille de Tolbiac : « Dieu de Clotilde, si tu me donnes la
victoire, je me ferai baptiser ! ». Le contrat sera respecté de part et
d'autre : en 313 l'édit de Milan assure la liberté de culte aux
chrétiens. Leurs débordements ne pourront plus provoquer de
persécutions. En position de force face à l'empereur, ils honorent
leurs engagements et commencent à s'identifier habilement à
l'Empire : en 314, au concile d'Arles, les valeurs sont inversées ; plus
de non-violence, plus de refus de porter les armes ; non seulement le
chrétien doit obéir à l'État, mais celui qui refuse le service militaire se
voit frappé de la suprême sanction ecclésiastique :
l'excommunication.
Ce ralliement des chrétiens à l'Empire ne sauvera pas Rome.
Les désastres vont même pleuvoir à une cadence accélérée et
lorsque saint Augustin voudra faire de la Papauté le point de
ralliement politique des Romains, il se heurtera au sentiment
populaire qui associe l'avalanche des catastrophes à l'abandon des
dieux ancestraux.
Contrairement à ce que fait croire l'Église, Constantin ne s'est
jamais converti au christianisme. Sa crainte des dieux de Rome est
restée vivace et il recule d'année en année la date de son baptême. Il
a peut-être finalement reçu celui-ci sur son lit de mourant, hors d'état
de décider ; mais compte tenu de la capacité de mensonge du clergé
romain, rien n'est certain.
S'il n'est pas chrétien, il est néanmoins orientalisé, ce qui
explique une compromission dont il n'a sans doute pas mesuré la
portée, aussi peu que Clovis ne la mesurera plus tard. C'est aussi lui
qui transfère la capitale impériale à Byzance.
Julien dit l'apostat, homme d'une immense culture et visionnaire
hors pair des destinées de l'Europe, voulait tenter une restauration de
la vertu romaine. Il a pénétré l'essence profonde du christianisme et
écrit la phrase que nous avons déjà citée : « Si les chrétiens
triomphent, dans deux mille ans les juifs seront maîtres du monde. ».
Élevé à Trèves, aux confins de cette Germanie non encore
christianisée dont le culte d'Odhinn s'identifie sans problèmes à celui
de Mercure, Julien voit dans le culte de Mithra un dénominateur
commun pour toutes les forces restées saines dans l'Empire. Nous
avons déjà vu de quelle ruse démoniaque il avait été l'instrument
naïf. Après deux ans d'un règne trop court pour être efficace, il est
mortellement blessé en 363 dans une bataille contre les Perses, alors
qu'il tente de ramener les restes de son armée détruite dans la
fournaise de l'été désertique. Prêts à n'importe quelle affabulation
pour faire basculer les gens de leur côté, les chrétiens ont prétendu
qu'il était tombé en disant : « Tu as vaincu, Galiléen. ». L'absurdité de
cette fable tombe sous le sens si on pense que les deux armées, la
perse et la romaine, étaient toutes deux mithraïstes. La vérité est que
l'empereur est mort pendant la nuit qui a suivi sa blessure, devisant
sereinement sur l'immortalité, avec toute la force d'âme d'un grand
visionnaire.
Alors éclate la querelle de l'arianisme. Bien que condamné en
325 au concile de Nicée, l'arianisme n'a cessé de progresser. saint
Jérôme écrit : « Un matin le monde s'éveilla et gémit de se trouver
arien. ». L'empereur Valens, successeur de Julien, est arien. Les
Chrétiens ne savent plus où ils en sont ; l'ont-ils d'ailleurs jamais su ?
« Dites-moi où est la chaire de Pierre et je vous dirai de quel parti je
suis. ». Cette réponse d'un Père de l'Église est révélatrice de la foi
chrétienne de cette époque : refus de la responsabilité personnelle
du choix, alignement inconditionnel basé uniquement sur la filiation
apostolique, laquelle ne fut jamais à même de garantir une continuité
doctrinale Une telle soumission est le fait d'âmes d'esclaves ; elle ne
peut avoir que le niveau politique et non le niveau religieux. Elle
contient potentiellement l'indifférente et morne crédulité des
somnambules et des vaches au râtelier que constituent les humains
modernes, grands bâfreurs de « culture » et de mensonges
médiatiques qu'ils gobent avec une gourmande stupidité.
Les chrétiens voulaient et veulent encore faire l'unité du monde,
alors qu'eux-mêmes ne furent jamais capables de s'unir. La
corruption et la division sévissent donc de plus belle, tandis que mûrit
à l'Est un ouragan qui va emporter l'Empire.
Dans les vastes plaines, entre les Carpates et la mer
Caspienne, s'est installée une population germanique originaire du
Gotland suédois : les Goths. Cette population forme un royaume
solide gouverné par un roi plus que centenaire, Ermenrich. Les
Romains ont peur de ces « barbares » qu'ils assimilent plus ou moins
aux Scythes. Ils ne voient pas que ce jeune royaume, vassal de
l'Empire perse constitue une indispensable barrière contre les
cavaliers asiatiques. Ils font tout pour semer le trouble chez leurs
voisins et en 374 le vieux roi est frappé de trois coups de couteau par
de jeunes ambitieux avides de lui succéder et manipulés par des
agents romains. Il ne mourra pourtant que quelques jours plus tard,
âgé de 110 ans, à cheval et à la tête de ses troupes. Car les Huns
viennent de franchir la Volga sous la direction de Balamir, grand-père
d'Attila. Les Goths sont écrasés. Ceux de l'Est ou Ostrogoths ont été
contraints de se rallier ; ceux de l'Ouest ou Wisigoths continuent à
résister. La sécurité de Rome exigerait une alliance urgente avec
eux. Mais l'empereur Valens accorde davantage d'importance à la
théologie qu'à la politique et à l'armée. Lui, le basiléus, n'est-il pas le
successeur du Christ sur terre ? Saint Augustin sera d'un avis
différent et affirmera la supériorité du pape sur l'empereur ; mais il n'a
alors que 20 ans ; personne n'a encore entendu parler de lui et il ne
s'occupe pour le moment que de vin et de filles faciles.
Il y a parmi les Wisigoths un premier émissaire chrétien, un
esclave grec que ses nouveaux maîtres appellent Ulfilas et qui a
même traduit le Nouveau Testament en langue wisigothe en se
servant de caractères grecs et de runes germaniques, très modifiés.
Devant la menace des cavaliers mongols, le prosélyte chrétien fait
une proposition séduisante : les Wisigoths n'ont qu'à se convertir au
christianisme ; alors ils pourront demander asile à l'Empire romain,
sur l'autre rive de ce Danube que les cavaliers ne peuvent franchir.
On discute et on envoie une délégation aux officiers de la frontière
qui jugent l'affaire trop grave pour en décider eux-mêmes, mais
permettent à Ulfilas de partir à Byzance trouver le basiléus. Celui-ci
écoute l'ambassadeur wisigoth, mais se lance en guise de réponse
dans une interminable prédication arienne à laquelle le malheureux
Ulfilas, converti à un christianisme du coeur, ne comprend rien.
Après des semaines de palabres, les Wisigoths sont autorisés
à entrer dans l'Empire pourvu qu'ils acceptent au passage le
baptême arien. Que n'accepteraient-ils pour mettre le Danube entre
les cavaliers mongols et eux ! Le passage a donc lieu en
commençant par les femmes et les enfants. Mais lorsque les
hommes ont passé à leur tour ils ne retrouvent pas leurs familles ; on
les a évacuées vers l'intérieur ... Pourtant la vérité éclate bientôt avec
son incroyable degré d'horreur : les officiers de la frontière ont vendu
plus d'un million de femmes et d'enfants comme esclaves. Cette
abjecte trahison est l'un des démentis éclatants apportés à la fable
de l'abolition de l'esclavage par le christianisme. Nous avons vu que
saint Paul apportait le soutien de la théologie à l'esclavage. Nous
verrons un pape se promener sur le marché aux esclaves de Rome
et dire devant de jeunes Anglo-Saxons enchaînés : « Ce ne sont pas
des Angles, mais des anges. ». En réalité l'esclavage ne sera jamais
officiellement aboli avant la Révolution française.
Ce crime monstrueux contre des réfugiés en détresse sera le
début d'un contentieux inexpiable entre Wisigoths et Romains,
source d'atrocités pendant plus de treize siècles.
Les Wisigoths se regroupent et se réarment à l'intérieur de
l'Empire. En 378 ils passent à l'attaque. L'armée romaine est
pulvérisée, l'empereur Valens cerné, enfumé et brûlé comme un
renard dans une hutte de roseaux des marécages de Thrace. Les
Wisigoths sortent de cette courte guerre maîtres de la Grèce. De là
ils passent en Dalmatie, puis en Italie du Nord où ils fondent les villes
de Ravenne et Vérone ( Raben et Bern en germanique ) ; ces deux
noms d'animaux de l'initiation odinique, le corbeau et l'ours, en disent
long sur la sincérité de la conversion arienne des Wisigoths.
Pourtant, si pendant des siècles ceux-ci seront les plus ardents
défenseurs de l'arianisme c'est parce qu'entre temps l'empereur
Théodose a décrété le catholicisme religion de l'État romain. Or, en
vertu du contentieux inexpiable, la position romaine détermine à
contrario la position wisigothe.
Théodose a donc rendu le catholicisme religion d'État
obligatoire. Quiconque refuse le baptême chrétien doit être traité
comme rebelle à l'empereur. Il met donc de son côté la masse des
opportunistes, des imbéciles, des faibles et des lâches. Il inaugure le
drame permanent de la sélection à rebours à laquelle, depuis, aucun
régime de l'ère chrétienne n'a échappé. Le reproche fait à la
démocratie parlementaire ou présidentielle d'être un système qui
permet à la canaille de gouverner en manipulant contre les honnêtes
gens la force des imbéciles et des natures viles vaut en réalité pour
tous les régimes, hormis la culture avec tout ce qu'elle comporte
d'énergique vigilance populaire.
En 381 le concile de Byzance condamne une seconde fois
l'arianisme. L'édifice clérico-impérial semble prendre de la solidité.
Semble seulement, car une querelle qui va empoisonner huit siècles
d'histoire européenne et ne sera en fait jamais résolue commence à
montrer le bout de l'oreille : celle de la primauté du pape ou de
l'empereur. Nous avons vu que, selon la doctrine officielle de
Byzance, le basileus est le successeur du Christ sur terre. Saint
Augustin pose le problème ouvertement sur le plan politique : face
aux incursions des « barbares », qui est le plus capable de mobiliser
les forces de l'Empire ? Le pape ou l'empereur ? Il affirme sans
hésiter : le pape. Ce choix semble étrange et peu fondé sur le plan
politique et militaire. Il a été démenti par les événements : ce ne sera
pas un pape, mais l'empereur byzantin Justinien qui délivrera la
patrie de saint Augustin de la domination des Vandales et mettra
ainsi fin à leurs incursions dans Rome. Le théologien d'Hippone était
assez intelligent et informé pour prévoir cela. Qu'a-t-il donc voulu ?
Devant le déferlement des catastrophes, les Romains doutaient de
plus en plus de la puissance du Dieu des chrétiens et parlaient
ouvertement de la vengeance des dieux ancestraux trahis par la
christianisation. C'est cette remise en cause du christianisme que
redoutait le théologien, tout en camouflant ses préoccupations réelles
derrière des considérations politiques. Cela suppose qu'il était
réellement chrétien et l'on est en droit d'être sceptique sur ce point en
songeant aux circonstances de sa conversion. La paroisse d'Hippone
étant en grandes difficultés financières et la coutume exigeant que
tout homme embrassant la condition sacerdotale fasse don de ses
biens à sa paroisse, la foule enferma le futur saint, de riche famille,
dans l'église et ne le relâcha pas tant qu'il n'eut pas accepté
l'ordination. Mais, comme plus tard saint François d'Assise et le Père
de Foucaud, ce noceur fut peut-être un jour écoeuré du vide de son
existence et bascula dans l'ascétisme chrétien, comme semblent
l'indiquer ses « Confessions ».
Mais Augustin menait une controverse inutile : ni papes, ni
empereurs ne vont arrêter les « barbares ». Goths, Huns, Vandales,
Hérules, Lombards se succèdent sur la seule terre d'Italie, tandis que
la Gaule accueille bon gré, mal gré Wisigoths, Burgondes et Francs,
en attendant les Huns, les Arabes et les Normands.
En 476, le roi des Hérules, Odoacre, dépose officiellement
l'empereur, en attendant d'être lui-même non moins officiellement
déposé par Théodoric, roi des Goths et ami d'Attila. L'Europe a une
lourde dette de reconnaissance envers le « barbare » Théodoric :
c'est lui qui interdit la démolition des temples et monuments païens,
destruction hélas ! déjà avancée. C'est donc à lui que nous devons
de pouvoir admirer les vestiges grandioses de la civilisation romaine.
Pour parvenir à un minimum d'intelligence de l'histoire, il faut
faire ici justice du mythe romain sur les barbares. La Germania de
Tacite remet déjà en question tous les clichés sur les Germains. On
dit qu'il n'est pas allé lui-même en Germanie. L'archéologie, la
linguistique et la tradition ( elle existe et n'est pas spécifique du
christianisme ) confirment pourtant la remarquable précision de ses
renseignements. Mais le seul exemple d'Attila révélerait l'énormité du
mensonge historique né de l'optique romaine sur les événements et
les hommes, mensonge aggravé à travers les générations. L'océan
de calomnies déversé sur l'Allemagne vaincue depuis 1945 est tout à
fait comparable.
Rappelons ici qu'élevé à Rome en otage princier, Attila parlait
couramment le latin et le grec avec délectation, qu'il avait le titre et la
solde de général romain et intervenait comme tel dans les affaires de
l'Empire. Il avait pour ministre un spartiate qui lui resta
indéfectiblement fidèle, en dépit de toutes les tentatives de corruption
des romains. Un magistrat marseillais se joignit aux Huns et expliqua
dans sa lettre de démission qu'il préférait « vivre aux milieu des
barbares plutôt que continuer à commettre les exactions auxquelles
on le contraignait dans sa charge ». Une princesse impériale romaine
fut enfermée comme folle parce qu'elle faisait du scandale pour
exiger de l'empereur qu'il tienne sa promesse de la donner pour
épouse à Attila. En réalité Attila, qui fut suzerain au moins des trois
quarts de la noblesse européenne de son époque fut un grand
politique épris de justice et d'ordre. Il voulait créer un empire hunnogermanique
englobant toute l'Europe au nord du Danube et du Rhin,
le sud restant l'Empire romain. On ne saura jamais si ses desseins
réels se limitaient là ou s'il n'y voyait qu'une étape à la domination de
toute l'Europe, qui n'y aurait d'ailleurs rien perdu et ce serait épargné
les atrocités de la domination cléricale. Ce qui est absolument
certain, c'est qu'il n'était pas un barbare au sens que les Romains
donnaient à ce mot.
De tels exemples montrent quels incroyables édifices de
mensonges ont été fait par et pour la Rome catholique. Rien
d'étonnant à ce qu'elle fasse aujourd'hui chorus avec le lobby juif
dans les calomnies contre l'Allemagne hitlérienne dont elle redoutait
une résurgence européenne et païenne. La phrase angoissée du
pape Pie XI : « Spirituellement nous sommes tous des Sémites. »
révèle le ressort de la calomnie.
La France, fille ainée de l’église.
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Les Germains, non plus, n'étaient pas des barbares.
Armateurs, navigateurs et charpentiers hors pair, prodigieux
métallurgistes, serruriers et orfèvres, pratiquant la cémentation des
lames, sculpteurs sur bois restés insurpassés, ils étaient non
seulement des civilisés, mais, comme les Romains, des civilisés
confrontés à des problèmes de décadence.
Dans cette Europe inquiète et agitée comme une fourmilière
bouleversée, la Papauté va faire preuve d'un sens politique aux vues
lointaines et d'une continuité auxquels on ne peut refuser
l'admiration, même si on les considère comme sous-tendus par une
folie.
Après le règne glorieux de Justinien et de Théodora, après leur
campagne victorieuse contre les Vandales, Byzance retombe dans la
somnolence de son luxe et de sa relative sécurité. Rome par contre
va de tourmente en tourmente.
Après la bataille des Champs Catalauniques, en 451, les
Wisigoths sont plus que jamais écoeurés de la duplicité romaine.
Suppliés par l'émissaire d'Aetius, ils ont fini par se laisser entraîner
dans un ultime combat contre les Huns, combat qui sans eux aurait
été perdu pour les Romains. Ils ont délivré seuls Orléans assiégée et
repoussé les Huns jusqu'à Châlons-sur-Marne. Là, ils ont encore
supporté le plus lourd poids de la bataille, alors que trois cent mille
morts jonchent le terrain. Mais Aetius laisse traîtreusement échapper
les Huns encerclés afin de conserver un contrepoids à une puissance
wisigothe pourtant pacifique. Pleins d'amertume, les vainqueurs se
retirent dans leur Aquitaine.
Pour Rome, ces précieux alliés sont redevenus l'ennemi
numéro un, non pour des problèmes de territoire, mais parce qu'ils
représentent une forme de christianisme rivale du catholicisme :
l'arianisme. Or, comme le prouvera l'horrible histoire de la
colonisation un millénaire plus tard, Rome est animée d'un
impérialisme religieux totalitaire, d'une folie.
Les Burgondes sont entrés pacifiquement en Gaule, appelés à
cause de leurs talents de charpentiers. Ils sont d'humeur débonnaire,
appelant tout homme oncle et toute femme tante, habitude restée
courante en Allemagne dès que se noue la moindre familiarité. Ils
font excellent ménage avec les Gallo-Romains. Mais ce qui est
important pour Rome, c'est qu'ils ont accepté le catholicisme, religion
de leur pays d'adoption.
Les Francs sont païens, païens par définition, car ils ne sont
pas un peuple. Leur nom signifie « les Libres » et ils sont la partie
des tribus germaniques qui a refusé la loi romaine, même en
échange de bonnes terres à cultiver et de la protection de la limes. Ils
sont les plus intraitables parmi les envahisseurs germaniques.
Rome n'hésite pas : entre les Francs païens et les Goths
chrétiens dissidents, la curie romaine juge les seconds plus
dangereux. On ne peut s'empêcher de comparer cette attitude avec
celle des communistes moscoutaires envers les trotskistes, les
titistes et les maoïstes jusqu'à l'assouplissement imposé par les
troubles de 1968. L'évêque de Reims manigance donc le mariage de
Clovis avec Clotilde, fille du roi des Burgondes qui n'a pas d'héritier
mâle. Clovis va donc hériter du royaume Burgonde, bien plus vaste
que la Bourgogne actuelle. Il faudrait qu'il soit bien ingrat pour
résister aux prêches de sa douce Clotilde sur l'oreiller. Pourtant
Clovis ne se laisse pas circonvenir. Il va donc falloir lui faire savoir,
comme jadis à Constantin, où se trouve le Dieu des armées ... Les
Alamans attaquent et le réseau chrétien joue en leur faveur. Clovis se
sent perdu ; à Tolbiac ( la localité allemande de Zülpich ), il se
soumet, ce que l'Église mythise par la phrase : « Dieu de Clotilde, si
tu me donnes la victoire, je me ferai baptiser ! ». Il se fit baptiser en
effet, ainsi que plusieurs milliers de ses guerriers. Beaucoup se firent
même baptiser plusieurs fois et en pouffant de rire, car chaque fois
on leur faisait cadeau d'une robe blanche neuve. La série de crimes
monstrueux perpétrés par Clovis contre des membres de sa famille,
la séquelle de rivalités et de vengeances atroces des débuts de la
dynastie mérovingienne, la prompte décadence des rois fainéants
donnent l'impression que la christianisation avait agi comme un
dissolvant éthique et religieux plutôt que comme un facteur de
régénération et d'adoucissement des moeurs. À Rome on ne se fait
pas d'illusions sur la sincérité de telles conversions, mais on pense
que l'emprise qu'on ne possède pas sur les pères, on l'aura sur les
enfants.
Sûre de l'avenir, l'Église joue à fond la carte franque et lance Clovis
contre les Wisigoths. À la bataille de Vouillé, un agent catholique
indique aux Francs un gué sur la Sèvre qui leur permet de prendre
l'armée wisigothe à revers et de la battre. Cette fois, pourtant, Rome
et Clovis ont vu trop grand. Ne disposant pas d'une infrastructure
déjà en place pour leur faciliter la domination des populations, les
Francs ne réussiront pas à s'imposer en surface. En fait ni l'Église
catholique, ni les rois de France n'y réussiront jamais complètement
et, de nos jours encore, le régionalisme occitan ne fait que prendre la
relève des cathares et des huguenots. Ainsi prit naissance cet édifice
politique créé par Rome pour les besoins de Rome : la France, fille
aînée de l'Église.
À travers toute l'histoire, nous retrouverons le gendarme
français gardien des intérêts de Rome. Pépin le Bref rétablit le pape
dans ses états. Charlemagne intervient plusieurs fois contre les
Lombards pour défendre le pape. Les croisades partent de France,
prêchées par les religieux français Pierre l'Ermite et Bernard de
Clairvaux. Louis IX anéantit les cathares qui ne lui demandaient rien
et se trouvaient hors du territoire français. Son frère Charles d'Anjou
donne la victoire au pape dans la phase finale de la guerre des
guelfes et des gibelins. Dans le long conflit entre papes et
empereurs, les rois de France seront toujours aux côtés des papes,
sauf curieusement Louis IX ( Saint Louis ) qui donnera son amitié à
l'empereur excommunié Frédéric Il et dira en parlant du monstrueux
pape Innocent IV : « Je n'ai trouvé chez cet homme rien de chrétien.».
La tendance s'inverse partiellement avec Philippe le Bel.
Pendant la guerre de Cent Ans, Rome désespérera de la couronne
de France et s'alliera à celle d'Angleterre, jusqu'à ce que cette
gaffeuse de Jeanne d'Arc ne fasse changer la victoire de camp, ce
qui lui valut le sort que l'on sait. Le roi de France vainqueur contre
toute attente, on fera de la sorcière une sainte et la bonne vieille
alliance sera ressoudée.
La rivalité de la couronne de France et des Habsbourg
inaugure une période froide entre Rome et Paris et le grand
bouleversement de la Réforme brouille les cartes. Pourtant
l'assassinat du roi protestant Henri IV ne changera rien à la politique
française : la France du cardinal Richelieu combattra aux côtés des
princes protestants contre l'empire catholique, tout comme François
Ier avait fait alliance avec les Turcs musulmans contre Charles Quint.
La puissance de la royauté française divise le clergé en
gallicans, fidèles d'abord à la couronne, et en ultramontains,
inconditionnels du pape et dominés par les jésuites. Les assassinats
iront bon train, jusqu'au jour où la constitution civile du clergé et la
guillotine remettront d'accord papes et Bourbons, gallicans et
ultramontains. La France retrouve alors son rôle d'instrument de
Rome : sous la restauration, c'est l'armée française qui ira écraser la
Révolution espagnole ; et le Carbonaro Napoléon III lui-même
enverra les soldats français à Rome rétablir le pape dans ses états,
ce qui vaudra au traître un attentat monté par la Carbonara. Les
écoles catholiques de la troisième République enseignent l'histoire
sur le thème « la France, fille aînée de l'Église », tandis que le
royaliste athée Charles Maurras fait cyniquement du catholicisme
politique agressif envers les nations protestantes, Allemagne et
Suisse principalement, et ne se gêne pas pour parler de « ce
catholicisme romain qui nous a épargné de devenir chrétiens ».
...de par l’ordre de Melchisédech...
L'erreur réitérée par les rois germaniques fut de croire pouvoir
s'allier à la Papauté sans devenir ses vassaux. Ils pensaient s'en tirer
avec des concessions de surface et de feintes conversions. Ils ne
comprenaient pas que Rome connaissait parfaitement l'hypocrisie de
leur consentement et menait un jeu plus subtil qu'ils ne découvriraient
que trop tard. En échangeant l'éligibilité de leur dignité et le contrôle
du Thing contre le sacre qui les faisait monarques absolus de droit
divin et assurait la transmission de leur charge à leurs descendants,
ils faisaient un marché de dupes : par le sacre, et plus tard par
l'excommunication, c'est le pape qui détenait le pouvoir suprême. Le
saint chrême de l'onction royale contenait potentiellement Canossa.
Cette substitution de rois de droit divin à des rois de sang sacré, mais
éligibles, fut une déculturation grosse de toutes les révoltes
ultérieures, guillotines de la terreur incluses. Les rois germaniques se
sont lourdement trompés : ils se sont crus en présence d'une Église,
alors que celle-ci camouflait les aigles romaines tombées au service
d'une religion du désert.
Nous voilà bien loin de ces juifs et Araméens du premier siècle,
de ces apôtres partis à la conquête d'un empire. Le noyautage a
réussi, mais l'Église est devenue elle-même l'Empire romain, un
empire qui a renié les valeurs positives de la culture romaine, la
fierté, la tolérance, le respect de l'individu, les notions de liberté et de
citoyenneté, un empire chargé de l'intolérance des religions du désert
qu'il va retourner contre des fidèles de ces mêmes religions : juifs et
musulmans.
Latente ou aiguë, la querelle de primauté ne laisse pas de
repos aux papes. Théoriquement, ils veulent faire l'unité du monde
chrétien sous l'autorité temporelle des empereurs. Ils n'ont jamais eu
de serviteur plus fidèle que Charlemagne. Pourtant sa puissance les
inquiète. Apprenant son projet de mariage avec Irène, l'impératrice
de Byzance, le pape couronne par surprise Charlemagne empereur
d'Occident la nuit de Noël de l'an 800. Pris de court, le monarque
franc ne peut immédiatement comprendre ni déjouer la manoeuvre.
Mais il n'a plus de doute sur le but de celle-ci lorsque l'impératrice,
jalouse de son titre et ne voulant pas être la seconde, annule le
mariage projeté. Cette subtile politique pontificale montre que les
papes étaient condamnés à saper l'unité politique qu'ils prétendaient
vouloir réaliser. Ils ne pouvaient fonder leur suprématie que sur un
jeu de balance entre souverains rivaux. Le calcul du pape qui
couronne Charlemagne empereur pour empêcher la fusion des
empires d'Orient et d'Occident rejoint la forfaiture d'Aetius à Châlonssur-
Marne. Cette lutte contre tout pouvoir temporel fort est une
constante de la politique pontificale. Le Kulturkampf de Bismarck en
est une plus récente illustration, ainsi que cette pertinente remarque
de Clémenceau : « Quand l'État faiblit, les jésuites relèvent la tête. ».
La sourde lutte de l'Église contre Hitler, Franco, Péron procède du
même souci. Par contre, elle triomphe dans des états faibles parce
qu'impopulaires, comme le régime communiste polonais.
Pour pouvoir s'affirmer face à un pouvoir temporel fort, comme
le faisait le clergé d'Égypte, il faudrait que le christianisme soit une
culture, c'est-à-dire une symbiose des instincts, de la loi, des
croyances et des arts. Or il est contraire aux instincts des Européens
et socialement inapplicable, en dépit du basiléus byzantin,
successeur du Christ sur terre ( qui a dit « Mon royaume n'est pas de
ce monde. » ! ) et de la Cité de Dieu de saint Augustin.
On peut se demander aujourd'hui si cette perfidie envers le roi
des Francs était vraiment nécessaire. Charlemagne était bien moins
puissant qu'il voulait et prétendait l'être, bien moins surtout que ne l'a
fait sa légende. Pendant trente ans il mène contre trois peuplades
païennes un combat qui se terminera après lui par la complète
désagrégation de son empire. Quand il intervient en Saxe, Basques
et Lombards entrent en révolte ; quand il intervient en Lombardie,
Basques et Saxons entrent en révolte ; et quand il intervient contre
les Basques, Lombards et Saxons entrent en révolte. Son neveu
Roland, son maréchal Geilo perdirent la vie dans ces combats.
Le moment est venu d'expliquer une phase importante de
l'histoire européenne, une phase intimement liée à l'agression de la
théocratie judéo-romaine contre les peuples de la forêt et de la mer,
et montrant la profonde horreur de ces peuples envers la théocratie
et la monarchie absolue. Mais pour prendre toute sa valeur, cet
exposé de la naissance du mouvement viking, car c'est de lui qu'il
s'agit, doit être précédé de considérations de sociologie, les unes
générales, les autres particulières à l'Europe.
Une caractéristique commune à toutes les sociétés en état de
santé est l'accession de l'individu aux dignités et responsabilités de
l'âge adulte à travers des rites de passage. Derrière la douceur
habituelle due au bon fonctionnement de ses rouages, toute société
digne de ce nom a une infrastructure initiatique dont les phases sont
dures, cruelles même selon nos critères de civilisés dégénérés car
ces phases comportent la domination de vives souffrances, de
fatigues, de confrontations avec la mort incluant la possibilité de
celle-ci.
Pour les adolescents, le rite de passage le plus universel est le
meurtre du totem. Le totem est l'un des animaux les plus dangereux
de l'environnement : ours, loup, félin, serpent, aigle, crocodile.
Quiconque tue le totem intègre sa force et devient par là son fils.
L'épreuve peut être laissée à l'initiative du jeune homme ou
organisée par la société secrète guerrière des adultes. Le jeune
Cherokee n'osera pas regarder une jeune fille et ne pourrait le faire
sans susciter les moqueries indignées de sa tribu jusqu'au jour où il
paraîtra orné d'un collier fait des griffes d'un grizzli qu'il aura tué luimême
; alors il pourra s'approcher de celle qu'il convoite et sa
démarche sera admise par tous. Les Fils de la Louve étaient la
société secrète des guerriers romains qui initiaient les jeunes gens.
L'adolescent était abandonné nu en forêt et ne pouvait reparaître que
vêtu de la peau de loup qu'il avait tué à la dague ; à dater de ce jour,
il était Fils de la Louve et l'égal des autres guerriers. Les Wälfungen
étaient l'équivalent germanique des Fils de la Louve. Ce mot a été
déformé en Wälsungen à cause de la ressemblance du f et du s dans
l'écriture gothique ; mais c'est bien Wälf qu'il faut lire, mot que l'on
retrouve dans le Wolf allemand et anglais ; nous avons déjà vu que
ung ( pluriel ungen ) signifie en scandinave « jeune, enfant » et
correspond au Jung allemand, au young anglais. La chose est donc
sans ambiguïté et Wälfungen veut bien dire « Fils du Loup ». L'autre
secte totémique germanique était celle des Berserker, ( peaux d'ours
). La capture et le dressage du cheval constituaient également une
épreuve initiatique et, last but not least, il y avait l'Ordre marin
gouverné par les « rois de mer ». Les épreuves d'accession à cet
Ordre étaient extrêmement dures. La famille devait d'abord déclarer
devant le Thing ( assemblée populaire ) qu'elle renonçait à tous
dommages intérêts en cas de mort ou d'accident grave. Le candidat
devait ensuite défaire en combat singulier successivement douze non
marins. Puis on lui donnait une portée de javelot d'avance ; après
quoi on le poursuivait en cherchant à le tuer comme s'il avait été
réellement un ennemi. Il devait ensuite prêter serment de cinq ans de
chasteté avant d'être admis dans l'équipage d'un roi de mer dont
l'autorité se limitait à la conduite des bateaux et éventuellement des
combats.
Il faut ajouter que les populations européennes ont toujours
refusé le pouvoir personnel et l'arbitraire. Les chefs n'étaient que des
conducteurs. La crainte de l'utilisation du pouvoir à des fins
personnelles faisait que, dans des périodes critiques telles que
migrations et guerres, les Européens désignaient non pas un, mais
deux rois qui se surveillaient réciproquement. Cela explique les
mythes de Dioscures à la base de fondations de cités ou de
migrations : Castor et Pollux à Sparte, Rémus et Romulus à Rome,
Hengsti et Horsa dans la migration saxonne en Angleterre, Amber et
Asser dans la migration des Vandales à travers l'Europe et le
Maghreb, Raos et Raptos dans celle des Goths. Cela explique aussi
le principe parallèle du duumvirat dans l'administration romaine.
Nous sommes maintenant à même de comprendre la
naissance de l'Ordre viking. Presque tous les auteurs confondent les
Normands ( hommes du Nord ) et les vikings. Tous les vikings étaient
normands, mais tous les Normands n'étaient pas vikings. L'Ordre ne
compta probablement jamais plus de trois mille hommes à la fois.
L'ordre des Vikings, ( Hommes du Frêne ), par allusion à la vision
mystique du monde des Celtes et Germains exprimée dans le frêne
Yggdrasyll, naquit du génocide culturel perpétré par Charlemagne
contre les Saxons. Le duc de Westphalie, Weking, le Saxon le plus
acharné dans la résistance à la théocratie franco-romaine était le
gendre du roi du Danemark. Après sa mort, un de ses beaux-frères,
le Danois Eyric, résolut de le venger et d'arrêter l'expansion franque.
Il donna à ses marins et guerriers le nom du Saxon vaincu. En 810
les vikings ont traversé l'Allemagne par voie de terre et campent sur
le Rhin inférieur lorsque leur chef Gudröd est mystérieusement
assassiné par un agent de Charlemagne. Mais les bateaux de l'Ordre
remontent tous les fleuves de l'empire et paraissent même devant
Narbonne. Charlemagne meurt en 814 devant les perspectives de la
destruction commençante de son oeuvre.
Cette fameuse « fureur de l'homme du Nord » attestée par le
livre de prières anglais n'avait pas la rapine pour objet. Les vikings
étaient des êtres profondément religieux, des païens conscients qui
voulaient protéger leur culture du génocide, venger la destruction du
grand temple des pierres des étoiles d'angle ( Eckensternesteine
déformé Externsteine ) saccagé en 772 par Charlemagne d'une
manière qui ne laisse aucun doute sur le fanatisme religieux de
l'entreprise franque. Les Francs attaquèrent par surprise, au mépris
du code de l'honneur germanique qui exigeait que l'on prévienne du
lieu et du moment de l'attaque.
Ils agressèrent pendant la grande fête du solstice d'été le
temple le plus important qui n'était même pas défendu. Pendant trois
jours ils s'acharnèrent à sa destruction, allant jusqu'à creuser des
encoches dans la roche, à y engager des poutres de bois sec et à les
arroser jusqu'à ce que le gonflement du bois fasse éclater la voûte.
Par les capitulaires de Paderborn, en 777, Charlemagne ne se
contentait pas de rendre le baptême chrétien obligatoire sous peine
de mort, comme Théodose quatre siècles auparavant ; il interdisait
également sous peine de mort le rassemblement du Thing et la
consommation de viande de cheval. Pour éclairer ce dernier point, il
faut savoir ce qu'était le Met : la viande et la boisson de la rencontre,
de la communion, autrement dit la viande de cheval et l'hydromel.
Ceci explique en anglais la parenté de meeting et de meat ( viande ) ;
l'allemand mit et le scandinave med ( avec ) font partie de la même
famille de concepts.
Les vikings menaient donc une guerre religieuse et politique contre
une religion du désert et sa théocratie. Ils partaient en disant : « Nous
allons leur chanter la messe des lances » et attaquaient de
préférence églises et monastères. Mais ils tentaient aussi de réveiller
la conscience païenne des populations. En Irlande, un chef viking
voulut rendre un lieu de culte de saint à sa véritable destination, mais
il fut assassiné par des chrétiens. En Aquitaine un moine écrit : «
Combien il est douloureux de voir des populations depuis longtemps
chrétiennes faire bon accueil aux barbares et même aller jusqu'à
consommer avec eux l'abominable sacrifice de la viande de cheval.
». Il est vrai qu'en Aquitaine nous sommes en terre wisigothe et non
loin de ces Basques aussi irréductibles que les Saxons.
Tels étaient réellement les hommes que la propagande
catholique travestie en histoire nous a accoutumés à considérer
comme des brutes avides de pillage et de viol. Que des raids de
vikings accompagnés par des Normands non vikings aient parfois
dégénéré en entreprises de pillage, nul ne songe à le contester mais
la source de la brutalité, du viol des consciences est dans cette
théocratie carolingienne héritière de celle des Théodoses. Lors du
débarquement de Rollon à l'embouchure de la Seine, les vikings
affirmeront encore hautement leur éthique de guerriers libres face à
la religion et à la monarchie orientales : « Qui est votre Seigneur ?
Chez nous, chacun est Seigneur de lui-même ».
Le combat commencé contre Charlemagne sera poursuivi avec
la même rigueur contre les rois scandinaves traîtres à leur religion
ancestrale : Oluf de Danemark et Haakon de Norvège. Ces rois
mettront dans le viol chrétien, encore plus de férocité que les
Romains et les Francs. Le serpent, symbole mondial de la kundalini,
du tropisme universel, est un emblème important de la religion des
Normands. De nos jours encore chez les Germains du Danube, la
couleuvre est considérée comme un porte-bonheur ; pour attirer la
prospérité sur la ferme, on lui tient en permanence une écuelle de lait
devant la porte et la présence de l'homme ne dérange point le reptile.
Le serpent sera la figure favorite au sommet de la poitrine et du col
de cygne, proue des bateaux vikings. Alors que les bateaux
ordinaires portent le nom de karfars ( véhicules pour aller loin ), ceux
des vikings s'appellent drakkars ( dragons ), ou sjö-snäkkars (
serpents de mer ),mot devenu sea-snake en anglais et See-Schlange
en allemand. En choisissant le sigle SS pour les porteurs de leur
révolution culturelle, les nationaux-socialistes allemands jouaient
donc sur un élément important de l'inconscient collectif de tous les
peuples germaniques.
Les rois normands favorables par ambition personnelle à la
théocratie du désert connaissent l'importance religieuse du serpent
de mer, serpent d'Ève dans l'élément de Vénus. Pour contraindre les
hommes de haute conscience religieuse à accepter le baptême
chrétien, rite vénérien qui recouvre maintenant son contraire sur le
plan socio-politique, ces rois traîtres inventent un supplice incroyable,
un tube dans le gosier du patient, un serpent dans le tube, un fer
rouge pour brûler la queue du reptile et le faire descendre dans le
gosier du malheureux. L'expression populaire « avaler une couleuvre
» dans le sens « croire un mensonge énorme » vient de cette horrible
méthode de christianisation des Normands. Le christianisme était
pour les fidèles de la religion ancestrale un mensonge énorme. Il
l'était en effet si l'on songe que le fatras chrétien ayant été jugé
irrecevable par les missionnaires pour les pays germaniques, ces
missionnaires n'hésitèrent pas à présenter leur Christ comme un chef
de guerre irrésistible qui avait conquis un immense pays avec le seul
appui de douze compagnons.
Les persécutés se réfugièrent d'abord en Islande où les furieux
de l'esprit du désert vinrent les traquer et obtenir par prises d'otages
l'abandon des divinités traditionnelles. Au début de notre millénaire,
certains « païens » passèrent en Amérique, ce qui ne découragea
pas les fous furieux : au XIe siècle, l'évêque de Reykjavik écrivit à
celui de Londres pour lui demander des missionnaires pour le
Groenland.
Les colonies normandes du Nouveau Monde comptaient des
centaines de familles et entretenaient des rapports réguliers avec
leurs pays d'origine. Or elles disparurent brusquement au XIVe
siècle. Ce qui est étrange, et même suspect, c'est que depuis cette
époque l'Église catholique et toute l'information qui dépend d'elle,
c'est-à-dire la quasi totalité de l'information historique, ont mis un
acharnement incroyable à nier d'abord, à minimiser ensuite, la
pénétration normande sur le nouveau continent. Dans les écoles
publiques, qui se croient libérées de l'influence cléricale, on continue
à enseigner la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb.
L'Église ne cesse de surveiller de près la recherche archéologique
dans ce domaine, comme si elle redoutait la mise à jour de faits
dangereux pour elle. À l'annonce des résultats positifs des fouilles de
Terre-Neuve, le premier visiteur fut un évêque qui débarqua deux
heures plus tard par avion !
Qu'on ne nous accuse pas à la légère de hantise et de fanatisme !
Nous avons exposé quelles valeurs équilibrantes le christianisme
apportait aux maladies spécifiques du Nord. On pourrait donc
s'étonner de la résistance acharnée opposée à une religion qui
apportait dans un domaine précis un équilibre au moins
inconsciemment désiré. Cette remarque vaut tout autant pour les
peuples du désert qui l'ont refusé en s'accrochant à leur illusion de
puissance par la domination sociale sur la femme.
Si le christianisme était resté la religion de Vénus qu'il était
destiné à devenir, s'il avait opposé au Nord, Vénus à la femme-soleil
et aux duretés qu'elle conditionne, comme il tentait de l'opposer à la
femme-esclave des peuples du désert, il est bien probable qu'il aurait
été accepté, mais c'est la religion paulinienne et impérialiste qu'on
prétendait imposer aux Normands qui, après la guerre de Saxe et les
capitulaires de Paderborn ne pouvaient plus avoir d'illusions sur la
nature et les intentions de cette religion « fraternelle ».
Tout ce déchaînement de brutalité n'a même pas l'excuse du
succès politique. L'empire de Charlemagne ne sera pas capable de
résister aux assauts des vikings. Les descendants de ce colosse
trapu plus rusé qu'intelligent. vont d'abord se déchirer entre eux, puis
sombrer dans la débilité mentale. La France aura alors à sa tête
Charles le Simple et l'Allemagne, Louis le Puéril.
En empêchant l'union du royaume franc et de Byzance, Rome
a voulu maintenir la division pour régner. Mais le rusé pape n'a-t-il
pas du même coup sauvé le monde nordique en empêchant une
concentration de puissances qui auraient réussi à le détruire ? « Je
suis cette force qui toujours veut le mal et toujours fait le bien. » fait
dire Goethe au Diable ; et le Diable porte parfois la tiare, comme le
pensaient les cathares ...
Rien ne va plus pour Rome en ce début de dixième siècle.
L'islam a conquis toute l'Afrique du Nord, tout le Proche et le Moyen-
Orient, Byzance exceptée. Il possède des positions fortes en
Espagne et en Occitanie. Les Normands dominent le nord de la
France, font des incursions en Italie, s'emparent de la Sicile où ils
font régner la tolérance et la liberté, traversent la Russie et vont
même attaquer Byzance.
En Allemagne, deux évêques brutaux et sans scrupules
assurent la régence du temps de Louis le Puéril. Mais ils ne font pas
ce qu'ils veulent. L'un d'eux, Hatton de Mayence, sera massacré
dans la tour de Bingen, lors d'une émeute provoquée par une famine,
mais dirigée par des émissaires du duc de Saxe, Henri l'Oiseleur (
toujours les Saxons ! ). Cet exemple dangereux ne pouvant être
raconté qu'à mots couverts, il donna naissance à la légende des rats
qui auraient dévoré le tyran. Après le règne du faible Conrad 1er de
Germanie et le refus inattendu de son frère Eberhard de lui succéder,
ce fut Henri l'Oiseleur, ennemi juré de l'Église, qui fut élu roi de
Germanie par la diète de Francfort. Le pape tenta le jeu habituel et
offrit au roi la couronne impériale que celui-ci eut la sagesse de
refuser. Malheureusement son fils Otton sera plus ambitieux et
acceptera le cadeau empoisonné. Il sera couronné empereur en 962.
Plus fort que la Papauté, il entreprendra une expédition contre la
célèbre papesse Jeanne, qui se faisait appeler Jean pour les besoins
de la fonction, mais accoucha pendant la procession du Saint-
Sacrement, trop secouée qu'elle avait été par les balancements de
sa mule. Cet accident donna naissance au rite de la marche sur le
miroir lors de l'élection pontificale, rite évoqué par Rabelais.
Les successeurs d'Otton seront moins heureux que lui. Alliés
aux souverains jaloux de l'empereur, les papes sortiront vainqueurs
de l'épreuve de force qui, pendant un millénaire, a opposé plus ou
moins ouvertement la tête religieuse à la tête temporelle de la
chrétienté occidentale. En 1077, Henri IV devra aller s'humilier à
Canossa. Les Hohenstaufen reprendront la lutte avec une fortune
changeante. Barberousse passera sa vie en conflits contre la
Papauté et les villes lombardes. L'hostilité de ces villes, alors que les
lombards étaient traditionnellement ennemis des papes, mérite une
explication. Les empereurs ne représentaient pas davantage que les
papes une défense du Nord contre la théocratie du désert car chacun
des deux rivaux se considérait comme une tête de droit divin.
L'empereur était bien élu par la diète de Francfort, mais le pape l'était
par le collège des cardinaux. La signification culturelle du conflit,
dans la faible mesure où il en avait une, ne dépendait que de la
personnalité des antagonistes.
Un empereur mérite ici une mention spéciale : Frédéric II, petitfils
de Barberousse et fils de la reine Constance de Sicile. Voltairien
six siècles avant Voltaire, il est l'une des plus hautes figures de
l'histoire européenne. On lui doit l'introduction des chiffres berbères,
bien plus pratiques que les romains. Il affranchit tous les serfs de ses
domaines personnels et invita tous les nobles de son empire à imiter
son exemple. Il mit fin aux croisades malgré le pape, préférant
discuter de mathématique et d'astronomie avec ses amis arabes
plutôt que verser stupidement le sang au service d'une Église qui
était leur ennemie commune. Il autorisa la dissection des cadavres
malgré l'interdit pontifical et créa un parc zoologique, vrai musée
d'histoire naturelle. Il circulait alors un pamphlet incendiaire intitulé «
Les trois imposteurs » ( Moïse, le Christ et Mohammed ) et la
tradition veut que Frédéric II en ait été l'auteur. À Rome on ne
décolère pas et les excommunications pleuvent, sans succès cette
fois, tant est grand le prestige de l'empereur philosophe.
En 1250 son petit-fils Conradin lui succède. Il n'a que 15 ans.
Avec la fougue imprudente de la jeunesse, il veut de suite porter le
coup décisif aux troupes papistes extrêmement affaiblies. Mais il se
fait faire bêtement prisonnier avec son allié, le roi wisigoth Ferdinand
d'Aragon. Tous deux seront bientôt décapités. Mais le pape Innocent
IV ne s'en tient pas là : il veut l'anéantissement total de la famille des
Hohenstaufen. C'est alors qu'il fait saisir un enfant de trois ans,
arrière petit-fils de l'empereur maudit, lui fait crever les yeux et le
laisse agoniser onze mois dans un cul de basse-fosse. Arrêtée en
même temps, une soeur du malheureux sera relâchée une dizaine
d'années plus tard, âgée de 16 ans et incurablement folle. l'Histoire
de l'Église d'Arquillière, encore en usage dans les séminaires, exalte
ce triomphe de la Papauté, sans oser tout de même préciser les
horreurs perpétrées sur des enfants en bas âge. Les séminaristes
sont jeunes et ont encore une sensibilité et une conscience ...
Au moment de ces crimes, il y a trente ans que les cathares ont
été exterminés dans une croisade.
Rien de changé depuis Clovis et Charlemagne : contre les
cathares comme contre le dernier des Hohenstaufen, c'est toujours la
puissance franque qui est l'instrument de la Papauté. La France
n'est-elle pas fille aînée de l'Église ? N'a-t-elle pas été créée au VIe
siècle pour jouer le rôle qu'on lui fait maintenant jouer ?
Vainqueurs, les papes perdent toute retenue. Au concile de
Lyon, Innocent IV ( infaillible ) proclame ex-cathedra : « Les papes
sont souverains spirituels et temporels de la Terre entière, et ceci dès
avant la venue du Christ, de par l'Ordre de Melchisédech. ». Voilà qui
a le mérite d'être clair et pose l'Église pour ce qu'elle est : une
puissance politique totalitaire à vocation d'impérialisme mondial.
Pourtant la victoire de cette Église était bien moins décisive que
ne le pensait son pape monstrueux dans son orgueil paranoïaque. À
la mort de Conradin succède non la domination politique d'un
monstre inapte à l'exercer, mais le grand interrègne, période
d'anarchie de vingt-six ans au cours de laquelle les chevaliers
brigands terrorisent tout l'Empire. C'est alors que, ne sachant à quel
saint se vouer, un évêque de Westphalie a l'idée de ressusciter ce
Thing antique interdit sous peine de mort par Charlemagne. Le
nouveau Thing prend le nom de Sainte-Vehme et devient le germe
de l'une de ces nombreuses sociétés secrètes qui ont joué un rôle
non négligeable dans l'histoire européenne. Mais la Sainte-Vehme ne
sera pas la seule résurgence de l'Antiquité.
Née en 1241 à des fins commerciales, la Hanse des ports du
nord comprend qu'elle ne doit compter que sur elle-même pour
assurer la sécurité des routes et des mers. Elle crée donc une flotte
et une armée qui vont échapper complètement aux théocraties
rivales des papes et des empereurs. La Hanse sera l'alliée des
Baltes et des Slaves dans la lutte contre les chevaliers Teutoniques,
Ordre devenu papiste et persécuteur depuis la défaite des
Hohenstaufen. À Tannenberg, les troupes de la Hanse joueront un
rôle décisif dans l'écrasement de ces nouveaux chevaliers brigands.
Rien d'étonnant à ce choix politique lorsqu'on connaît la signification
du mot Hanse : il désignait des groupes de familles ou de tribus
associées pour organiser à frais communs des sacrifices sinon trop
lourds. Sous peine d'être blasphématoire et de porter ainsi malheur,
le sacrifice devait être joyeux, donc sans les réticences dues à
l'insuffisance des moyens. Le choix du nom de Hanse par la ligue
maritime des ports du nord est donc révélateur d'une tradition
occultée devant la persécution, mais non éteinte.
En ce même siècle, les villes s'affranchissent de la tutelle
féodale et l'on voit apparaître de partout les noms de Villefranche et
Francheville, de Freiburg et Freistadt. La théocratie judéo-romaine et
sa réplique à l'échelon féodal n'auront donc été qu'une tentative
avortée, une maladie qui n'a pas fini de nous empoisonner en
plongeant nos échelles de valeur dans la plus extrême confusion.
L'affrontement entre ceux qui fêtent le bicentenaire et les anti-89 est
une conséquence, entre bien d'autres, de cette confusion.
Il est indéniable que l'absolutisme royal n'a jamais été accepté
par la noblesse et la domination seigneuriale aussi peu acceptée par
le peuple. À Saint-Clair-sur-Epte, lorsque Charles le Simple demande
à Rollon de se plier au rite oriental du baisepied pour sceller sa
vassalité, ce dernier refuse et prie un guerrier de sa suite de le faire à
sa place. Celui-ci feint d'accepter, mais au lieu de se baisser, lève le
pied du roi qui tombe à la renverse dans l'hilarité générale. En 987
Hugues Capet est élu roi de France et, lorsqu'il demande à un noble
de sa suite : « Qui t'a fait comte ? », l'autre lui répond : « Qui t'a fait
roi ? » En Espagne, le roi se découvre le premier lorsqu'il rencontre
un grand du royaume, et les nobles lui prêtent serment selon la
formule : « Je te servirai selon l'honneur, mais n'oublie jamais que je
suis ton égal. ». Les chevaliers de la Table Ronde étaient bien un
Ordre mystique ; mais la table ronde a aussi une signification
politique, n'ayant ni haut bord, ni bas bord, elle est le symbole de
l'égalité de ceux qui s'assoient autour d'elle.
La brève période d'absolutisme sous Louis XIV sera précédée
des révoltes de la Fronde. Après l'échec des frondeurs, les nobles les
plus fiers se retireront sur leurs terres et le roi ne pourra se constituer
une cour qu'en attirant à Versailles les nobles endettés mis à l'abri
des poursuites dans cette paroisse par un édit royal. Comment ne
pas penser à la phrase de Nietzsche : « Souvent c'est la boue qui est
assise sur le trône, et souvent aussi le trône lui-même repose sur la
boue. ».
Une sourde révolte contre la féodalité bouillonne sur toute
l'Europe. En Angleterre, les hommes de Sherwood ne représentent
pas seulement la résistance des Saxons contre les Normands, mais
aussi celle du peuple contre les nobles. En Allemagne, les musiciens
de Brême évoquent la lutte du tiers état contre les chevaliers
brigands : le chat est l'animal du bourgeois des villes, l'âne celui du
meunier, le chien celui du berger, le coq celui du paysan. Les petits
nains qui viennent de nuit travailler dans les champs et se sauvent si
on les épie sont en réalité des maquisards qui protègent les paysans
contre les exactions seigneuriales. Et pour calmer la curiosité
dangereuse des enfants étonnés de trouver un travail fait à leur réveil
alors qu'il ne l'était pas le soir précédent, les parents racontent
l'histoire des gentils nains timides qui se sauvent et ne reviennent
pas si on les épie. Leurs obligés les nourrissent clandestinement et la
coutume du ramassage des oeufs par les conscrits pendant les nuits
de la semaine avant Pâques est une survivance de l'impôt jadis
prélevé par les organisations clandestines de défense paysanne. En
Russie, les cosaques ( hors-la-loi ) finissent par constituer une force
à laquelle le sultan de Turquie fera des avances, sur laquelle misera
le révolutionnaire Bakounine et avec laquelle finalement le tsar
pactisera. Malgré une cascade d'interdictions, le compagnonnage
assurera son triple rôle d'école, de mutuelle et de syndicat ; il
traversera tous les régimes et reprend de l'importance de nos jours.
Appuyés sur une bourgeoisie dont le pouvoir monte
parallèlement au déclin d'une noblesse ruinée par les croisades, mais
aussi par ses propres folies, les rois de France succèdent aux
empereurs dans les conflits avec la Papauté. Les Habsbourg ont
accédé au trône impérial. En échange de la nécessité de leur
légitimation par le sacre, ils ont obtenu un droit de veto sur l'élection
pontificale qui est une épine dans l'oeil du pape. Ils ont beaucoup
d'ambition, mais peu de pouvoir. La Suisse se détache de l'Empire.
Les villes lombardes se moquent autant de l'empereur que du pape.
L'Ordre chevaleresque du Temple est la plus grande puissance
économiques. Les grands rivaux des papes restent pourtant les rois
de France. Philippe le Bel notamment ne se laisse pas manoeuvrer
.En 1313, à Agnani, son émissaire Nogaret arrête le pape et même le
gifle.
La victoire sur les Hohenstaufen n'aura donc rien résolu et
l'Ordre de Melchisédech appliqué à la papauté n'aura été qu'un rêve
de faussaires mégalomanes, paranoïaques et monstrueux ; rêve
néanmoins destructeur de la meilleure sève de la culture
européenne.
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