La Société industrielle et son avenir.
de Theodore Kaczynski.
décembre 2002.
(créé en septembre 1995)
(version complète)
Traduit de l'anglais américain par Jean-Charles Vidal. Le texte original anglais est présent sur ce site, et des liens
sont établis, paragraphe par paragraphe, entre les deux versions.
TABLE DES MATIÈRES
Introduction
Psychologie de la gauche moderne
Le sentiment d'infériorité
La sur-socialisation
Le processus de pouvoir
Les activités compensatrices
L'autonomie
Les sources des problèmes sociaux
L'effondrement du processus de pouvoir dans la société moderne
Comment certains s'adaptent
Les motivations des scientifiques
Nature de la liberté
Quelques principes d'histoire
La société techno-industrielle ne peut pas être réformée
La limitation de la liberté est inévitable dans une société industrielle
Les « bons » côtés de la technologie ne peuvent pas être séparés des « mauvais »
La technologie est une force sociale plus forte que le désir de liberté
Les problèmes sociaux les plus simples se sont révélés insolubles
La révolution est plus facile que la réforme
Le contrôle du comportement humain
La race humaine à un carrefour
La souffrance de l'homme
L'avenir
Stratégie
Deux types de technologie
Le danger du « gauchisme »
Note finale
Notes
INTRODUCTION
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1. La révolution industrielle et ses conséquences ont été un désastre pour la race humaine. Elle a accru la durée
de vie dans les pays « avancés », mais a déstabilisé la société, a rendu la vie aliénante, a soumis les êtres humains
a des humiliations, a permis l'extension de la souffrance mentale (et de la souffrance physique dans les pays du
Tiers-Monde) et a infligé des dommages terribles à la biosphère. Le développement constant de la Technologie
ne fera qu'aggraver la situation. Ce qu'auront à subir les hommes et la biosphère sera de pire en pire ; le chaos
social et les souffrances mentales s'accroîtront, et il est possible qu'il en aille de même pour les souffrances
physiques, y compris dans les pays « avancés ».
2. Le système techno-industriel peut survivre ou s'effondrer. S'il survit, il PEUT éventuellement parvenir à
assurer un faible niveau de souffrances mentales et physiques, mais seulement après être passé par une
longue et douloureuse période d'ajustements, et après avoir réduit les êtres humains et toutes les créatures vivantes à de
simples rouages, des produits calibrés de la machine sociale.
En outre, si le système perdure, les conséquences sont inéluctables : Il n'y a aucun moyen de reformer ou
modifier le système de façon à l'empêcher de dépouiller les hommes de leur dignité et de leur autonomie.
3. Si le système s'effondre, les conséquences seront dramatiques. Mais plus le système se développera, plus
désastreux seront les effets de sa destruction, et donc il vaut mieux qu'il s'effondre au plus vite.
4. Par conséquent, nous préconisons une révolution contre le système industriel. Cette révolution peut user de
violence ou pas ; elle peut-être brève et radicale ou s'étaler sur plusieurs décades en tant que processus graduel.
Nous ne pouvons le prédire. Mais nous pouvons présenter de manière générale les mesures que ceux qui haïssent
la société industrielle devront prendre pour s'engager sur le chemin de la révolution contre cette forme de société.
Il ne s'agit pas d'une révolution POLITIQUE. Son objectif n'est pas de se débarrasser des gouvernements, mais
de la base techno-économique de la société actuelle.
5. Dans ce qui va suivre, nous porterons notre attention sur certains aspects négatifs générés par le système
techno-industriel. Certains autres aspects ne seront que brièvement abordés, voire ignorés. Cela ne signifie pas
que ces autres aspects ne soient pas importants. Pour des raisons pratiques, nous avons restreint nos propos à des
domaines qui ne sont pas bien connus du grand public ou pour lesquels nous présentons du neuf. Par exemple,
bien que les mouvements écologistes soient bien implantés, nous avons peu écrit à propos de la dégradation de
l'environnement et de la destruction de la biosphère, même si nous considérons cela comme de la plus haute
importance.
PSYCHOLOGIE DE LA GAUCHE MODERNE
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6. Pratiquement tout le monde s'accorde à reconnaître que nous vivons dans un monde chaotique. Une des
manifestations les plus répandues de la folie de notre monde en est le « gauchisme » [leftism] ; une discussion
sur le « gauchisme » peut servir d'introduction à une discussion des problèmes de la société moderne en général.
7. Mais qu'est ce que le « gauchisme » ? Durant la première moitié du 20e siècle, le « gauchisme » pouvait grosso
modo être identifié au socialisme. Aujourd'hui le mouvement est plus diffus, et il est plus difficile de discerner ce
qu'est un « gauchiste ». Quand nous parlons de « gauchistes » dans ce texte, nous pensons principalement aux
socialistes, collectivistes, adeptes du « politiquement correct », féministes, homosexuels, défenseurs des droits
des animaux et ainsi de suite. Mais tous ceux qui sont affiliés à ces mouvements ne sont pas nécessairement des
« gauchistes ». Nous allons essayer de montrer que le « gauchisme » n'est pas tant un mouvement ou une
idéologie que la manifestation d'un type psychologique, ou plutôt de différents types. Ainsi, ce que nous
appelons « gauchisme » apparaîtra plus clairement au cours de notre exposé sur la psychologie « gauchiste »
(voir aussi paragraphes 227-230).
8. Même ainsi, notre conception du « gauchisme » apparaîtra bien moins claire que nous ne l'aurions souhaité,
mais il ne semble pas qu'il puisse en être autrement. Tout ce que nous allons tenter de faire sera d'exposer en gros
et approximativement les deux tendances psychologiques que nous croyons être les lignes de force principales du
« gauchisme » moderne. Nous n'avons pas la prétention d'expliquer tout ce qui fait la psychologie « gauchiste ».
Ainsi nous nous limiterons seulement au « gauchisme » moderne. Nous laisserons de côté ce qui pourrait
s'appliquer aux « gauchistes » du 19e et du début du 20e siècle.
9. Les deux tendances psychologiques qui sous tendent le « gauchisme » moderne sont le « sentiment
d'infériorité » et la « sur-socialisation ». Le « sentiment d'infériorité » s'applique au « gauchisme » moderne dans
son ensemble, tandis que la « sur-socialisation » se s'applique qu'à une partie du « gauchisme » moderne, mais
cette partie est la plus influente.
LE SENTIMENT D'INFÉRIORITÉ
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10. Par « sentiment d'infériorité » nous ne pensons pas seulement au sentiment d'infériorité dans le sens strict du
terme, mais à tout un faisceau de traits apparentés : faible estime de soi, sentiment de faiblesse, tendances
dépressives, défaitisme, culpabilité, haine de soi, etc. Nous prétendons que les « gauchistes » modernes sont
habités par ces sentiments (plus ou moins marqués) et que ces sentiments sont fondamentaux pour la
détermination du « gauchisme » moderne.
11. Quand quelqu'un prend comme une offense personnelle pratiquement tout ce qui peut être dit à propos de lui
(ou des groupes auxquels il s'identifie), nous en concluons qu'il souffre d'un sentiment d'infériorité ou d'une
faible estime de soi. Cette tendance est prononcée chez les défenseurs des droits des minorités, qu'ils
appartiennent ou non aux dites minorités. Ils sont hypersensibles quant aux mots utilisés pour désigner ces
minorités. Les termes « noir », « jaune », « handicapé » ou « nana » pour un africain, un asiatique, une personne
souffrant de troubles invalidants, ou une femme n'ont pas à l'origine une connotation péjorative. « Gonzesse » et
« nana » sont simplement les équivalents féminins de « mec », « type » ou « gars ». Les connotations péjoratives
ont été attachées à ces termes par les activistes eux-mêmes. Certains défenseurs des animaux vont jusqu'à rejeter
le vocable de pet [animal de compagnie ; pas d'équivalent français] pour celui d'« animal de compagnie ». Les
anthropologues « gauchistes » font de grands efforts pour essayer de dissimuler ce qui pourrait être interprété
comme négatif chez les peuplades primitives. Ils voudraient remplacer le terme « primitif » par « nonliterate »
[qui ne sont pas parvenus au stade de l'écriture]. On arrive à une attitude paranoïaque envers tout ce qui pourrait
suggérer qu'une culture primitive puisse être inférieure à la notre (nous ne voulons pas dire que les cultures
primitives SONT inférieures à la notre ; nous voulons simplement montrer l'hypersensibilité des anthropologues
« gauchistes »).
12. Ceux qui sont le plus sensible au « politiquement correct » ne sont pas des habitants des ghettos noirs, ni des
immigrants asiatiques, des femmes battues ou des handicapés, mais une minorité d'activistes, la plupart d'entre
eux ne venant d'aucun des groupes « opprimés », mais bien plutôt des couches privilégiées de la société. La
forteresse du « politiquement correct » abrite essentiellement des professeurs d'université, qui ont la sécurité de
l'emploi avec de confortables salaires, et la majorité d'entre eux sont des blancs hétérosexuels de la classe
moyenne.
13. Beaucoup de « gauchistes » s'identifient avec les groupes qui ont une image d'êtres faibles (femmes), de
vaincus (Amérindiens), de victimes d'ostracisme (homosexuels) ou de toute forme d'infériorité en général. Les
« gauchistes » ont eux-mêmes le sentiment que ces groupes sont inférieurs. Ils ne se l'admettront jamais, mais
c'est précisément parce qu'ils ressentent ces groupes comme inférieurs qu'ils s'identifient à leurs problèmes
(Nous ne voulons pas dire que les femmes, les indiens, etc., SONT inférieurs ; nous élucidons la psychologie
« gauchiste » quant à ce point).
14. Les féministes sont obsédées par l'idée de prouver que les femmes sont aussi fortes et aussi capables que les
hommes. Il est évident qu'elles sont angoissées par le fait qu'une femme puisse ne PAS être aussi forte et aussi
capable qu'un homme.
15. Les « gauchistes » ont tendance à haïr tous ceux qui donnent une image de personnes fortes, bonnes et qui
réussissent. Ils haïssent les USA, la civilisation occidentale, ils haïssent les hommes blancs, ils haïssent le
rationalisme. Les raisons qu'invoquent les « gauchistes » pour haïr l'Occident, etc., ne correspondent évidemment
pas avec leur motivations réelles. Ils DISENT qu'ils haïssent l'Occident car il est belligène, impérialiste, sexiste,
ethnocentrique, et ainsi de suite, mais lorsque ces même tares apparaissent dans les pays socialistes ou dans les
cultures primitives, les « gauchistes » leur trouvent des excuses, ou au mieux admettent A CONTRE COEUR
qu'elles existent ; alors qu'ils soulignent AVEC ENTHOUSIASME ces mêmes tares dans la civilisation
occidentale. Ainsi, il est clair que ces tares ne sont pas le motif réel des « gauchistes » pour haïr les USA et
l'Occident. Ils haïssent les USA et l'Occident parce qu'ils sont forts et puissants.
16. Des termes tels que « confiance en soi », « initiative », « entreprise », « optimisme », etc., jouent peu de rôle
dans le vocabulaire libéral et « gauchiste ». Le « gauchiste » est anti-individualiste, pro-collectiviste. Il veut que
la société règle les problèmes de tout un chacun et prenne soin de lui. Il n'a a pas l'esprit d'une personne ayant
une profonde confiance en elle-même, dans sa capacité à résoudre ses problèmes et à satisfaire ses besoins. Le
« gauchiste » est opposé au concept de compétition car au fond de lui, il a une mentalité de perdant.
17. Les formes d'art qui séduisent les intellectuels « gauchistes » modernes se polarisent sur le sordide, l'échec et
le désespoir, ou bien se complaisent dans un mode orgiaque, rejetant le rationalisme comme s'il n'y avait aucun
espoir d'accomplir quelque chose grâce à la pensée rationnelle, et que tout ce qui restait était de se plonger dans
les sensations du moment.
18. Les philosophes « gauchistes » modernes ont tendance à repousser raison, science, réalité objective et à
préférer le relativisme culturel. Il est vrai que l'on peut se poser de sérieuses questions sur les fondements du
savoir scientifique, et comment, finalement, le concept de réalité objective peut être défini. Mais il est évident
que les philosophes « gauchistes » modernes ne sont pas simplement de froids logiciens analysant
systématiquement les fondements du savoir. Ils sont profondément impliqués au niveau émotionnel dans leur
attaques contre la vérité et la réalité. Ils attaquent ces concepts en fonction de leurs besoins psychologiques.
D'une part leur attaque canalise leur hostilité, et, pour autant qu'elle soit accomplie avec succès, elle satisfait le
besoin de pouvoir. Plus important, les « gauchistes » haïssent les sciences et le rationalisme car ces derniers
classifient certaines attitudes mentales comme bonnes (c.-à-d. : le succès, la supériorité) et d'autres comme
mauvaises (c.-à-d. : l'échec, l'infériorité). Le sentiment d'infériorité du « gauchiste » est tel qu'il ne peut supporter
cette classification entre supérieur et inférieur. Ceci sous-tend le rejet de nombreux « gauchistes » du concept de
maladie mentale et de l'utilité des tests QI. Les « gauchistes » sont opposés aux thèses génétiques sur les
capacités et comportements humains du fait que ces théories font apparaître certaines personnes comme
supérieures et d'autres comme inférieures. Les « gauchistes » préfèrent laisser la responsabilité à la société de la
capacité ou de l'incapacité d'un individu. Ainsi, si une personne est « inférieure », ce n'est pas de sa faute, mais
celle de la société qui ne lui a pas permis de se réaliser.
19. Typiquement, le « gauchiste » n'est pas le genre de personne dont le sentiment d'infériorité fera de lui un
vantard, un égotiste, une brute, un mégalomane ou un compétiteur impitoyable. Ce genre de personnes n'ont pas
tout à fait perdu confiance en elles-mêmes. Elles estiment mal leur propre valeur et leur pouvoir, mais ont encore
la capacité de se concevoir comme fortes, et leurs efforts pour arriver à ce résultat explique leur comportement
déplaisant.1 Mais le « gauchiste » est bien au delà de tout cela. Son sentiment d'infériorité est tel qu'il lui est
impossible de s'imaginer comme quelqu'un de fort et de valable. Ce qui explique le collectivisme du
« gauchiste ». Il ne peut se sentir fort que comme membre d'une grande organisation ou d'un mouvement de
masse avec lequel il puisse s'identifier.
20. Remarquons les tendances masochistes des tactiques « gauchistes ». Les « gauchistes » protestent en
s'allongeant devant des véhicules, ils provoquent intentionnellement la police ou les racistes pour qu'ils les
agressent, etc. Ces tactiques peuvent parfois obtenir des résultats, mais beaucoup de « gauchistes » ne les
utilisent pas comme des moyens correspondant à une fin, mais parce qu'ils PRÉFÈRENT les tactiques
masochistes. La haine de soi est une caractéristique « gauchiste ».
21. Les « gauchistes » peuvent bien clamer que leur activisme est motivé par la compassion ou un principe moral
(et le principe moral ne joue aucun rôle pour les « gauchistes » du type « sur-socialisés »). Mais la compassion et
la morale ne peuvent être les motivations principales de l'activisme « gauchiste ». L'hostilité est une composante
bien trop importante de la mentalité « gauchiste » ; c'est en fait elle qui mène la barque. De surcroît, le
comportement de beaucoup de « gauchistes » n'est pas rationnel quand il s'agit d'agir de façon bénéfique envers
les personnes auxquelles ils disent venir en aide. Par exemple, si l'on estime que l'affirmative action est bonne
pour les noirs, est-ce que cela a un sens de la faire dans des termes hostiles ou dogmatiques ? Il est évident qu'il
serait plus rentable d'avoir une approche plus diplomatique et plus conciliatrice, en faisant au moins des
concessions verbales ou symboliques aux blancs qui pensent que l'affirmative action est discriminatoire pour
eux. Mais les « gauchistes » n'ont pas ce genre d'approche car elle ne satisferait pas leurs penchants
psychologiques. L'aide aux noirs n'est pas leur véritable but. En fait, le problème racial est une excuse pour
exprimer leur propre hostilité et leur besoin frustré de pouvoir. Ce faisant, ils vont à l'encontre des aspirations
des noirs, car leur attitude hostile envers la majorité blanche a tendance à intensifier la haine raciale.
22. Si notre société n'avait pas le moindre problème, les « gauchistes » INVENTERAIENT des problèmes pour
justifier leur agitation.
23. Il est évident que ce qui précède ne prétend pas être un description précise de quiconque peut-être considéré
comme un « gauchiste ». Il ne s'agit que d'une indication générale des tendances du « gauchisme ».
LA SUR-SOCIALISATION
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24. Les psychologues utilisent le terme de « socialisation » pour désigner le processus par lequel les enfants
apprennent à agir et à penser en fonction des demandes de la société. Une personne est dite bien socialisée si elle
croit et obéit au code moral de cette société et s'y insère. Cela semble ne pas tomber sous le sens de dire que
beaucoup de « gauchistes » sont sur-socialisés du fait qu'ils sont perçus comme des rebelles. En fait cette
proposition est tout à fait défendable. De nombreux « gauchistes » ne sont pas les rebelles qu'ils semblent être.
25. Le code moral de notre société est tellement astreignant que personne ne peut penser, sentir et agir de
manière totalement morale. Par exemple, nous sommes censés ne haïr personne, bien que tout le monde ait haï
quelqu'un à un moment ou à un autre, que ce fait soit admit ou non. Certaines personnes sont tellement
socialisées que le devoir de penser, sentir et agir de manière morale leur impose un pénible fardeau. Pour éviter
des sentiments de culpabilité, elles doivent sans cesse se leurrer quant à leurs motivations et trouver des
explications morales pour des sentiments et actions qui, en réalité, n'ont pas d'origine morale. Nous utilisons le
terme de « sur-socialisés » pour désigner de pareilles personnes. 2
26. La sur-socialisation conduit à une piètre estime de soi, un sentiment de faiblesse, de défaitisme, de
culpabilité, etc. Un des moyens les plus importants par lequel notre société socialise les enfants est de leur faire
honte lorsque leurs comportements ou discours est contraire à ce que cette société attend d'eux. S'il y a
exagération dans ce sens, ou si un enfant est particulièrement réceptif à ce genre de sentiments, il finit par être
honteux de LUI-MÊME. La pensée et le comportement d'une personne sur-socialisée sont bien plus aliénées que
celles d'une autre modérément socialisée. La majorité des gens possèdent de larges franges de comportements
antisociaux. Ils mentent, commettent de menus larcins, enfreignent le code de la route, tirent au flanc, haïssent,
cancanent, ou utilisent des moyens déloyaux pour arriver à leurs fins. Une personne sur-socialisée ne peut pas
faire ce genre de choses, ou si elle le fait, cela provoque un sentiment de honte et de haine de soi. La personne
sur-socialisée ne peut même pas avoir une expérience, sans culpabilité, de pensées ou sentiments qui soient
contraires à la morale en place ; elle ne peut avoir de « mauvaises » pensées. Et la socialisation n'est pas juste
une question de morale ; nous sommes socialisés pour nous adapter à de nombreuses normes qui n'ont rien à voir
avec la morale proprement dite. Ainsi, la personne sur-socialisée est maintenue en laisse et sa vie avance sur les
rails que la société a construit pour elle. Pour beaucoup de personnes sur-socialisées, cela se traduit par un
sentiment de contrainte et de faiblesse qui peut être un terrible handicap. Nous affirmons que la sur-socialisation
est parmi les pires choses qu'un être humain peut infliger à un autre.
27. Nous pensons qu'une très grande et très influente partie de la gauche moderne est sur-socialisée et que cette
sur-socialisation est d'une grande importance dans la constitution du « gauchisme » moderne. Les « gauchistes »
sur-socialisés sont en général des intellectuels ou des membres de la classe moyenne supérieure. Notons que les
universitaires3 constituent la portion la plus sur-socialisée de notre société, ainsi que la plus à gauche.
28. Le « gauchiste » sur-socialisé essaie de se débarrasser de sa laisse mentale et affirme son autonomie en se
rebellant. Mais il n'est pas généralement assez fort pour se rebeller contre les plus élémentaires valeurs de la
société. En fait, les buts des « gauchistes » actuels n'entrent PAS en conflit avec la morale courante. Au
contraire, la gauche s'approprie un principe moral reconnu, l'adopte comme étant le sien, puis accuse le gros de
la société de violer le dit principe. Par exemple : égalité des races, des sexes, aide aux pauvres, pacifisme, non
violence en général, liberté d'expression, bonté envers les animaux. Plus fondamentalement, les devoirs des
individus envers la société, et ceux de la société vis à vis des individus. Toutes ces valeurs sont profondément
enracinées dans notre société (ou au moins dans les couches sociales supérieures4) depuis longtemps. Ces valeurs
sont explicitement ou implicitement formulées par les mass-média ou le système éducatif. Les « gauchistes »,
surtout sur-socialisés, ne se rebellent pas contre ces valeurs mais justifient leur hostilité à la société en prétendant
(avec une certaine raison) que la dite société vit en contradiction avec ces valeurs.
29. Voici une illustration qui montre combien les « gauchistes » sur-socialisés sont attachés aux attitudes
conventionnelles de notre société tout en prétendant se rebeller contre elle. Beaucoup de « gauchistes » se remue
pour l'affirmative action, pour promouvoir les noirs à des métiers gratifiants, pour améliorer le niveau dans les
écoles noires, ainsi qu'une augmentation du budget pour ces écoles ; pour eux la « sous-vie » des noirs est une
tare sociale. Ils veulent intégrer les noirs dans le système, en faire des hommes d'affaire, des juristes, des
scientifiques, comme c'est le cas des blancs des classes aisées. Les « gauchistes » répondront que la dernière
chose qu'ils veulent est de faire d'un noir une copie d'un blanc ; En fait, ils veulent préserver la culture afroaméricaine.
Mais en quoi consiste cette préservation ? Cela se résume à manger de la cuisine noire, écouter de la musique noire,
se vêtir de vêtements pour noirs, et aller dans des églises noires ou dans des mosquées. Sur le
fond, il ne s'agit que de quelque chose de totalement superficiel. Sur L'ESSENTIEL, les « gauchistes » sursocialisés
veulent rendre le noir conforme aux idéaux blancs de la classe moyenne. Ils veulent que ce dernier
étudie des matières scientifiques, devienne un cadre ou un scientifique, passe sa vie à grimper les échelons pour
prouver que les noirs valent les blancs. Ils veulent que les pères noirs soient « responsables », que les gangs
deviennent non-violents, etc. Mais ce sont exactement les valeurs du système techno-industriel. Le système se
moque de savoir ce que vous écoutez comme musique, ce avec quoi vous vous habillez, la religion en laquelle
vous croyez, tant que vous étudiez à l'école, dégottiez un travail respectable, soyez un parent « responsable », un
individu non-violent, et ainsi de suite. En effet, quoi que puissent être ses dénégations, le « gauchiste » sursocialisé
veut intégrer le noir dans le système et lui en faire adopter les valeurs.
30. Nous ne prétendrons certainement pas que les « gauchistes », même « sur-socialisés », ne se rebellent
JAMAIS contre les valeurs fondamentales de notre société. Bien sur, il arrive qu'ils le fassent. Certains
gauchistes sur-socialisés sont allés si loin dans la rébellion contre notre société moderne qu'ils se sont engagés
dans l'action violente. Selon leurs propres dires, la violence est pour eux une forme de « libération ». En d'autres
termes, en devenant violents, ils brisent les contraintes morales qu'ils ont en eux. Du fait de leur sursocialisation,
ces contraintes sont plus enfouies chez eux ; d'où le besoin impérieux de s'en défaire. Mais ils
justifient ordinairement leur rébellion au nom de valeurs reconnues. S'ils s'engagent dans l'action violente, ils
affirmeront qu'ils combattent le racisme ou quelque chose du même acabit.
31. Nous sommes conscients que de nombreuses objections peuvent être émises contre l'exposé rapide qui
précède concernant la psychologie « gauchiste ». La situation réelle est complexe, et une description exhaustive
prendrait plusieurs volumes quant bien même toute la documentation serait disponible. Nous affirmons
simplement avoir donné des pistes concernant les deux principales tendances de la psychologie du « gauchisme »
moderne.
32. Les problèmes du « gauchisme » sont ceux de notre société dans son ensemble. Faible estime de soi,
tendances dépressives et défaitisme ne sont pas l'apanage de la gauche. Bien qu'ils soient particulièrement
prononcés dans les rangs de la gauche, ils sont omniprésent dans notre société. Et la société actuelle essaie de
nous socialiser à un degré jamais atteint par les sociétés précédentes. Nous sommes même conseillés par des
experts pour manger, pour nous maintenir en forme, pour faire l'amour, pour élever nos enfants et ainsi de suite.
LE PROCESSUS DE POUVOIR
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33. Les êtres humains ont un besoin (probablement d'ordre biologique) pour quelque chose que nous appellerons
le « processus de pouvoir ». Il est apparenté au besoin de pouvoir (qui est bien connu) mais qui n'est pas
exactement la même chose. le processus de pouvoir comprend 4 éléments. Parmi les 3 les plus facilement
identifiables, nous citerons le but, l'effort et la réalisation du but (tout le monde a besoin de buts dont la
réalisation demande des efforts et a besoin de réaliser au moins quelques uns de ces buts). Le quatrième élément
est plus difficile à définir et n'est pas nécessaire à tout le monde. Nous appellerons l'autonomie et nous en
discuterons plus loin (paragraphes 42-44).
34. Prenons comme hypothèse le cas d'un homme qui obtiendrait tout ce qu'il veut simplement en le désirant. Cet
homme a du pouvoir, mais il va aussi avoir de sérieux problèmes psychologiques. Au début, cela l'amusera
beaucoup, mais au fur et à mesure, il finira par s'ennuyer et par être démoralisé. Eventuellement, il peut devenir
dépressif, au sens clinique du terme. L'histoire nous montre que les aristocraties sybarites ont fini par devenir
décadentes. Ce n'est pas vrai pour les aristocraties combatives qui avaient à se battre pour conserver leur pouvoir.
Mais les aristocraties indolentes et bien installées qui n'avaient pas besoin de défendre leurs prérogatives sont
souvent devenues blasées, hédonistes, et démoralisées, quant bien même elles détenaient le pouvoir. Ceci montre
que le pouvoir n'est pas tout. On doit avoir des buts permettant d'exercer ce pouvoir.
35. Tout le monde a des buts ; au moins acquérir le minimum vital : nourriture, eau, de quoi se vêtir et s'abriter.
Mais l'aristocratie désoeuvrée obtient tout cela sans effort. D'où son ennui et sa démoralisation.
36. L'échec à réaliser des buts importants amène à la mort s'ils concernent des besoins vitaux, et à la frustration
s'ils ne mettent pas en danger la vie du sujet. Des échecs graves pour parvenir aux buts d'une vie conduisent au
défaitisme, à la faible estime de soi, et à la dépression.
37. Ainsi, pour éviter de graves problèmes psychologiques, un être humain a besoin de buts qui nécessitent un
effort, et il doit avoir une chance raisonnable d'aboutir à ses fins.
LES ACTIVITÉS COMPENSATRICES
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38. Mais toutes les aristocraties désoeuvrées ne succombent pas à l'ennui et à la démoralisation. Par exemple,
l'empereur Hirohito, au lieu de sombrer dans un hédonisme décadent, s'occupa de biologie marine, domaine dans
lequel il devint un expert. Quand les gens n'ont pas à se débrouiller pour satisfaire leurs besoins primaires, ils se
créent des buts artificiels. Dans la majorité des cas, ils poursuivent ces buts avec la même énergie et le même
enthousiasme que s'il s'agissait d'assouvir un besoin naturel. Ainsi, les aristocrates de l'empire romain avaient des
prétentions littéraires ; de nombreux nobles européens d' il y a quelques siècles dépensaient un temps et une
énergie folle à la chasse, bien qu'ils n'aient eu nul besoin de la viande ; d'autres sont entrés en compétition pour
leur rang par un étalage de richesses ; et quelques uns, comme Hirohito, se sont tournés vers la science.
39. Nous avons utilisé le terme de « activités compensatrices » pour désigner une activité dirigée vers un but
artificiel qu'une personne s'est inventé pour simplement avoir quelque chose vers lequel tendre et oeuvrer, ou
selon ses dires pour la satisfaction personnelle qu'elle tire de cette activité. Ceci est une règle d'or pour identifier
une activité compensatrice. En présence d'une personne qui passe le plus clair de son temps à la poursuite d'un
but X, demandez vous : si elle employait tout son temps et son énergie à satisfaire des besoins vitaux, et si cet
effort nécessitait de sa part l'emploi de toutes ses facultés intellectuelles ou physiques de manière variée et
intéressante, serait-elle vraiment frustrée de ne pouvoir atteindre le but X ? Si la réponse est non, alors cette
personne s'adonne à une activité compensatrice. Les études de Hirohito sur la biologie marine constituent
clairement une activité compensatrice, puisqu'il est presque certain que s'il avait eu à occuper son temps à
d'intéressantes activités non-scientifiques pour assurer sa subsistance, il n'aurait pas été frustré de ne pas tout
connaître de l'anatomie et de la vie des animaux marins. D'un autre côté, la recherche d'amour ou de sexe (par
exemple) n'est pas une activité compensatrice, car la majorité des gens, même si leur existence est par ailleurs
satisfaisante, seraient extrêmement frustrés s'il n'avaient de leur vie aucune relation avec un membre du sexe
opposé (toutefois, une frénésie de sexe peut-être considérée comme une activité compensatrice).
40. Dans la société industrielle moderne, un effort minimal est nécessaire pour subvenir aux besoins vitaux. Il
suffit de suivre un programme approprié pour acquérir une minable compétence technique, puis d'aller travailler
et de déployer un effort des plus modestes pour conserver le job. Les seules qualités requises sont une
intelligence raisonnable, et surtout de OBÉISSANCE. Si vous possédez tout cela, la société prendra soin de vous
du berceau jusqu'à la tombe (bien entendu, il y a une « sous-classe » sociale qui ne peut tenir la satisfaction des
besoins primordiaux comme acquise, mais nous parlons ici de la majorité de la société). Ainsi il n'est pas
surprenant que la société moderne soit pleine d'activités compensatrices. Par exemple : les travaux scientifiques,
le sport, les activités humanitaires, la création artistique, grimper les échelons de votre entreprise, acquérir de
l'argent et des biens matériels bien au delà du point où cela vous apporte une réelle satisfaction, et l'activisme
social quand l'activiste s'occupe de choses qui ne le concernent pas personnellement, comme les activistes blancs
préoccupés par les droits des minorités. Il n'y a pas toujours d'activités purement compensatrices, car de
nombreuses personnes sont motivés en partie pour des raisons autres que simplement avoir un but à atteindre. Le
travail scientifique peut être motivé par un besoin de prestige, la création artistique pour exprimer ses sentiments,
le militantisme social par hostilité. Néanmoins, en général, ces activités sont essentiellement compensatrices. Par
exemple, la majorité des scientifiques admettra probablement que la satisfaction qu'ils retirent de leur travail est
plus importante que l'argent ou le prestige.
41. Pour beaucoup, si ce n'est la majorité des gens, les activités compensatrices sont moins satisfaisantes que la
poursuite de buts réels (ce sont des buts que des gens voudrait atteindre même si leur besoin de processus de
pouvoir était déjà satisfait). Un bon indicateur de cette tendance en est, que dans la quasi totalité des cas, les gens
qui s'adonnent avec acharnement à des activités compensatrices ne sont jamais satisfaits, jamais totalement.
Ainsi, le boursicoteur recherche toujours plus et plus d'argent. Le scientifique, à peine un problème résolu, se
jette aussitôt sur le suivant. Le coureur de fond s'oblige à courir toujours plus longtemps et plus vite. Beaucoup
de gens accaparés par leurs activités compensatrices prétendront qu'il s'épanouissent bien plus avec ces activités
qu'avec la triviale nécessité de subvenir à leurs besoins naturels, mais c'est uniquement parce que dans notre
société, cette nécessité à été réduite à sa plus simple expression. Plus grave, dans notre société, les gens ne
satisfont pas leurs besoins vitaux de façon AUTONOME, mais en se comportant comme des rouages d'une
énorme machine sociale. Par contre, les gens ont un grand besoin d'autonomie pour accomplir leurs activités
compensatrices.
L'AUTONOMIE
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42. L'autonomie comme partie du processus de pouvoir peut ne pas être nécessaire à tous les individus. Mais la
plupart des gens ont besoin d'un degré plus ou moins grand d'autonomie pour parvenir à leur fins. Leurs efforts
doivent être entrepris de leur propre initiative et conduit sous leur direction et leur contrôle. Déjà, la majorité des
gens ne s'occupent pas seuls de cette initiative, de ce contrôle et de cette direction. Il suffit d'ordinaire d'agir
comme membre d'un PETIT groupe. Ainsi, si une demi douzaine de personnes discutent d'un but entre eux et
font un effort commun pour l'obtenir, leur besoin de processus de pouvoir sera satisfait. Mais si ils travaillent
sous la tutelle d'un encadrement rigide s'exerçant de haut en bas et ne laissant aucune place à la décision
autonome et à l'initiative, alors leur besoin ne sera pas satisfait. Il en est de même quand les décisions sont prises
quand le groupe est si gros que le rôle de chaque individu est insignifiant.5
43. Il est vrai que certains individus ne semblent avoir qu'un faible besoin d'autonomie. Soit leur besoin de
pouvoir est faible, soit ils se satisfont en s'identifiant à la puissante organisation à laquelle ils appartiennent. Et,
de ce fait, ils sont décervelés, comme des animaux qui se satisfont d'un sentiment de pouvoir purement physique
(le bon soldat content de développer des techniques de combat dans le but d'une obéissance aveugle à ses
supérieurs).
44. Mais pour beaucoup de gens, c'est par le biais du processus de pouvoir — avoir un but, faire un effort
AUTONOME et atteindre ce but — que l'estime de soi, la confiance en soi, et un sentiment de pouvoir sont
acquis. Quand quelqu'un n'a pas l'occasion de se colleter avec le processus de pouvoir, les conséquences sont (en
fonction de l'individu et de la façon dont se disloque le processus de pouvoir) l'ennui, la démoralisation, une
faible estime de soi, des sentiments d'infériorité, du défaitisme, de la dépression, de l'anxiété, de la culpabilité, de
la frustration, de l'hostilité, des mauvais traitements à la femme ou aux enfants, un hédonisme exagéré, un
comportement sexuel anormal, des troubles du sommeil ou de l'appétit, etc. 6
LES SOURCES DES PROBLÈMES SOCIAUX
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45. Tous les problèmes précédemment exposés se retrouvent dans toutes les sociétés, mais dans la société
industrielle, ils sont prééminents. Nous ne sommes pas les premiers à dire que le monde moderne semble devenir
fou. Ceci n'est pas normal pour une société humaine. Il y a de bonnes raison de croire que l'homme primitif
souffrait moins du stress et de la frustration et était plus heureux de sa vie que son équivalent moderne. Il est vrai
que tout n'était pas rose dans les sociétés primitives. Le mépris des femmes est courant chez les aborigènes
d'Australie, la transexualité était assez répandue chez certaines tribus indiennes d'Amérique. Mais EN GROS, on
peut dire que les problèmes dont nous avons précédemment parlés étaient moins présents dans les sociétés
primitives qu'ils ne le sont dans le monde moderne.
46. Nous considérons que les problèmes psychologiques et sociaux de notre société sont dus au fait que notre
société demande aux gens de vivre dans des conditions totalement différentes de celles dans lesquelles la race
humaine s'est développée et de se conduire de façon opposée à celle qui fut celle dans le passé. En fonction de ce
que nous avons dit auparavant, il est clair que nous considérons que l'impossibilité d'exercer le processus de
pouvoir est la plus importante de ces conditions de vie anormales que la société moderne impose à ses sujets.
Mais ce n'est pas la seule. Avant de parler de la déliquescence du processus de pouvoir comme source de
problèmes sociaux, nous discuterons des autres sources.
47. Parmi les conditions de vie anormales dans la société industrielle, nous pouvons citer la densité excessive de
la population, la coupure de l'homme avec la nature, la trop grande rapidité des changements de vie, et
l'effondrement des petites communautés organiques comme la famille étendue, le village ou la tribu.
48. Il est bien connu que la surpopulation va de pair avec l'augmentation du stress et de l'agressivité. Le degré
d'entassement qui existe actuellement et la coupure de l'homme avec la nature sont des conséquences du progrès
technologique. Toutes les sociétés pré-industrielles étaient majoritairement rurales. La révolution industrielle a
terriblement accru la taille des villes ainsi que de la population qui y vit, et les techniques de l'agriculture
moderne ont rendu possibles à la planète de supporter une densité de population jamais vue auparavant (De
surcroît, la technologie décuple les effets de l'entassement car elle met entre les mains des gens d'importants
moyens de nuisance. Par exemple, une grande variété d'objets bruyants : tondeuses motorisées, radios, motos,
etc. Si l'utilisation de ces engins n'est pas réglementée, ceux qui veulent vivre dans le calme sont agressés par le
bruit. S'il elle est réglementée, les utilisateurs de ces engins se sentent lésés…Mais si ces machines n'avaient
jamais été inventées, il n'y aurait aucun problème…).
49. Pour les sociétés primitives, la nature (qui n'évolue que très lentement) fournissait un cadre stable et par
conséquent un sentiment de sécurité. Dans le monde moderne, c'est l'homme qui domine la nature plutôt que
l'inverse, et la société moderne évolue très rapidement pour suivre le progrès technique. Il n'y a plus de cadre
stable.
50. Les conservateurs sont idiots : Ils se plaignent du déclin des valeurs traditionnelles, alors qu'ils
s'enthousiasment pour le progrès technologique et la croissance économique. De toute évidence, il ne leur
apparaît pas qu'on ne peut avoir des changements rapides, drastiques dans la technologie et l'économie d'une
société sans causer parallèlement des évolutions tout aussi rapides dans tous les autres secteurs de cette société ;
et ces évolutions, inévitablement, mettent à bas les valeurs traditionnelles.
51. L'effondrement des valeurs traditionnelles implique celle des liens organiques des petites structures sociales.
La désintégration des petites structures sociales est aussi favorisée par la tendance moderne à imposer la mobilité
géographique aux individus , les séparant ainsi de leurs communautés. Pire, une société technologique SE DOIT
d'affaiblir les liens familiaux et les petites communautés si elle fonctionne correctement. Dans la société
moderne, la loyauté d'un individu doit d'abord aller au système et ensuite, seulement, à une petite communauté,
car si la loyauté au groupe restreint était plus forte que celle au système, de tels groupes prendraient l'avantage
sur le système.
52. Supposons qu'un homme politique ou un cadre d'une entreprise engage un cousin, un ami ou un
coreligionnaire à la place d'une autre personne plus qualifié pour ce travail. Il a permis à sa loyauté personnelle
de prendre le pas sur la loyauté envers le système ; et le « népotisme » et la « discrimination » sont deux péchés
capitaux dans la société moderne. Les pays en voie de développement qui n'ont pas bien réussi a subordonner la
loyauté individuelle à celle envers le système sont en général assez mal partis (voir l'Amérique Latine). Ainsi,
une société industrielle avancée ne peut tolérer en son sein que des groupes émasculés, brisés, et réduits à l'état
de rouages.7
53. L'entassement, la rapidité des changements, la destruction des communautés ont été massivement reconnus
comme sources de problèmes sociaux, mais nous ne croyons pas qu'ils soient à eux seuls responsables de
l'étendue des dégâts qu'on peut constater actuellement.
54. Certaines villes pré-industrielles étaient très grandes et très peuplées, mais leurs habitants ne semblent pas
avoir souffert d'aussi graves problèmes psychologiques que nos contemporains. Aux USA actuellement, il existe
encore des zones rurales peu peuplées, et nous y trouvons les mêmes problèmes que dans les zones urbaines,
bien qu'ils soient moins graves en zone rurale. L'entassement ne semble donc pas être un facteur déterminant.
55. Lors de la ruée vers l'ouest durant le 19e siècle, la mobilité de la population détruisit probablement les
familles étendues et les groupes restreints au moins sur une même échelle qu'actuellement. En fait, beaucoup de
familles nucléaires vivaient par choix dans l'isolement, n'ayant aucun voisin à des kilomètres à la ronde, et
n'appartenant de ce fait à aucune communauté. Pourtant il ne semble pas que les problèmes que nous
connaissons se soient développés.
56. Plus encore, les changements sur la frontier américaine furent très rapides et très profonds. Un homme
pouvait être né et avoir grandi dans une cabane en bois, à l'écart de la loi et de l'ordre, se nourrissant
principalement sur le terrain, et arrivé à un certain âge, il pouvait avoir travaillé et vécu dans une communauté
régie par des règles bien plus strictes. Ceci constitue un changement bien plus profond que celui qui affecte un
individu moderne, bien qu'à l'époque il ne semble pas avoir eu de conséquences psychologiques. En fait, au 19e
siècle, la société américaine était optimiste et sûre d'elle-même, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. 8
57. Nous pensons que la différence réside dans le fait que l'homme moderne a le sentiment (largement justifié)
que le changement lui est IMPOSE, alors qu'au 19e siècle, l'homme de la frontier avait le sentiment (largement
justifié aussi) qu'il était l'artisan de ce changement, de sa propre initiative. Ainsi un pionnier s'installait sur un
bout de terrain qu'il avait lui-même choisi et y construisait une ferme par ses propres efforts. A l'époque un
comté dans son ensemble ne comptait que quelques centaines d'habitants et constituait une entité bien plus isolée
et plus autonome qu'un comté de nos jours. Ce qui fait que le pionnier participait en tant que membre d'un petit
groupe à la création d'une nouvelle communauté. On peut se demander si cette création était un plus, mais de
toute façon cela satisfaisait le besoin du pionnier dans son processus de pouvoir.
58. On pourrait donner d'autres exemples de sociétés dans lesquelles eurent lieu de rapides changements et/ou
des pertes des liens au sein de petites communautés sans qu'il y ait eu les aberrations comportementales que l'on
peut observer dans la société actuelle. Nous soutenons que la plus importante source des problèmes
psychologiques et sociaux actuels est l'impossibilité pour les gens de gérer leur processus de pouvoir de manière
satisfaisante. Nous ne voulons pas dire que la société actuelle est la seule où le processus de pouvoir a été
contrarié. Probablement la plupart, si ce n'est toutes, les civilisations ont contrarié le processus de pouvoir à plus
ou moins grande échelle. Mais dans la société industrielle le problème est devenu particulièrement grave. Le
« gauchisme », au moins dans sa forme récente (depuis la moitié du 20e siècle), est en partie un symptôme de
l'absence de respect pour le processus de pouvoir.
EFFONDREMENT DU PROCESSUS DE POUVOIR DANS LA SOCIÉTÉ
MODERNE
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59. Nous divisons les désirs humains en trois groupes : (1) ceux qui peuvent être satisfaits avec un minimum
d'effort ; (2) ceux qui ne peuvent être satisfaits qu'au prix d'un sérieux effort ; (3) ceux qui ne peuvent être
satisfaits quels que soient les efforts accomplis. Le processus de pouvoir permet de satisfaire les désirs du second
groupe. Plus il y a de désirs du 3ème groupe, plus cela génère frustration, colère, éventuellement défaitisme,
dépression, etc.
60. Dans la société industrielle, les désirs naturels de l'homme ont tendance à se retrouver dans les groupes 1 et
3, tandis que le deuxième groupe tend à regrouper tous les désirs artificiellement créés.
61. Dans les sociétés primitives, les besoins physiques relevaient généralement du groupe 2 : ils pouvaient être
satisfaits seulement au prix de gros efforts. Mais les sociétés moderne ont tendance à garantir le minimum vital9
en échange d'un effort minime, ce qui fait que les besoins primordiaux y relèvent du groupe 1 (il peut y avoir
désaccord sur le fait que le fait de conserver un travail est « minime », mais généralement, dans les boulots des
couches basses et moyennes de la société, ce qu'on vous demande principalement, c'est l'obéissance. Vous restez
assis ou debout là où vous a dit de rester, et faites ce qu'on vous a dit de faire de la façon dont on vous a dit le
faire. Vous devez rarement vous impliquer sérieusement, et dans tout les cas, vous avez du mal à acquérir une
certaine autonomie, et , ainsi, le processus de pouvoir ne peut pas être satisfait).
62. Les besoins sociaux, comme le sexe, l'amour, et le statut social, relèvent souvent du groupe 2 dans la société
moderne, suivant la position hiérarchique de l'individu.10 Mais, à l'exception des individus qui ont un fort désir
pour un statut social élevé, l'effort requis pour réaliser les désirs sociaux est insuffisante pour satisfaire le
processus de pouvoir.
63. Ainsi, certains besoins artificiels ont été créés pour relever du groupe 2, de façon à essayer de satisfaire le
processus de pouvoir. La publicité et le marketing ont été développés de manière à ce que beaucoup de
personnes éprouvent des besoins pour des objets que leurs grand-parents n'avaient jamais désirés ou même
imaginés. Il faut gagner beaucoup d'argent pour satisfaire ces besoins artificiels, ce qui les fait relever du groupe
2 (Toutefois, voir paragraphes 80-82). L'homme moderne doit satisfaire son besoin de processus de pouvoir
essentiellement en courant après les besoins artificiels créés par la publicité et le marketing au service de
l'industrie11, et ce au travers des activités compensatrices.
64. Il semble que pour beaucoup de gens, peut-être la majorité, ces formes artificielles du processus de pouvoir
sont insuffisantes. Un thème qui apparaît régulièrement dans les écrits de la critique sociale de la 2ème moitié du
20e siècle est le sentiment d'inutilité qui accable de nombreuses personnes dans la société moderne (ce sentiment
d'inutilité est souvent désigné sous d'autres termes comme « anomie » ou « vacuité de la classe moyenne »).
Nous pensons que la soi-disante « crise d'identité » est à l'heure actuelle une recherche de sens, souvent sous la
forme d'une activité compensatrice adéquate. Il est possible que l'existentialisme soit pour une grande part une
réponse à ce sentiment d'inutilité.12 La quête de l'épanouissement est très largement répandue dans notre société.
Mais nous pensons que pour la majorité des gens une activité dont le but principal est l'épanouissement (c.a.d.
une activité compensatrice) n'apporte pas un épanouissement réel et profond. En d'autres termes, il se satisfait
pas totalement le besoin du processus de pouvoir (voir paragraphe 41). Ce besoin peut être pleinement satisfait
uniquement au travers d'activités qui ont un but extérieur, comme les nécessités vitales, le sexe, l'amour, le statut
social, etc.
65. Pire encore, lorsque les buts passent par gagner de l'argent, gravir les échelons hiérarchiques, ou oeuvrer
comme un rouage du système d'une quelconque autre manière, la plupart des gens ne sont pas en position de
poursuivre leurs buts de manière AUTONOME. Les travailleurs sont des employés standard, comme nous
l'avons vu au paragraphe 61, doivent passer leurs journées à faire ce qu'on leur a dit de faire de la manière qu'on
leur a dit de faire. Même la plupart des personnes à leur compte n'ont qu'une autonomie limitée. C'est la plainte
constante des petits entrepreneurs comme quoi leurs mains seraient liées par une réglementation étatique
abusive. Certaines de ces réglementations sont sans nul doute inutiles, mais elles sont le pendant essentiel et
inévitable de notre société hautement complexifiée. Une grande partie des indépendants travaillent sous le
régime de la franchise. Il a été rapporté il y a quelques années dans le Wall Street Journal que les sociétés
franchisées faisaient passer aux postulants un test destiné à écarter ceux qui faisait montre de créativité et
d'initiative, car de telles personnes ne sont pas suffisamment dociles pour se soumettre au système de la
franchise. Ceci exclut ainsi beaucoup de gens qui ont un grand besoin d'autonomie.
66. Aujourd'hui les gens vivent plus en fonction de ce que le système fait pour eux ou à leur place qu'en fonction
de ce qu'ils font pour eux-mêmes. Et ce qu'ils font est de plus en plus canalisé par le système. Les possibilités
deviennent celles que le système tolère, et elles doivent être jugulées par les lois et réglementations13, et les
techniques préconisées par les experts doivent être suivies si on veut avoir une chance de réussite.
67. Ainsi le processus de pouvoir se désagrège dans notre société du fait d'une déficience de buts authentiques et
d'une perte d'autonomie dans la poursuite de ces buts. Mais il se désagrège aussi à cause des désirs qui relèvent
du groupe 3 : les désirs qui ne peuvent être satisfaits quels que soient les moyens mis en oeuvre. Un de ces désirs
est le besoin de sécurité. Nos vies dépendent de décisions prises par d'autres personnes ; nous n'avons aucun
contrôle sur ces décisions, et nous ne connaissons même pas les gens qui les prennent (« Nous vivons dans un
monde dans lequel relativement peu de gens — peut-être 500 ou 1000 — prennent les décisions fondamentales »
— Philip B. Heymann de l'université de droit de Harvard, interrogé par Anthony Lewis, du New York Times le
21 avril 1995). Nos vies dépendent des niveaux de sécurité réellement appliqués dans une centrale nucléaire ; de
la quantité de pesticides autorisée dans nos aliments ou de la pollution dans notre atmosphère ; du niveau de
qualification de notre médecin ; le fait que nous trouvions ou perdions un emploi est soumis à l'arbitraire des
économistes du gouvernement ou des dirigeants de trusts ; et ainsi de suite. La plupart des individus ne sont pas
en position de se défendre eux-mêmes contre tous ces périls, sinon sur une très petite échelle. La recherche de la
sécurité est ainsi frustrée, ce qui conduit à un sentiment de dépérissement.
68. On peut rétorquer que l'homme primitif est physiquement bien moins à l'abri que son homologue moderne,
ainsi que le montre sa plus faible espérance de vie ; c'est pourquoi l'homme moderne souffre moins et non pas
plus de l'insécurité. Mais la sécurité psychologique ne correspond pas exactement avec la sécurité physique. Ce
qui nous fait nous SENTIR en sécurité n'est pas tant une sécurité réelle que le sentiment de confiance en notre
capacité à nous débrouiller nous-mêmes. L'homme primitif, acculé par un fauve ou poussé par la faim, peut se
défendre ou partir à la recherche de nourriture. Il n'est pas certain de réussir, mais il n'est certainement pas sans
ressource face à l'adversité. D'un autre côté, l'homme moderne est démuni face aux accidents nucléaires, aux
substances cancérigènes dans la nourriture, à la pollution, la guerre, l'augmentation des impôts, les intrusions
dans sa vie privée, et en général face aux phénomènes sociaux ou économiques à l'échelle de la nation qui
peuvent détruire son mode de vie.
69. Il est vrai que l'homme primitif est démuni face à certains périls, la maladie par exemple. Mais il accepte
stoïquement le risque de maladie. Cela fait partie de la nature des choses, ce n'est la faute de personne, sinon d'un
démon, contre lequel on ne peut rien. Mais ce que subit l'homme moderne est L'OEUVRE DE L'HOMME. Ce
n'est pas du à la malchance, mais ça lui est IMPOSE par d'autres personnes qu'il est incapable, en tant
qu'individu, d'influencer. En conséquence de quoi, il se sent frustré, humilié et en colère.
70. Ainsi l'homme primitif a pour une grande part sa sécurité entre ses propres mains (soit comme individu, soit
comme membre d'un PETIT groupe) tandis que la sécurité de l'homme moderne est entre les mains de personnes
ou d'organisations qui sont trop inaccessibles pour qu'il soit à même de pouvoir les influencer. Ainsi, le désir de
sécurité de l'homme moderne tend à relever des groupes 1 et 3 ; dans certains cas (nourriture, logement, etc.),
cette sécurité est assurée au seul coût d'un faible effort, tandis que dans les autres cas, il ne PEUT PAS accéder à
cette sécurité (Ce qui précède simplifie exagérément la situation réelle, mais indique en gros en quoi la condition
de l'homme moderne diffère du primitif).
71. Les gens ont des désirs passagers ou des envies qui sont nécessairement contrariées dans la vie moderne, et
qui relèvent ainsi du groupe 3. On peut être affamé, mais la société moderne ne permet pas de chasser.
L'agression verbale est même interdite dans de nombreux cas. Quand on se déplace, on peut être pressé ou bien
décontracté, mais on n'a pas généralement le choix, sinon de se déplacer au rythme du trafic et d'obéir aux
signaux. On peut vouloir travailler d'une manière différente, mais souvent on doit travailler suivant les directives
de son employeur. De bien d'autres manières, l'homme moderne est emprisonné dans un réseau de lois et
réglementations (implicites ou explicites) qui contrarient ses envies et ainsi interfèrent avec le processus de
pouvoir. La plupart de ces réglementations ne peuvent pas être ignorées, car elles sont nécessaires au
fonctionnement d'une société industrialisée.
72. La société moderne est sous bien des aspects extrêmement permissive. Tout ce qui ne perturbe pas le
fonctionnement du système, nous pouvons le faire. Nous pouvons croire en la religion de notre choix (tant
qu'elle n'encourage pas des attitudes dangereuses pour le système). Nous pouvons coucher avec qui bon nous
semble (tant que nous pratiquons le safe sex). Nous pouvons faire ce que nous voulons tant que c'est ANODIN.
Mais quand cela devient IMPORTANT, le système a tendance à progressivement réguler nos comportements.
73. Nos comportements ne sont pas seulement régulés par des lois explicites et pas seulement par le
gouvernement. Le contrôle est souvent exercé par une coercition indirecte ou par une pression psychologique ou
des manipulations, et, ce, par des organisations autres que le gouvernement, ou par le système dans son
ensemble. La plupart des grandes organisations utilisent des formes de propagande14 pour manipuler le public
dans ses attitudes et comportements. La propagande n'est pas limitée au « commerce » et à la publicité, et parfois
n'est même pas considérée comme telle par les gens qui la diffusent. Par exemple, le contenu d'un programme de
divertissement est une puissante forme de propagande. Un exemple de coercition indirecte : Il n'y a pas de loi qui
dise qu'il faille aller travailler tous les jours et suivre les directives du patron. Légalement, rien ne nous interdit
de retourner à l'état sauvage ou de travailler pour notre compte. Mais en pratique, il reste peu de contrées
sauvages, et il y a une place limitée dans notre économie pour « l'artisanat ». Ce qui fait que la plupart d'entre
nous ne peuvent survivre qu'en étant l'employé de quelqu'un.
74. Nous soutenons que les obsessions de l'homme moderne pour la longévité de sa vie et pour assurer jusqu'à un
âge avancé la vigueur physique et l'attrait sexuel sont un symptôme d'une aliénation résultant de la déliquescence
du processus de pouvoir. La « crise de l'âge mûr » en est aussi un symptôme. De même la perte d'intérêt pour une
nombreuse progéniture assez courante dans la société moderne, mais presque insensée dans les sociétés
primitives.
75. Dans une société primitive, la vie est une succession d'étapes. Les besoins et fonctions propres à un stade
ayant été accomplies, il n'y a pas de problème particulier à passer au stade supérieur. Un jeune homme
accomplira son processus de pouvoir en devenant un chasseur, non pour le sport ou pour l'agrément, mais pour
assurer sa subsistance (en ce qui concerne les jeunes femmes, le processus est plus complexe, du fait d'un
accroissement du rôle social ; nous n'en discuterons pas ici). Cette période ayant été couronnée de succès, il n'y a
pas de problème pour s'assagir et fonder un foyer (par contre, certains « modernes » repoussent indéfiniment le
moment d'avoir des enfants car ils sont trop occupés à rechercher « l'épanouissement » de quelque manière que
ce soit. Nous pensons que l'épanouissement dont ils ont besoin est une expérience correcte du processus de
pouvoir — avec des buts réels au lieu des buts artificiels des activités compensatrices). De même, après avoir
élevé ses enfants, avoir utilisé le processus de pouvoir pour leur fournir subsistance, l'homme primitif sent que
son heure est venue et accepte la vieillesse (s'il survit jusque là), puis meurt. D'un autre côté, la plupart des
hommes modernes, sont hantés par l'inéluctabilité de la mort, comme le montre la somme d'efforts qu'ils
déploient pour conserver leur vigueur, leur attrait et leur santé. Nous affirmons que ceci est du au fait qu'ils n'ont
jamais utilisé leurs capacités physiques d'une quelconque manière, qu'il n'ont jamais éprouvé leur processus de
pouvoir en utilisant leur corps de façon sérieuse. Ce n'est pas l'homme primitif, qui a quotidiennement exercé son
corps, qui craint les affronts de l'âge, mais le moderne qui ne l'a jamais fait, à part marcher de sa voiture à sa
maison. C'est l'homme dont le besoin du processus de pouvoir a été satisfait durant sa vie qui est le mieux
préparé à accepter la fin de sa vie.
76. En réponse aux arguments de cette section, quelqu'un rétorquera : « la société doit trouver un moyen de
donner aux gens la capacité d'exercer leur processus de pouvoir ». Pour de telles personnes, cette capacité est
nulle par le simple fait que la société la leur donnera. Ce dont elles ont besoin, c'est de trouver cette capacité
d'elles-mêmes. Tant que le système leur DONNERA les « moyens », ils seront en laisse. Pour parvenir à
l'autonomie, ils doivent se débarrasser de la laisse.
COMMENT CERTAINS S'ADAPTENT
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77. Tout le monde ne souffre pas de problèmes psychologiques dans la société techno-industrielle. Certains
prétendent même qu'ils sont assez contents de la société telle qu'elle est. Nous allons maintenant voir pourquoi
les réactions face à la société moderne diffèrent tellement.
78. Premièrement, il y a sans nul doute des différences dans la force du désir de pouvoir. Les individus avec un
faible désir de pouvoir ont des besoins quant au processus de pouvoir, ou, au moins, peu de besoin d'autonomie
pour le satisfaire. Ce sont des soumis qui auraient été heureux comme noirs dans les plantations de coton du Sud
(Nous ne voulons pas nous moquer des noirs des plantations. Au moins, ils n'étaient PAS contents d'être
esclaves. Nous ironisons sur ceux qui SONT contents de leur servitude).
79. Des gens peuvent avoir des désirs exceptionnellement forts, ce qui leur permet de satisfaire leur processus de
pouvoir. Par exemple, ceux qui ont une motivation hors du commun quant au statut social peuvent passer toute
leur vie à grimper le long de la hiérarchie en ne se lassant jamais de ce jeu.
80. Les gens varient par leur sensibilité à la publicité et au marketing. Certains y sont si sensibles que, même s'ils
dépensent beaucoup d'argent, ils ne peuvent satisfaire leur constant désir pour les nouveaux jouets brillants que
l'industrie du marketing fait miroiter devant leur yeux. Ils se sentent ainsi toujours pressurés financièrement,
même si leurs revenus sont élevés, et leurs désirs sont frustrés.
81. Certains sont peu réceptifs à la publicité et aux techniques de marketing. Ils ne sont pas intéressés par
l'argent. L'accumulation de biens matériels ne sert pas leur besoin de processus de pouvoir.
82. Les gens qui ont une sensibilité moyenne à ces techniques sont capables d'économiser assez d'argent pour
satisfaire leurs envies de biens et de services, mais seulement au prix d'un gros effort (en faisant des heures
supplémentaires, en ayant un deuxième travail, en recherchant les promotions, etc.). Ainsi les biens matériels
satisfont leur besoin de processus de pouvoir. Mais cela ne signifie pas forcement que leur besoin soit
pleinement satisfait. Ils peuvent avoir une autonomie insuffisante pour leur processus de pouvoir (leur travail
peut ne consister qu'à suivre les ordres) et quelques uns de leurs désirs peuvent être frustrés (par ex. la sécurité).
(Nous sommes conscients de la simplification à l'extrême des paragraphes 80 à 82 car nous avons considéré que
le désir d'accumulation de biens matériels était entièrement généré par la publicité et le marketing. Bien sur, ce
n'est pas aussi simple).
83. D'autres peuvent partiellement satisfaire leur besoin de pouvoir en s'identifiant à une puissante organisation
ou à un mouvement de masse. Un individu manquant de but ou de pouvoir rejoint un mouvement ou une
organisation, adopte ses buts comme les siens propres, puis travaille à leur accomplissement. Quand certains de
ces buts sont atteints, l'individu, même si sa contribution personnelle à été infime, se sent (par son identification
avec le mouvement ou l'organisation) comme s'il avait exercé son processus de pouvoir. Ce phénomène a été
exploité par les fascistes, les nazis et les communistes. Notre société l'utilise aussi, quoique de manière moins
voyante. Par exemple : Manuel Noriega devenait gênant pour les USA (but : punir Noriega). Les USA
envahissent le Panama (effort),et punissent Noriega (accomplissement du but). Les USA ont exercé leur
processus de pouvoir et beaucoup d'Américains, par identification avec leur pays, l'ont exercé par procuration.
Ce qui explique l'approbation publique presque générale à l'invasion du Panama ; elle a donné aux gens une
impression de pouvoir.15 Nous voyons le même phénomène dans les armées, les entreprises, les partis politiques,
les organisations humanitaires, les mouvements idéologiques ou religieux. En particulier, les mouvements de
gauche ont tendance à attirer les gens qui cherchent à satisfaire leur besoin de pouvoir. Mais dans la majorité des
cas, l'identification à une grande organisation ou un mouvement de masse ne satisfait pas entièrement leur besoin
de pouvoir.
84. Un autre moyen pour les gens de satisfaire leur processus de pouvoir est de passer par les activités
compensatrices. Comme nous l'avons expliqué dans les paragraphes 38-40, une activité compensatrice est mise
en oeuvre pour satisfaire un but artificiel que l'individu poursuit pour son épanouissement, mais pas pour
atteindre le but lui-même. Par exemple il n'y a aucune raison valable de se forger un corps d'athlète, de pousser
une petite balle dans un trou ou de collectionner les timbres. Pourtant beaucoup de gens se passionnent pour le
body-building, le golf ou les collections de timbres. Certaines personnes sont plus influencés que d'autres, et
accordent une importance démesurée à une activité compensatrice, simplement parce les autres leur accordent la
même importance, la société les ayant convaincus de l'importance des dites activités. C'est pourquoi certaines
personnes prennent très à coeur des activités futiles comme les sports, le bridge, les échecs, d'érudites études
ésotériques, tandis que d'autres dont les yeux sont dessillés n'y voit que des activités compensatrices, et n'y
attachent pas d'importance pour leur besoin du processus de pouvoir. Tout cela pour rappeler que le fait de
gagner sa vie est aussi une activité compensatrice. Pas une activité compensatrice à l'état PUR, puisque qu'elle
permet aussi de subvenir à leur besoins et (dans certains cas) pour satisfaire leur besoin de statut social, ainsi que
les « suppléments » que la publicité leur fait désirer. Mais beaucoup de gens s'investissent dans leur travail, bien
plus que le nécessiterait la recherche d'argent et de statut social, ce qui en fait une activité compensatrice. Cet
effort exagéré, ainsi que l'investissement émotionnel qui l'accompagne, constitue un des moteurs les plus
puissants qui perpétuent et perfectionnent le système, avec toutes les conséquences négatives pour la liberté
individuelle (voir paragraphe 131). Tout spécialement, pour les scientifiques et les ingénieurs (au sens large), le
travail a tendance a devenir essentiellement une activité compensatrice. Ce point est très important et fera l'objet
d'un chapitre à part, que nous développerons plus loin (paragraphes 87-92).
85. Dans cette section, nous avons expliqué comment beaucoup de gens dans la société moderne satisfont leur
besoin de processus de pouvoir sur une échelle plus ou moins grande. Mais nous pensons que pour la majorité, le
besoin de processus de pouvoir n'est pas entièrement satisfait. Tout d'abord, ceux qui ont une insatiable ambition
sociale ou qui sont solidement « ferrés » par une activité compensatrice, ou qui s'identifient suffisamment avec
un mouvement ou une organisation, sont des cas rares. Les autres ne sont pas comblés par les activités
compensatrices ou l'identification à une organisation (voir paragraphes 41, 64). Ensuite, un contrôle bien trop
fort est imposé par le système et ses règlements explicites ou la socialisation, d'où en résulte une perte
d'autonomie, ainsi que la frustration due à l'impossibilité d'atteindre certains buts et la nécessité de réfréner
certaines envies.
86. Mais même si la majorité des gens étaient satisfaits de la société industrielle, nous (FC) serions toujours
opposés à ce type de société, parce que (parmi d'autres raisons) nous considérons qu'il est dégradant de satisfaire
les besoins de chacun envers le processus de pouvoir au travers des activités compensatrices ou l'identification
avec une organisation, plutôt que de poursuivre des buts authentiques.
LES MOTIVATIONS DES SCIENTIFIQUES
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87. La science et la technologie constituent les plus importants exemples d'activités compensatrices. Certains
scientifiques prétendent qu'ils sont mus par la « curiosité », ce qui est proprement absurde. La plupart des
scientifiques sont attelés à des problèmes hautement spécialisés qui ne peuvent être l'objet d'aucune curiosité
naturelle. Par exemple est-ce qu'un astronome, un mathématicien ou un entomologiste éprouvent de la curiosité
pour les propriétés de l'isopropyltrimethylmethane ? Bien sûr que non. Un chimiste seul peut être intéressé par
cela uniquement parce que la chimie est son activité compensatrice. Un chimiste s'intéresse-t-il à la place à
donner dans la classification ad hoc à une nouvelle espèce de coléoptère ? Non. Cette question relève
uniquement du domaine de l'entomologiste, et il s'y intéresse seulement parce que c'est son activité
compensatrice. Si le chimiste et l'entomologiste avaient à se remuer pour satisfaire leurs nécessités vitales, et si
cette activité les accaparait de façon intéressante, mais non scientifique, il n'accorderait pas la moindre
importance à l'isopropyltrimethylmethane ou à la classification des coléoptères. Supposons que l'absence
d'argent pour suivre des études supérieures ait conduit le chimiste à devenir agent d'assurance plutôt que
chimiste. Dans ce cas, il serait passionné par tout ce qui touche aux assurances, et se moquerait totalement de
l'isopropyltrimethylmethane. Dans tous les cas, il n'est pas normal de dépenser tant de temps et d'efforts pour
satisfaire une simple curiosité ainsi que le font les scientifiques. L'explication de la motivation des scientifiques
par la « curiosité » ne tient tout simplement pas debout.
88. Le « bonheur de l'humanité » n'est pas une explication plus satisfaisante. Certains travaux scientifiques n'ont
aucun rapport concevable avec le bonheur de l'humanité — par exemple l'archéologie ou la linguistique
comparative. D'autres domaines de la science sont potentiellement dangereux. Malgré tout, ceux qui oeuvrent
dans ces domaines sont aussi enthousiastes que ceux qui s'occupent de combattre les maladies ou la pollution.
Considérons le cas du Dr Edward Teller qui est de toute évidence passionné par la promotion des centrales
nucléaires. Est-ce que cet enthousiasme peut être réfréné par le désir du bonheur de l'humanité ? Si c'est le cas,
pourquoi le Dr Teller n'est pas préoccupé par les causes « humanitaires » ? S'il était si « humain », pourquoi a-t-il
participé au développement de la bombe H ? Comme pour beaucoup de réalisations scientifiques, la question
reste ouverte de savoir si les centrales nucléaires sont bénéfiques pour l'humanité. Est-ce que l'électricité à
moindre coût vaut les risques d'accidents et l'accumulation des déchets ? Le Dr Teller ne voit qu'un aspect de la
question. Évidemment, son enthousiasme pour les centrales nucléaires ne provient pas d'un désir de faire le
« bonheur de l'humanité », mais de la satisfaction personnelle qu'il a tiré de son travail et de son application
pratique.
89. Ceci est vrai pour les scientifiques en général. A de rares exceptions près, leur motivation n'est ni la curiosité,
ni le bien de l'humanité, mais le besoin d'exercer leur processus de pouvoir : avoir un but (un problème
scientifique à résoudre), fournir un effort (la recherche), et atteindre ce but (la solution du problème). La science
est une activité compensatrice car les scientifiques travaillent principalement pour la satisfaction qu'il retire du
travail lui-même.
90. Bien sur, ce n'est pas aussi simple : d'autres motifs jouent un rôle parmi les scientifiques. L'argent et le statut
social par exemple. Certains scientifiques peuvent appartenir à la race de ces gens qui ont un insatiable besoin de
reconnaissance sociale (voir paragraphe 79). Et cela en fait leur principal motivation. Nul doute que la majorité
des scientifiques, comme l'ensemble de la population, sont plus ou moins réceptifs à la publicité et aux
techniques de marketing et ont besoin d'argent pour satisfaire leur soif de biens et de services. Ainsi la science
n'est pas une activité compensatrice PURE. Mais c'en est une pour une large part.
91. De plus, la science et la technologie constitue un puissant mouvement de masse et beaucoup de scientifiques
satisfont leur besoin de pouvoir par l'identification à ce mouvement de masse (voir paragraphe 83).
92. Ainsi la science avance en aveugle, indifférente au bonheur des hommes ou à tout autre critère, obéissant
seulement aux besoins psychologiques des scientifiques et aux officiels du gouvernement qui leur accordent les
subventions.
NATURE DE LA LIBERTÉ
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93. Nous allons maintenant démontrer que la société techno-industrielle ne peut pas être réformée de façon à
l'empêcher de réduire progressivement la sphère de la liberté humaine. Mais comme « liberté » est un terme qui
peut être compris de maintes manières, nous allons d'abord exposer clairement quelle sorte de liberté nous
concerne.
94. Par liberté, nous entendons la possibilité d'exercer le processus de pouvoir, avec des buts réels et non pas les
buts artificiels des activités compensatrices, et sans interférence, manipulation ou supervision de qui que ce soit,
tout spécialement d'une grande organisation. La liberté signifie être en mesure de contrôler (soit seul, soit au sein
d'un PETIT groupe) sa propre vie jusqu'à sa mort ; nourriture, habillement, gîte, et défense contre tous les
dangers qui peuvent advenir dans son environnement. La liberté est synonyme de pouvoir, pas le pouvoir de
contrôler les autres, mais le pouvoir de contrôler toutes les circonstances de sa propre vie. Il n'y a pas de liberté si
quelqu'un (et spécialement une grande organisation) exerce le pouvoir sur un autre, quand bien même ce pouvoir
serait exercé avec bonté, tolérance et permissivité. Il est important de ne pas confondre pouvoir avec un surcroît
de permissivité (voir paragraphe 72).
95. Nous sommes censés vivre dans une société libre car nous avons un certain nombre de droits et garanties
constitutionnelles. Mais cela n'est pas aussi important que cela en a l'air. Le degré de liberté individuelle qui
existe dans une société est plus déterminé par sa structure économique et technologique que par ses lois et la
forme de son gouvernement.16 La plupart des nations indiennes de Nouvelle Angleterre étaient des monarchies,
et beaucoup des cités de la renaissance italiennes étaient dirigées par des dictateurs. Mais en s'intéressant de près
à ces sociétés, on s'aperçoit qu'elles permettaient une plus grande liberté individuelle que la notre. Cela était du
en partie au manque de moyens efficaces de faire respecter la loi : Il n'y avait pas de police moderne, bien
organisée, pas de communications à longue distance, pas de caméras de surveillance, pas de dossiers sur les vies
et moeurs des citoyens. Il était ainsi facile d'échapper au contrôle.
96. Parmi nos droits constitutionnels, prenons l'exemple de la liberté de la presse. Nous ne voulons évidemment
pas détruire ce droit ; c'est un très important outil pour limiter la concentration des pouvoirs politiques et pour
dénoncer ceux qui abusent de ce pouvoir. Mais la liberté de la presse est d'un très faible intérêt pour le citoyen
moyen en tant qu'individu. Les mass media sont sous la coupe de puissants trusts parfaitement intégrés au
système. Quiconque a un peu d'argent peut faire imprimer quelque chose, ou le distribuer sur Internet, ou utiliser
une autre technique, mais ce qu'il aura à dire sera noyé dans l'énorme volume de données généré par les média,
ce qui fait que cela n'aura pratiquement aucun effet. S'imposer à la société avec des mots est presque impossible
pour la plupart des individus ou des petits groupes. Prenons notre exemple (FC). Si nous n'avions pas usé de
violence, et avions soumis le présent écrit à un éditeur, il n'aurait probablement pas été accepté. S'il avait été
accepté et publié, il n'aurait certainement pas touché beaucoup de lecteurs, parce qu'il est plus amusant de se
divertir avec ce que fournissent les média plutôt que de lire un essai un peu aride. Même si ces écrits avaient été
lus par de nombreux lecteurs, la plupart d'entre eux auraient rapidement oublié ce qu'ils venaient de lire, leur
esprit étant saturé par le flot de données des médias. Pour faire passer notre message au public avec une certaine
chance qu'il fasse impression, nous avons du tuer des gens.
97. Les droits constitutionnels sont utiles jusqu'à un certain point, mais ne peuvent servir à garantir ce que nous
pourrions appeler la conception bourgeoise de la liberté. Suivant cette conception, un homme « libre » est
essentiellement un élément de la machine sociale et possède un nombre de libertés limités et circonscrites. ; des
libertés dont le but est de servir les besoins de la machine sociale plutôt que ceux de l'individu. Ainsi, le
bourgeois « libre » jouit d'une liberté économique car elle favorise la croissance et le progrès ; de la liberté de la
presse car la critique publique limite les malversations des hommes politiques ; il a des droits à un procès
équitable car l'emprisonnement arbitraire serait préjudiciable au système. Ceci était nettement la conception de
Simon Bolivar. Pour lui, le peuple ne pouvait jouir de la liberté que si elle était utilisé pour promouvoir le
progrès (le progrès au sens bourgeois). D'autres penseurs bourgeois ont eu des conceptions similaires de la
liberté comme moyen d'un but collectif. Chester C. Tan dans « La pensée politique chinoise au 20e siècle »,
explique page 202, la philosophie du leader du Kuomintang, Hu-Han Min : « Un individu bénéficie de droits
parce qu'il est membre d'une société et sa vie en communauté requiert de tels droits. » Par communauté, Hu veut
dire la société dans son ensemble, la nation. Et à la page 259 il établit que suivant Carsum Chang (Chang-Chaun
mai, chef du parti socialiste de Chine), la liberté devait être utilisée dans l'intérêt de l'état et du peuple en même
temps. Mais quelle forme de liberté a-t'on si on peut seulement faire ce que d'autres ont prescrit ? La conception
de la liberté de FC n'est pas celle de Bolivar, Hu, Chang et autres théoriciens bourgeois. Le problème avec ce
genre de théoriciens est que l'élaboration et la mise en application de théories sociales est leur activité
compensatrice. Par conséquent, ces théories sont plus conçues pour satisfaire les besoins des théoriciens que
ceux d'un quidam qui a eu la malchance de vivre dans une société où ces théories se sont imposées.
98. Un autre point à souligner : ce n'est pas parce que quelqu'un estime être libre qu'il l'EST réellement. La
liberté est bridée d'une part par des contraintes psychologiques inconscientes, et d'autre part, l'idée que ce font la
plupart des gens de la liberté est issue des conventions sociales et non pas des besoins authentiques des
individus. Par exemple, il est probable que beaucoup de « gauchistes » sur-socialisés diraient que la majorité des
gens, eux y compris, ne sont pas assez sur-socialisés plutôt que l'inverse, ce qui fait que le « gauchiste » sursocialisé
paie son degré de sur-socialisation au prix fort.
QUELQUES PRINCIPES D'HISTOIRE
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99. L'histoire peut être pensée comme la somme de deux composantes : une partie erratique faite d'événements
imprévisibles qui ne semblent soumis à aucune logique, et une autre soumise à des tendances à long terme. Nous
nous occuperons ici des tendances à long terme.
100. PREMIER PRINCIPE : Si une tendance à long terme est perturbée par un PETIT changement, alors le
résultat de ce changement sera presque toujours faible — la tendance revenant rapidement à son état initial
(Exemple : une série de réformes destinées à éradiquer la corruption politique n'a généralement que des effets à
court terme ; plus ou moins rapidement, , les réformateurs se relâchent et la corruption revient au galop. Le
niveau de corruption dans une société donnée a tendance à demeurer constant, ou à ne changer que
progressivement avec l'évolution de la société. Normalement un « nettoyage » politique n'aura d'effets
permanents que s'il est accompagné d'une réforme de fond de la société ; un PETIT changement ne peut être
suffisant). SI un petit changement au sein d'un mouvement de longue durée apparaît comme étant permanent,
c'est uniquement parce que le changement oeuvre dans la direction générale du mouvement, ce qui fait que le
mouvement n'est pas modifié, mais a seulement franchi une étape.
101. Le premier principe est pratiquement une tautologie. Si une tendance n'est pas stable vis à vis de petits
changements, c'est qu'elle est soumise au hasard plutôt qu'elle ne suit une ligne directrice donnée ; ce n'est donc
pas une tendance de longue durée.
102. SECOND PRINCIPE : Si un changement modifie de manière durable une tendance historique à long terme,
cela modifiera la société dans son ensemble. En d'autres termes, une société est un système dans lequel toutes les
composantes sont interdépendantes, et vous ne pouvez profondément changer une des composante sans que tout
le reste ne soit changé aussi.
103. TROISIÈME PRINCIPE : Si un changement modifie de manière durable une tendance historique à long
terme, alors les conséquences pour la société dans son ensemble sont imprévisibles (sauf si un certain nombre
d'autres sociétés ont subi le même changement, et ont toutes eu les mêmes conséquences, auquel cas on pourra
prédire de manière empirique les conséquences de ce changement sur la société qui veut l'expérimenter).
104. QUATRIÈME PRINCIPE : Une nouvelle forme de société ne peut pas être conçue sur le papier. Elle ne
peut être planifiée à l'avance, puis mise en place en espérant qu'elle fonctionne comme il a été prévu.
105. Le troisième et quatrième principe proviennent de la complexité des sociétés humaines. Un changement
dans le comportement humain affectera l'économie d'une société et son environnement ; l'économie affectera
l'environnement et vice versa, et ces changements affecteront le comportement humain de façon complexe et
imprévisible ; et ainsi de suite. L'enchevêtrement des causes et des effets est trop complexe pour être compris et
démêlé.
106. CINQUIÈME PRINCIPE : Les gens ne choisissent pas consciemment et rationnellement la forme de leur
société. Elles se développent suivant des processus d'évolution sociale qui ne sont pas sous un contrôle humain
rationnel.
107. Le cinquième principe est la conséquence des 4 autres.
108. A titre d'illustration : Du fait du premier principe, en général, une tentative de réforme sociale soit agit dans
la direction vers laquelle se dirige la société de toute manière (ainsi elle ne fait qu'accélérer un mouvement qui
aurait eu lieu de toute façon), soit elle n'a qu'un effet limité dans le temps, et la société reviendra bientôt à son
état initial. Pour accomplir un changement radical vis à vis de la tendance à long terme d'une société, une
réforme est insuffisante ; il faut une révolution (une révolution ne signifie pas forcement une insurrection armée
ou le renversement d'un gouvernement). Du fait du second principe, une révolution ne change jamais qu'un seul
aspect d'une société ; et du fait du troisième, des changements adviennent, qui n'ont jamais été imaginés ou
souhaités par les révolutionnaires. Du fait du quatrième, quand des révolutionnaires mettent en place un nouveau
type de société, cela ne marche jamais comme prévu.
109. La Révolution Américaine ne constitue pas un contre-exemple. La « Révolution » Américaine n'était pas
une révolution suivant notre définition, mais une guerre d'indépendance suivie d'une réforme politique. Les Pères
Fondateurs n'ont pas changé la ligne générale du développement de la société américaine, et n'y tenaient pas non
plus. Ils ont seulement libéré le développement de la société américaine des effets archaïques de la férule
britannique. Leur réforme politique n'a changé aucune tendance de fond, mais a seulement poussé la culture
politique américaine dans sa direction naturelle. La société britannique, dont la société américaine était dérivée,
s'était dirigé depuis longtemps sur la voie de la démocratie représentative. Et avant la Guerre d'Indépendance, les
américains pratiquaient déjà la démocratie représentative à un degré appréciable dans les assemblées coloniales.
Le système politique établit par la Constitution fut modelé sur le système britannique et les assemblées
coloniales. Avec certainement d'importantes modifications — il ne fait pas de doute que les Pères Fondateurs
franchirent un pas important. Mais c'était un pas le long de la route que les sociétés anglo-saxonnes
empruntaient. La preuve en est que les anglais et toutes les colonies majoritairement peuplées de descendants
d'anglais, ont fini par adopter une démocratie représentative similaire à celle des USA. Si les Pères Fondateurs
avaient flanché et n'avait signé la Déclaration d'Indépendance, notre vie aujourd'hui ne serait pas très différente.
Peut-être aurions nous d'une certaine manière des liens plus étroits avec l'Angleterre, ainsi qu'un parlement et un
premier ministre à la place d'un congrès et d'un président. Rien d'important. Ainsi, la Révolution Américaine ne
constitue pas un contre-exemple à nos principes, mais plutôt une bonne illustration.
110. Toutefois, il faut appliquer ces principes avec bon sens. Ils ont été exprimés dans une langue de tous les
jours qui permet une certaine latitude pour l'interprétation, et on peut leur trouver des exceptions. Ainsi, nous
présentons ces principes non comme des lois absolues, mais comme des approximations ou des trames, qui
peuvent en partie fournir un antidote contre les idées naïves sur le futur de notre société. Ces principes doivent
être constamment gardés à l'esprit, et s'il advient qu'on arrive à une conclusion en contradiction avec eux, on doit
soigneusement réexaminer sa pensée et ne retenir sa conclusion que si l'on a de bonnes et de solides raisons pour
le faire.
LA SOCIÉTÉ TECHNO-INDUSTRIELLE NE PEUT PAS ÊTRE
REFORMÉE
*******************************************************************
111. Les principes précédents nous montrent qu'il est désespérément difficile de réformer le système industriel
de façon à l'empêcher de réduire progressivement notre sphère de liberté. Ce fut une tendance constante,
remontant au moins à la révolution industrielle, de la technologie à renforcer le système à un prix élevé quant à
la liberté individuelle et à l'autonomie. Ce qui fait que tout changement mis en oeuvre pour protéger la liberté de
la technologie serait contraire à la tendance fondamentale du développement de notre société. En conséquence,
un tel changement serait soit passager — rapidement évacué par la vague de l'histoire -, soit, s'il devait devenir
permanent, devrait modifier la nature de notre société dans son ensemble. Cela, suivant le premier et second
principe. De surcroît, la société serait modifiée de manière imprévisible (troisième principe), ce qui constitue un
grand risque. Des changements assez radicaux pour promouvoir la liberté ne pourraient être entrepris car il
risqueraient de gravement perturber le système. Ainsi, tout effort de reforme serait trop timide pour avoir de
l'effet. Même si ces changements étaient accomplis, ils seraient abandonnés une fois leurs effets perturbants
devenus apparents. Ainsi, des changements radicaux en faveur de la liberté ne peuvent être accomplis
uniquement que par des gens prêts à accepter une modification radicale, dangereuse et imprévisible de
l'ensemble du système. En d'autres termes, par des révolutionnaires, pas des réformistes.
112. Les gens désireux de préserver la liberté sans sacrifier les bénéfices supposés de la technologie proposeront
des plans naïfs pour réconcilier la liberté et la technologie. En dehors du fait que les gens qui font ces
suggestions proposent rarement des moyens pratiques pour mettre en place une nouvelle forme de société, il
découle du quatrième principe que même si cette nouvelle forme de société pouvait advenir, elle s'effondrerait ou
donnerait des résultats bien différents de ceux escomptés.
113. Ainsi même d'après des postulats aussi généraux, il semble hautement improbable qu'un moyen puisse être
trouvé pour réconcilier liberté et technologie moderne. Dans les prochains chapitres, nous donnerons des raisons
plus précises qui permettent de conclure que la liberté et le progrès technologique sont incompatibles.
LA LIMITATION DE LA LIBERTÉ EST INÉVITABLE DANS UNE
SOCIÉTÉ INDUSTRIELLE
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114. Comme nous l'avons expliqué dans les paragraphes 65-67 et 70-73, l'homme moderne est englué dans un
réseau de lois et réglementations, et ce fait est du aux manoeuvres de personnes inaccessibles qu'il ne peut
influencer. Ce n'est pas accidentel ou le résultat de l'arbitraire de bureaucrates arrogants. Ceci est nécessaire et
inévitable dans toute société technologiquement avancée. Le système SE DOIT de régir de près les
comportements humains. Au travail, les gens doivent faire ce qu'on leur dit de faire, sans quoi la production
sombrerait dans le chaos. Les bureaucraties DOIVENT fonctionner suivant des règles rigides. Permettre une
certaine latitude aux bureaucrates de bas niveau désorganiserait le système et amènerait des dysfonctionnements
dus aux différentes façons dont les bureaucrates exerceraient cette autonomie. Il est vrai que quelques limitations
à la liberté pourraient être éliminées, mais EN GROS, la mise en coupe réglée de nos vie par de grandes
organisations est nécessaire au bon fonctionnement de la société techno-industrielle. Le résultat en est un
sentiment de perte de pouvoir pour l'individu moyen. Il est possible, toutefois, que les réglementations explicites
seront progressivement remplacées par des moyens psychologiques qui nous ferons faire ce que le système veut
que nous fassions (Propagande, techniques d'éducation, programmes de « santé mentale »,…).
115. Le système DOIT forcer les gens à se comporter d'une manière qui s'éloigne de plus en plus des schémas
naturels du comportement humain. Par exemple, le système a besoin de scientifiques, de mathématiciens, et
d'ingénieurs. Il ne peut fonctionner sans eux. Les adolescents sont soumis à une très forte pression pour exceller
dans ces domaines. Il n'est pas naturel qu'un adolescent passe le plus clair de son temps assis à un bureau absorbé
par ses études.
116. Un adolescent normal doit se dépenser en se colletant avec le monde réel. Parmi les sociétés primitives, les
enfants apprenaient des choses en harmonie avec les pulsions naturelles de l'homme. Chez les amérindiens, par
exemple, les garçons s'entraînaient à des occupations de plein air — le genre de choses qu'aiment les garçons.
Mais dans notre société les enfants sont poussés vers les matières techniques, ce qu'ils font en rechignant.
117. Dans toute société industrielle avancée, le destin d'un individu DOIT dépendre de décisions qu'il ne peut
infléchir dans une large mesure. Une société technologique ne peut être fractionnée en petites communautés
autonomes, car la production dépend de la coopération de grandes masses d'individus. Quand une décision
concerne, disons, un million de personnes, chacun des individus concernés a, en moyenne, une part d'un
millionième dans la prise de la décision. Ce qui arrive en pratique, c'est que les décisions sont prises par des
officiels ou des dirigeants de firmes, ou par des experts techniques, et même quand il y a vote pour la prise d'une
décision, le nombre des votants est tel que le vote d'un individu est insignifiant.17 Ainsi la plupart des individus
sont incapables d'exercer une influence sur les décisions importantes qui affectent leurs vies. Il n'y a aucun
moyen concevable de remédier à cela dans une société technologiquement avancée. Le système essaie de
« résoudre » ce problème par le biais de la propagande de façon à ce que les gens VEUILLENT ces décisions
prises pour eux, mais même si cette « solution » était complètement satisfaisante en rendant les gens heureux, ce
serait dégradant.
118. Les conservateurs et quelques autres se font les défenseurs de « l'autonomie locale ». Les petites
communautés ont été autonomes, mais cette autonomie devient de moins en moins possible du fait que les petites
communautés sont prisonnières et dépendantes de systèmes à grande échelle comme les services publiques, les
réseaux informatiques, le réseau autoroutier, les mass media, la sécurité sociale. Une telle offensive contre
l'autonomie résulte du fait que la technologie appliquée dans un domaine affecte la vie des gens dans tous les
domaines. Ainsi l'utilisation de produits chimiques ou de pesticides près d'un ruisseau peut contaminer l'eau
potable des centaines de kilomètres en aval, et l'effet de serre affecte l'ensemble la planète.
119. le système ne peut pas exister pour satisfaire les désirs des hommes. Au contraire, c'est le comportement des
hommes qui est modifié pour s'adapter à ceux du système. Cela n'a rien à voir avec l'idéologie sociale ou
politique qui prétend contrôler le système technologique. C'est le fait de la technologie, car le système est soumis
non pas à une ou des idéologies, mais aux contraintes techniques.18 Évidemment, le système satisfait bon nombre
de désirs humains, mais en général, il ne le fait que dans la mesure où il retire avantage à le faire. Ce sont les
besoins du système qui sont primordiaux, pas ceux de l'être humain. Par exemple, le système fournit de la
nourriture à la population, car il ne pourrait fonctionner si tout le monde mourrait de faim ; il pourvoit aux
besoins psychologiques des gens puisque cela lui est AVANTAGEUX, car il ne pourrait pas non plus
fonctionner si trop de personnes devenaient dépressives ou rebelles. Mais, pour des raisons imparables, évidentes
et impérieuses, il doit exercer une constante pression sur les gens de façon à modeler leurs comportements
suivant ses besoins. Trop de déchets s'accumulent ? Le gouvernement, les media, le système éducatif, les
défenseurs de l'environnement, tout le monde nous inonde d'une propagande en faveur du recyclage. Besoin d'un
personnel plus techniquement qualifié ? Un choeur exhorte les gamins à suivre des filières scientifiques.
Personne ne se pose la question de savoir s'il n'est pas inhumain de forcer des adolescents à passer le plus clair
de leur temps à étudier des matières qu'ils détestent en majorité. Quand les ouvriers qualifiés sont mis au
chômage par les nouvelles technologies, et doivent se recycler, personne ne se demande si ce n'est pas humiliant
pour eux de se retrouver dans pareille situation. Il est tout simplement tenu pour évident que tout le monde doit
se plier aux exigences technologiques et, ce, pour une bonne raison : si les besoins des gens passaient avant les
nécessités technologiques, il y aurait des problèmes économiques, du chômage, une récession, voire pire. Le
concept de « santé mentale » dans notre société est principalement défini par la capacité d'un individu à se
comporter en accord avec les besoins du système, et, ce, sans manifester de signes de stress.
120. Les efforts pour tenter d'accorder de l'importance au sens de l'existence et à l'autonomie à l'intérieur du
système ne sont rien de plus qu'une plaisanterie. Par exemple une compagnie, au lieu de faire réaliser à chacun
de ses employés une partie d'un catalogue, leur fait réaliser à chacun un catalogue dans son intégralité, cela étant
supposé leur donner plus de motivation et d'autonomie dans leur travail, mais, en pratique, cela ne peut être
réalisé que sur petite échelle et dans tous les cas, les employés ne se voient pas accorder l'autonomie pour se
réaliser — leurs efforts personnels ne peuvent être mis à profit pour ce qui les intéresse, mais uniquement pour
accomplir les buts du patron qui sont la survie et la croissance de la société. Une société déposerait son bilan si
elle agissait autrement. De même, dans un système socialiste, les travailleurs doivent prodiguer leurs efforts pour
atteindre les buts de l'entreprise, sans quoi cette entreprise ne remplirait pas sa fonction vis à vis du système. Une
fois de plus, pour des raisons purement techniques, il n'est pas possible pour la majorité des individus ou des
petits groupes d'obtenir une véritable autonomie dans une société industrielle. Même un indépendant a
généralement une autonomie limitée. En dehors de la nécessité de se conformer aux réglementations
gouvernementales, il doit s'insérer dans le système économique et se plier à ses contraintes. Par exemple, lors de
l'émergence d'une nouvelle technologie, l'indépendant est souvent obligé de l'adopter, qu'il le veuille ou non, s'il
veut demeurer compétitif.
LES « BONS » CÔTÉS DE LA TECHNOLOGIE NE PEUVENT ÊTRE
SÉPARÉS DES « MAUVAIS »
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121. Une raison supplémentaire pour laquelle la société industrielle ne peut être réformée en faveur de la liberté
vient du fait que la technologie moderne constitue un système global aux composantes interdépendantes. Vous
ne pouvez rejeter les « mauvais » côtés de la technologie et ne garder que les « bons ». Prenons la médecine
moderne par exemple. Les progrès en médecine dépendent de ceux de la chimie, de la physique, de la biologie,
de l'informatique, et autres. Les traitements médicaux de pointe requièrent des équipement high tech qui ne
peuvent être fournis que par une société de haute technologie et économiquement prospère. Il est évident que
vous ne pouvez avoir de progrès médical en dehors de l'ensemble du complexe technologique et de tout ce qui
lui est affilié.
122. Même si les progrès médicaux pouvaient être obtenus indépendamment du reste du système technologique,
cela amènerait tout de même certaines dérives. Supposons, par exemple, qu'un traitement contre le diabète soit
découvert. Les gens génétiquement prédisposés au diabète seraient en mesure de survivre et de se reproduire
comme tout un chacun. La sélection naturelle qui s'exerce contre les gènes du diabète cesserait et ces gènes se
répandraient parmi toute la population (cela est déjà le cas dans une certaine mesure, puisque le diabète, qui ne
peut être guéri, est jugulé par l'utilisation d'insuline). La même chose arriverait avec d'autres maladies du même
type ce qui affaiblirait le patrimoine génétique de la population. La seule solution serait alors une sorte de
programme eugénique ou un développement à grande échelle de l'ingénierie génétique, ce qui fait que dans le
futur, l'homme ne sera plus une création de la nature, du hasard, ou de Dieu (suivant vos convictions religieuses
ou philosophiques), mais un produit manufacturé.
123. Si vous pensez que l'ingérence gouvernementale dans votre vie privée est trop importante
ACTUELLEMENT, réfléchissez à ce que se serait s'il commençait à gérer la constitution génétique de vos
enfants. Une telle gestion ira inévitablement de pair avec le développement de l'ingénierie génétique appliquée à
l'homme, car les conséquences seraient sinon désastreuses.19
124. La réponse classique à de tels propos consiste à parler de « l'éthique médicale ». Mais un code éthique ne
servirait pas à protéger la liberté face au progrès médical. ; il ne ferait qu'aggraver les choses. Un code éthique
applicable à l'ingénierie génétique serait en pratique un moyen de contrôler la constitution génétique de l'être
humain. Certains (majoritairement issus de la upper-middle class) décideraient quelles applications en ingénierie
génétique seraient « éthiques », et lesquelles ne le seraient pas, ce qui aurait pour effet d'imposer leurs propres
valeurs vis à vis de la constitution génétique de la population dans son ensemble. Même si un code éthique était
choisi sur une base complètement démocratique, la majorité imposerait ses propres valeurs à toutes les minorités
qui pourraient avoir des vues différentes quant à ce que devrait être un code éthique appliqué à ingénierie
génétique. Le seul code éthique qui protégerait la liberté serait celui qui interdirait TOUTE manipulation
génétique sur l'homme, et vous pouvez être surs qu'un pareil code ne sera jamais appliqué dans une société
technologique. Tout code qui réduirait l'ingénierie génétique à un rôle mineur ne tiendrait pas longtemps, car la
tentation offerte par l'immense pouvoir que confère la biotechnologie serait irrésistible, spécialement dans le cas
où pour la majorité des gens la plupart de ces applications sembleraient naturellement et univoquement
« bonnes » (élimination des maladies physiques et mentales, possibilité d'accroître la durée de vie,…).
Inévitablement, l'ingénierie génétique sera intensivement utilisée, mais uniquement dans des buts compatibles
avec les besoins du système techno-industriel.20
LA TECHNOLOGIE EST UNE FORCE SOCIALE PLUS FORTE QUE
LE DÉSIR DE LIBERTÉ
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125. Il n'est pas possible de réaliser un compromis DURABLE entre technologie et liberté, car la technologie est
de loin la force sociale la plus puissante et empiète continuellement sur la liberté de compromis SUCCESSIFS
en compromis SUCCESSIFS. Imaginons le cas de 2 voisins, chacun possédant la même superficie de terrain ;
mais l'un d'entre eux étant plus fort que l'autre. Le fort demande à l'autre une partie de son terrain. Le faible
refuse. Le fort dit : « Ok, faisons un arrangement. Donne moi la moitié de ce que je t'ai demandé ». Le faible n'a
pas d'autre choix que d'obtempérer. Un peu plus tard, le fort réitère sa demande, de nouveau il y a arrangement,
et ainsi de suite. Par cette longue série d'arrangements, le fort finira probablement par se rendre maître de tout le
terrain de l'autre. Il en va ainsi du conflit entre technologie et liberté.
126. Expliquons maintenant pourquoi la technologie est une force sociale plus forte que le désir de liberté.
127. Une avancée technologique qui apparaît à première vue comme ne présentant pas de danger pour la liberté
se révèle souvent très menaçante au bout d'un certain temps. Par exemple, considérons les transports. Un homme
à pied pouvait pratiquement aller où bon lui semblait, à son rythme sans s'occuper des règles du code de la route
et était indépendant des structures technologiques. Quand les véhicules à moteurs sont apparus, ils semblaient
devoir donner plus de liberté à l'homme. Ils n'empiétaient pas sur la liberté du piéton, personne n'avait
d'automobile s'il n'en voulait pas, et celui qui choisissait de posséder une automobile pouvait voyager beaucoup
plus vite qu'un homme à pied. Mais l'introduction de ces engins a rapidement changé la société de telle façon que
la liberté de se déplacer s'en est trouvée restreinte. Quand les automobiles deviennent trop nombreuses, il devient
nécessaire de réglementer leur usage. Dans une voiture, tout spécialement dans les zones fortement peuplées,
personne ne peut se déplacer à son rythme, le mouvement est dicté par celui du flot et par les règles du code de la
route. De surcroît, l'utilisation d'un moyen de transport motorisé n'est plus simplement optionnel. Depuis
l'introduction de ces engins, la conformation de nos villes a tellement changé que la plupart des gens ne peuvent
plus vivre sans avoir à se déplacer sur de longues distances entre leur domicile et leur travail, les centres
commerciaux, et autres, ce qui fait qu'ils DÉPENDENT de l'automobile pour le transport. Ou bien ils utilisent les
transports publics, auquel cas ils ont encore plus perdu quant à leur liberté de déplacement qu'en prenant la
voiture. Même la liberté du piéton a été considérablement restreinte. En ville, il est continuellement obligé de
s'arrêter aux stops et aux feux qui servent principalement à gérer le trafic automobile. A la campagne le trafic
rend la marche extrêmement dangereuse et déplaisante le long des grands-routes (Notez le point important que
nous avons illustré avec le cas du transport motorisé : quand un nouvel artefact technologique est introduit en
tant qu'option qu'un individu peut refuser ou accepter, il ne RESTE pas souvent optionnel. Dans la majorité des
cas, la nouvelle technologie change la société de telle façon que les gens se trouvent CONTRAINTS de
l'utiliser).
128. Alors que le progrès technologique DANS SON ENSEMBLE réduit continuellement notre sphère de
liberté, chaque nouvelle avancée technologique CONSIDÉRÉE SEULE apparaît sous un jour favorable.
L'électricité, l'eau courante, les communications à longue distance… Comment pourrait-on protester contre ces
choses ou contre n'importe quelles autres avancées parmi les innombrables qui ont été faites dans la société
moderne ? Il aurait été absurde de s'opposer au téléphone par exemple. Ainsi que nous l'avons déjà expliqué dans
les paragraphes 59-76, toutes ces avancées technologiques prises ensemble ont créé un monde où le destin de
l'individu moyen n'est plus entre ses mains, ou entre celles de ses voisins ou amis, mais dans celles des
politiciens, des dirigeants de trusts, et d'inaccessibles et anonymes techniciens et bureaucrates sur lesquels il n'a
aucun pouvoir.21 Le même processus se poursuivra dans le futur. Prenons l'ingénierie génétique par exemple.
Peu de gens résisteront aux techniques génétiques qui élimeront les maladies héréditaires. Elles ne présentent pas
d'inconvénient apparent, et empêchent la souffrance. Il est pourtant évident qu'une bonne partie des travaux en
génétique transformeront l'homme en un produit manufacturé au lieu qu'il demeure une création du hasard (ou de
Dieu, ou ce que vous voulez, suivant vos convictions).
129. Une autre raison pour laquelle la technologie est une force sociale si puissante vient du fait que, dans une
société donnée, le progrès technologique avance uniquement dans une seule direction ; il ne peut être arrêté. Une
fois qu'un artefact a été introduit, les gens deviennent généralement dépendants de lui, jusqu'à ce qu'il soit
remplacé par un artefact plus récent. Ce ne sont pas les individus qui deviennent dépendants, mais le système
tout entier (Imaginons ce qui arriverait à l'heure actuelle si les ordinateurs disparaissaient). Ainsi le système ne
peut avancer que dans une seule direction, vers toujours plus de progrès technique. La technologie force
continuellement la liberté à reculer — sauf destruction complète du système technologique tout entier.
130. La technologie avance à grande vitesse et menace la liberté de tous côtés à la fois (surpopulation, lois et
réglementations, sur-dépendance de l'individu vis à vis des grandes organisations, propagande et autres
techniques psychologiques, manipulations génétiques, violation de la vie privée par les systèmes de surveillance
et les ordinateurs, etc.). Résister à CHACUN de ces dangers requerrait une longue lutte sociale différente. Ceux
qui veulent protéger la liberté sont submergés par l'incroyable nombre de nouvelles attaques et la vitesse à
laquelle elles se propagent, ce qui les rend dérisoires et les accule à la reddition. Combattre chacun de ces
dangers séparément serait futile. Un succès ne peut être espéré qu'en combattant le système technologique dans
son ensemble ; mais ceci est une révolution et pas une réforme.
131. Les techniciens (nous prenons ce terme au sens large de ceux qui exercent une activité spécialisée requérant
des études) ont tendance à être tellement impliqués dans leur travail (leur activité compensatrice) que quand un
conflit advient entre leur travail technique et leur liberté, ils tranchent presque toujours en faveur de leur travail
technique. Ceci est évident pour les scientifiques ; mais cela est visible partout : les éducateurs, les groupes
humanitaires, et autres, n'hésitent pas à faire usage de propagande et d'autres techniques psychologiques pour
leur permettre de réaliser leur buts hautement louables. Les firmes, et les agences gouvernementales, quand cela
leur parait utile, n'hésitent pas non plus à collecter des renseignements sur les individus sans respect de leur vie
privée. Ceux chargés de faire respecter la loi sont souvent ennuyés par les droits constitutionnels des suspects —
souvent totalement innocents — et font tout ce qui est légalement en leur pouvoir (voire illégalement) pour
contourner ou ignorer ces droits. La plupart de ces éducateurs, de ces fonctionnaires et de ces représentant de la
loi croient en la liberté, le respect de la vie privée et les droits constitutionnels, mais quand ceux-ci entrent en
conflit avec leur travail, ils estiment en général que ce dernier est plus important.
132. Il est bien connu que les gens travaillent mieux quand ils en espèrent une récompense, que quand ils
cherchent à éviter un châtiment, ou quelque chose de négatif. Les scientifiques et autres techniciens sont
principalement motivés par les bénéfices qu'ils peuvent retirer de leur travail. Mais ceux qui s'opposent aux
atteintes de la technologie contre la liberté travaillent pour éviter quelque chose de négatif ; en conséquence peu
de gens travaillent assidûment à cette tâche décourageante. Même si les réformistes arrivent à poser un jalon
contre la dégradation à venir de la liberté face à la technologie, la plupart relâcheront leur attention et se
consacreront à des activités plus agréables. Mais les scientifiques resteront actifs dans leurs laboratoires, et la
technologie et ses progrès repartiront de plus belle, en dépit des barrières, pour exercer de plus en plus de
contrôle sur les individus et les rendre encore plus dépendants du système.
133. Ni les accords sociaux, ni les lois, les institutions, les coutumes ou l'éthique ne peuvent fournir une
protection durable contre la technologie. L'histoire montre que tous les accords sociaux sont transitoires ; ils
évoluent ou disparaissent parfois. Mais les avancées de la technologie sont permanents au sein d'une société
donnée. Supposons par exemple qu'il soit possible d'arriver à un accord social pour empêcher les manipulations
génétiques sur l'homme ou éviter qu'elles ne soient utilisées pour des fins qui atteignent à sa liberté et à sa
dignité. Mais la technologie attendra son heure. Plus ou moins rapidement, l'accord social tombera en désuétude.
Probablement assez rapidement, étant donné l'allure du changement dans cette société. Alors les manipulations
génétiques commenceront à mettre à bas notre sphère de liberté et ce fait sera irréversible (à moins d'un
effondrement de la société technicienne elle-même). Toutes les illusions concernant un accord permanent
doivent être dissipées, il suffit de voir ce qui arrive actuellement à la législation anti pollution. Il y a quelques
années, on aurait pu croire que des mesures légales parviendraient à empêcher les pires abus en matière de
dégradation de l'environnement. Un changement politique, et ces mesures commencent déjà à tomber en
désuétude.
134. Pour toutes les raisons susdites, la technologie est une force sociale bien plus puissante que l'aspiration à la
liberté. Mais des réserves doivent être faites quant à ce constat. Il apparaît que dans les prochaines décades, le
système techno-industriel sera agité par de violents remous dus aux problèmes sociaux et environnementaux, et
spécialement ceux dus au mal être humain (aliénation, rébellion, hostilité, un certain nombre de difficultés
psychologiques et sociales). Nous espérons que ces remous que le système ne manquera pas de supporter le
feront s'effondrer, ou au moins l'affaibliront suffisamment pour qu'une révolution éclate et soit victorieuse, et à
ce moment là, l'aspiration à la liberté aura prouvé qu'elle est plus forte que la technologie.
135. Au paragraphe 125, nous avons utilisé l'analogie d'un voisin faible dépouillé par un voisin fort qui lui prend
sa terre en le forçant à une série de compromis. Mais supposons maintenant que le fort tombe malade, de façon à
ce qu'il soit incapable de se défendre. Le faible peut le forcer à lui restituer ses terres ou même le tuer. S'il laisse
le fort survivre, et se contente de récupérer la terre, c'est un idiot, car le fort, dès qu'il sera guéri la lui reprendra.
La seule alternative raisonnable pour le faible est de tuer le fort, s'il en a l'opportunité. De la même façon, si le
système industriel s'affaiblit, nous devons en profiter pour le détruire. Si nous ne le faisons pas et lui laissons le
temps de se remettre, il nous dépouillera définitivement de toute liberté.
LES PROBLÈMES SOCIAUX LES PLUS SIMPLES SE SONT RÉVÉLÉS INSOLUBLES
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136. Si quelqu'un s'imagine encore qu'il est possible de réformer le système de façon à préserver la liberté de la
technologie, qu'il considère les manières boiteuses et souvent inopérantes avec lesquelles notre société a essayé
de gérer d'autres problèmes sociaux, de loin plus simples et plus triviaux. Ainsi, le système a été incapable
d'arrêter la dégradation de l'environnement, la corruption dans la sphère politique, le trafic de drogue, et autres.
137. Prenons les problèmes de l'environnement, par exemple. Ici les oppositions sont claires : les impératifs
économiques contre la volonté de préserver quelques unes des ressources naturelles pour nos petits enfants.22
Mais sur ce sujet nous avons seulement obtenu des inepties et des déclarations dilatoires de la part des gens qui
ont le pouvoir, et non pas un programme d'action clair et cohérent et nous ne pouvons qu'imaginer la montagne
de problèmes environnementaux qu'auront à gérer nos petits enfants. Les efforts pour résoudre les problèmes
environnementaux se réduisent à des chamailleries et à des compromis entre différentes factions, les unes en
position de force à un moment, les autres à un autre. L'énergie pour ce programme varie suivant les mouvements
d'humeur de l'opinion publique. Ce n'est pas un processus rationnel, ou c'en est un dont on ne peut espérer une
solution adéquate et satifaisante. La plupart des problèmes sociaux, s'ils veulent être « vraiment » résolus, sont
rarement ou jamais résolus de façon rationnelle et claire. C'est un processus confus où de nombreux groupes de
pressions poursuivant leurs intérêts propres23 à court terme arrivent (en général par chance) à un modus vivendi
plus ou moins stable. En fait, les principes que nous avons formulés dans les paragraphes 100-106 semblent nous
indiquer qu'il est peu probable que les plans sociaux rationnels à long terme puissent JAMAIS prétendre au
succès.
138. Ainsi, il apparaît que la race humaine a au mieux une capacité très limitée de résoudre même ses problèmes
sociaux les plus triviaux. Comment pourrait-elle résoudre le problème infiniment plus complexe et plus difficile
que constitue la réconciliation de la liberté et de la technologie ? La technologie a des avantages clairement mis
en avant, alors que la liberté est une abstraction dont la signification varie d'un individu à l'autre, et sa perte est
facilement dissimulée par la propagande et les discours mensongers.
139. Et notons cette importante différence. Il est possible que nos problèmes d'environnement (par exemple)
soient un jour résolus grâce à un plan clair et rationnel, mais il ne le seront que parce que cela rentre dans les
intérêts à long terme du système de résoudre ces problèmes. Mais ce n'est PAS dans l'intérêt du système de
préserver la liberté ou l'autonomie des petits groupes. Au contraire, son intérêt est de contrôler le comportement
humain sur la plus large échelle possible.24 Ainsi, si des considérations pratiques pourront éventuellement forcer
le système à entreprendre une action pour la préservation de l'environnement, de semblables considérations
forceront le système à prendre en main de façon encore plus drastique le comportement humain (de préférence
par des moyens indirects qui dissimuleront l'effritement de la liberté). Ce n'est pas juste notre opinion.
D'éminents sociologues (par exemple James Q. Wilson) ont insisté sur l'importance à « socialiser » la population
de manière plus efficiente.
LA RÉVOLUTION EST PLUS FACILE QUE LA RÉFORME
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140. Nous espérons avoir convaincu le lecteur que le système ne peut être réformé de façon à concilier liberté et
technologie. La seule méthode est de mettre à bas le système techno-industriel dans son ensemble. Ceci implique
une révolution, pas nécessairement une insurrection armée, mais un changement radical et profond dans la nature
de notre société.
141. Les gens ont tendance à penser que du fait que la révolution engendre de plus grands changements que la
réforme, elle est plus difficile à mettre en oeuvre que cette dernière. En fait dans certaines conditions, la
révolution est plus aisée que la réforme. Ceci vient de ce qu'un mouvement révolutionnaire peut inspirer bien
plus d'enthousiasme qu'une réforme. Cette dernière en général n'offre qu'une solution à un problème social
particulier. La révolution propose de résoudre tous les problèmes en une fois et recréer un monde nouveau ; elle
procure un idéal à ceux qui prendront les plus grands risques et assumeront les plus grands sacrifices. Pour toutes
ces raisons, il pourrait être plus facile de détruire tout le système technologique que de mettre en application des
restrictions efficaces, durables envers le développement d'applications dans un quelconque secteur de la
technologie, comme l'ingénierie génétique, alors que dans les conditions adéquates, de nombreuses personnes
pourraient de dévouer corps et âme à une révolution contre le système techno-industriel. Comme nous l'avons
noté dans le paragraphe 132, les réformistes qui tentent de limiter certains aspects de la technologie travaillent
pour éviter des résultats négatifs. Mais les révolutionnaires se battent pour un résultat positif —
l'accomplissement de leurs visées révolutionnaires — et de ce fait oeuvrent plus durement et plus obstinément
que les réformistes.
142. Les réformes sont toujours limitées par la crainte des conséquences douloureuses si les changements sont
trop importants. Mais une fois que la fièvre révolutionnaire s'est emparée d'une société, les gens sont prêts à
supporter des épreuves sans nom pour la réussite de leur révolution. Cela a clairement été le cas pour les
révolutions françaises ou russes. Il est possible que seule une minorité ait été impliquée dans la révolution, mais
cette minorité était assez forte et activiste pour devenir la force dominante de la société. Nous en dirons plus sur
la révolution dans les paragraphes 180-205.
LE CONTRÔLE DU COMPORTEMENT HUMAIN
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143. Depuis le début de la civilisation, les sociétés organisées ont du faire pression sur les êtres humains pour
arriver à fonctionner. Les moyens de pression varient considérablement d'une société à l'autre. Certains sont
physiques (sous-alimentation, travail harassant, pollution de l'environnement), certains sont psychologiques
(bruit, entassement, mise au moule du comportement humain). Dans le passé la nature humaine a été à peu près
contante ou a varié seulement avec une amplitude faible. En conséquence les sociétés n'étaient pas capables de
contraindre les gens au delà d'une certaine limite. Quand cette limite avait été franchie, les choses commençaient
à se gâter : apparaissaient rébellion, crime, corruption, absentéisme, dépression ou d'autres problèmes
psychologiques, taux de mortalité élevé ou de natalité faible, et ainsi de suite, ce qui fait que soit cette société
s'effondrait, soit elle déclinait et (plus ou moins rapidement, par la conquête, l'usure, ou une évolution) était
remplacée par une autre, plus efficace.25
144. Ainsi, dans le passé, la nature humaine avait mis certaines limites au développement des sociétés. Les gens
ne pouvaient être contraints indéfiniment. Mais aujourd'hui, les choses ont changé, car la technologie propose
des moyens de changer les êtres humais.
145. Imaginons une société qui soumette les individus à des conditions qui les minent psychologiquement, mais
qui leur fournit des drogues pour remonter leur moral. Science fiction ? Cela arrive de nos jours dans une large
mesure au sein de notre société. Il est bien connu que les cas de dépression nerveuse ont considérablement
augmenté ces dernières décades. Nous pensons que cela est du à l'effritement du processus de pouvoir ainsi que
nous l'avons expliqué aux paragraphes 59-76. Mais même si nous nous trompons, il est évident que
l'augmentation des cas de dépression provient de CERTAINES conditions existantes dans notre société. Au lieu
de faire disparaître les conditions dépressiogènes, la société moderne leur fournit des antidépresseurs. En effet,
ces substances permettent de modifier le comportement d'un individu de façon à ce qu'il tolère des conditions qui
ne supporteraient pas autrement (certes nous savons que la dépression est parfois d'origine génétique, nous nous
référons ici au cas où l'environnement joue un rôle prépondérant).
146. Les substances psychotropes ne sont qu'un des exemples de contrôle du comportement humain. Voyons les
autres.
147. D'abord, il y a les techniques de surveillance. Des caméras dissimulées sont employées dans la plupart des
magasins, et dans bien d'autres endroits, les ordinateurs sont utilisés pour collecter et traiter d'énormes quantités
de données sur chaque individu. Les informations ainsi obtenues augmentent de manière considérable l'efficacité
des moyens de coercition physique26. Enfin, il y a les méthodes de propagande, dont les mass media sont les
vecteurs les plus efficaces. Des techniques efficaces ont été mises au point pour gagner les élections, vendre des
produits, influencer l'opinion publique. L'industrie du « divertissement » [entertainment] est un important outil
psychologique du système, peut-être même lorsqu'il déverse des flots de sexe et de violence. Le
« divertissement » offre à l'homme moderne parmi les meilleurs moyens d'évasion. Tant qu'il est absorbé par la
télévision, les vidéos, etc., il peut oublier le stress, l'angoisse, la frustration, l'insatisfaction. La plupart des
hommes primitifs, lorsqu'ils ne travaillaient pas, étaient satisfaits de rester assis à ne rien faire, car ils étaient en
paix avec eux-mêmes et avec le monde. Mais la plupart des hommes modernes doivent être occupés ou divertis,
sans quoi ils s'ennuient, c.a.d ils deviennent nerveux, instables, irritables.
148. D'autres techniques sont encore plus sournoises que les précédentes. L'éducation n'est plus simplement une
affaire de fessée quand l'enfant ne connaît pas sa leçon ou de récompenses quand il la sait. C'est devenu une
technique scientifique pour contrôler le développement des enfants. Les centres d'éducation Sylvan, par exemple,
ont eu un grand succès en motivant les élèves pour leurs études, et des techniques psychologiques sont aussi
utilisées avec plus ou moins de réussite dans les écoles traditionnelles. Les techniques « parentales » que l'on
enseigne aux parents sont destinées à faire accepter aux enfants les valeurs fondamentales du système et à rester
sur les voies qui lui sont utiles. Les programmes de « santé mentale », les techniques « d'intervention », la
psychothérapie, et autres sont présentées comme étant bénéfiques pour l'individu, mais en pratique ne sont que
des méthodes visant à contraindre les individus à penser et à se comporter comme le système le désire (Il n'y a
aucune contradiction ; un individu dont le comportement ou les actions entrent en conflit avec le système se
trouve face à face avec une puissance bien trop forte pour lui permettre de s'imposer ou de fuir, ce qui fait qu'il
souffre alors de stress, de frustration, de sentiment d'impuissance. Sa vie de tous les jours sera bien plus facile s'il
fait ce que le système attend de lui. Ainsi, le système travaille pour le bien des individus en leur lavant le cerveau
pour s'assurer de leur conformisme). Les brutalités contre les enfants sous leurs formes « évidentes » sont
condamnées par la majorité, si ce n'est toutes les cultures. Tourmenter un enfant, pour une raison donnée ou sans
raison, est quelque chose qui répugne à presque tout le monde. Mais beaucoup de psychologues interprètent le
terme de « brutalité » de manière beaucoup plus large. Est-ce qu'une fessée, quand elle est autorisée par un
système d'éducation cohérent et rationnel, doit être considérée comme une brutalité ? La question ne peut-être
résolue qu'en considérant qu'une fessée est un bon moyen ou non pour permettre à une personne de s'insérer
convenablement dans une société donnée. En pratique, le mot « brutalité » tend à être interprété comme tout
moyen de « dressage » des enfants qui génère des comportements nuisibles au système. Ainsi, lorsqu'ils veulent
s'en prendre à la cruauté brute, sans motif, les programmes pour prévenir la brutalité contre les enfants, sont dans
la ligne du système.
149. Il est probable que la recherche continuera pour augmenter l'efficience des techniques psychologiques pour
contrôler le comportement humain. Mais nous pensons que les techniques psychologiques seules sont
insuffisantes pour adapter les êtres humains au type de société que secrète la technologie. Des méthodes
biologiques seront certainement utilisées. Nous avons déjà fait mention des médicaments. La neurologie peut
fournir d'autres voies pour modifier l'esprit humain. L'ingénierie génétique est déjà en train de se mettre en place
sous la forme du « soin génétique », et il n'y a pas de raison de penser que de telles méthodes ne seront pas
utilisées pour modifier le corps de façon à affecter le fonctionnement mental.
150. Comme nous l'avons mentionné au paragraphe 134, la société industrielle semble devoir entrer dans une
période de turbulences, due en partie aux problèmes du comportement humain, et aussi à ceux de l'économie et
de l'environnement. Et une large part des problèmes économiques et environnementaux du système provient de
la façon dont se comportent les êtres humains. L'aliénation, la faible estime de soi, la dépression, l'hostilité, la
rébellion ; les enfants qui ne veulent pas étudier, les gangs de jeunes, la consommation de drogue, les viols, les
sévices à l'encontre des enfants, les autres délits, le sexe unsafe, les grossesses chez les adolescentes, la
surpopulation, la corruption de la classe politique, la haine raciale, les rivalités ethniques, les conflits
idéologiques aigus (pour ou contre l'avortement, par exemple), l'extrémisme politique, le terrorisme, le sabotage,
les groupes anti-gouvernementaux ou anti-sociaux. Tout cela constitue une menace pour la survie du système. Il
va être FORCE de prendre des mesures efficaces pour contrôler le comportement humain.
151. La décomposition sociale que nous observons à l'heure actuelle n'est certainement pas due à la malchance.
Elle ne peut être due qu'aux conditions de vie que le système impose aux gens.(nous avons souligné que la plus
importante de ces conditions est la destruction du processus de pouvoir). Si le système réussit à imposer un
contrôle suffisant pour contrôler le comportement humain de façon à assurer sa propre survie, un nouveau seuil
de l'histoire aura été franchi. Puisque, en gros, les limites de l'endurance humaine ont été celles du
développement social (comme nous l'avons expliqué aux paragraphes 143, 144), la société techno-industrielle
devra dépasser ces limites en modifiant les êtres humains, que ce soit par des moyens psychologiques ou
biologiques, ou les deux. Dans le futur, le social ne s'adaptera pas aux besoins des individus, mais ces derniers
s'ajusteront pour répondre aux demandes du système.27
152. De manière générale, le contrôle technologique sur le comportement humain n'est pas le produit d'un
totalitarisme conscient ou même pour ouvertement restreindre les libertés28. Chaque pas sur le chemin de la prise
de contrôle de l'esprit humain a été pensé comme une réponse rationnelle à un problème qui se posait à une
société, comme limiter l'alcoolisme, réduire la criminalité ou inciter la jeunesse à s'engager dans des études
techno-scientifiques. Dans beaucoup de cas, des justifications humanitaires ont pu être mises en avant. Par
exemple, quand un psychiatre prescrit un antidépresseur, il vient en aide à un patient souffrant. Il semblerait
inhumain de priver de médicaments quelqu'un qui en a besoin. Quand des parents envoient leurs enfants aux
centres d'éducation Sylvan de façon à ce qu'ils soient manipulés pour s'aliéner dans leurs études, ils le font pour
assurer un avenir à leur progéniture. Peut-être que certains de ces parents espèrent que personne n'a besoin de
suivre un apprentissage dégradant pour obtenir un job, et que leur enfant ne subira pas un lavage de cerveau pour
devenir un demeuré de l'ordinateur. Mais que peuvent-ils faire ? Ils ne peuvent changer la société, et leurs
enfants seront chômeurs s'ils n'acquièrent pas certaines capacités. Alors ils les envoient à Sylvan.
153. Ainsi, le contrôle du comportement humain se fera non pas du fait d'une décision calculée des autorités,
mais au fur et à mesure d'une évolution sociale (une évolution RAPIDE, toutefois). Il sera impossible de lui
résister, car chaque étape, considérée en elle-même, apparaîtra comme bénéfique, à plus ou moins long terme, ou
du moins, le mal créé par cette avancée semblera moindre que celui qui aurait été produit si elle n'avait pas eu
lieu (voir paragraphe 127). La propagande par exemple sert pour de bonnes causes, comme s'opposer aux
mauvais traitements contre les enfants ou la haine raciale. L'éducation sexuelle est évidemment utile, mais son
effet (du moins dans sa partie positive) est de faire se modeler les comportements sexuels hors de la famille pour
qu'ils le soient par les mains de l'état, par le biais du système scolaire.
154. Supposons qu'on découvre un « gène de la criminalité » et qu'on ait aussi le moyen de prévenir cela29.
Evidemment les parents des enfants « atteints » seront soumis à cette thérapie. Il serait inhumain de procéder
autrement et de laisser l'enfant grandir pour finir comme un misérable criminel. Mais beaucoup, si ce n'est la
plupart des sociétés primitives avaient une faible criminalité en comparaison de la nôtre, même si elles n'avaient
aucun moyen sophistiqué de suivi des enfants, ni de systèmes élaborés de répression. Comme il n'y a pas de
raison de supposer que l'homme moderne ait plus de dispositions innées que son ancêtre pour le mal, notre forte
criminalité doit être due à la pression que la modernité fait peser sur les gens, dont beaucoup ne peuvent, ni ne
pourront s'adapter. Ainsi un traitement pour annihiler des dispositions criminelles potentielles est, au moins en
partie, un moyen de reformater les gens pour qu'ils soient « aptes » au système.
155. Notre société a tendance à regarder comme une « maladie » quelque mode de pensée ou quelque
comportement qui n'est pas conforme, et il est plausible qu'un individu qui ne s'adaptera pas souffrira en même
temps qu'il posera des problèmes au système. De cette façon, toutes les formes de manipulations à l'encontre des
individus sont perçues comme un « traitement » contre une « maladie », et donc comme un bien.
156. Dans le paragraphe 127, nous avons souligné que l'utilisation d'un nouvel objet technologique est
INITIALEMENT optionnelle, mais qu'elle ne le reste pas car cette nouvelle technologie tend à changer la société
de façon à ce qu'il devienne difficile ou impossible pour un individu de se passer de cette technologie. Ceci
s'applique aussi à la technologie du contrôle humain. Dans un système où la majorité des enfants sont
programmés pour se passionner pour leurs études, un parent sera obligé de faire passer son enfant par un tel
chemin, parce qu'il ne peut faire autrement, sans quoi, son enfant deviendra, par comparaison, un ignorant et, à
terme, un chômeur. Ou supposons qu'on trouve un moyen de réduire le stress dont souffrent la plupart des gens,
et ce sans effets indésirables. Si la majorité se soumet au traitement, le niveau général de stress s'en trouvera
effectivement amoindri et le système pourra relever le niveau de stress induit en conséquence. En fait, un moyen
de réduction du stress existe déjà : le divertissement de masse (voir paragraphe 147). Son utilisation est
« optionnelle » : aucune loi ne nous oblige à regarder la télévision, écouter la radio ou lire les magazines. Mais le
divertissement de masse est un moyen de réduire le stress et de s'évader dont beaucoup sont devenus dépendants.
Tout le monde se plaint de la nullité de la télévision, mais presque tout le monde la regarde. Quelques uns se sont
débarrassés de l'accoutumance à la télévision, mais ils sont rares ceux qui parviennent à vivre aujourd'hui sans
user d'AUCUNE forme du divertissement de masse (jusqu'à récemment, la plupart des gens se satisfaisaient de
ce qu'ils trouvaient dans leur entourage proche). Sans l'industrie du spectacle, le système n'aurait pas été capable
de nous contraindre à un tel stress que celui que nous subissons.
157. En supposant que la société techno-industrielle survive, il est hautement probable que la technologie
acquerra un contrôle presque absolu sur le comportement humain. Il a été établi, sans le moindre doute, que la
pensée et le comportement humain ont un fondement majoritairement biologique. Comme l'ont démontré de
nombreuses expériences, des sentiments comme la colère, le plaisir, la faim et la peur peuvent être activées ou
désactivées grâce à des stimuli électriques sur les parties appropriées du cerveau. De même pour la mémoire.
Des drogues peuvent provoquer des hallucinations ou simplement changer l'humeur. Il peut exister ou non une
âme immatérielle, mais il est clair qu'elle a moins de force que les mécanismes biologiques. Si ce n'était pas le
cas, les chercheurs n'arriveraient pas si facilement à contrôler les pensées et comportements humains par des
moyens chimiques ou électriques.
158. Il est probable qu'il sera difficile de placer des électrodes dans la tête des gens de façon à pouvoir les
contrôler. Mais le fait que les sentiments et pensées humaines soient si ouverts aux interventions biologiques
montre que le problème du contrôle de l'humain relève essentiellement du domaine technologique ; un
« simple » problème de neurones, d'hormones, et de molécules complexes ; le genre de problème parfaitement
solvable de manière scientifique. En gardant en tête cette obsession de notre société pour le contrôle social, on
peut pronostiquer sans le moindre risque que de grandes avancées dans ce domaine ne vont pas tarder à être
faites.
159. Est ce que la résistance populaire empêchera le contrôle technologique du comportement humain ? Ce serait
le cas si l'on tentait d'imposer un tel contrôle d'un coup. Mais comme ce dernier s'insinuera progressivement, il
n'y aura aucune résistance au bout du compte (voir paragraphes 127, 132, 153).
160. A ceux qui pensent que tout cela relève de la science-fiction, nous ferons remarquer que la science-fiction
d'hier est devenue la réalité d'aujourd'hui. La révolution industrielle a complètement modifié l'environnement et
le mode de vie de l'homme, et comme on peut s'attendre à ce que la technologie soit appliquée au corps et à
l'esprit humain, l'homme lui-même sera aussi radicalement modifié que l'ont été son environnement et son mode
de vie.
LA RACE HUMAINE À UN CARREFOUR
*******************************************
161. Mais nous sommes allés trop vite dans notre histoire. C'est une chose de développer en laboratoire des
techniques psychologiques et/ou biologiques pour contrôler le comportement humain, c'en est une autre de les
insérer dans un système social. Ce dernier problème est le plus ardu des deux. Par exemple, tandis que des
techniques adéquates fonctionnent sans doute assez bien dans les « écoles labos », il n'est pas forcément évident
de les appliquer à l'ensemble de notre système scolaire. Nous savons tous à quoi ressemblent nos écoles. Les
professeurs sont trop occupés à confisquer les couteaux et les revolvers aux enfants pour pouvoir les soumettre
aux dernières techniques qui les transformeront en « pc-zombies ». Ainsi, malgré son avance théorique dans le
domaine des techniques de contrôle comportemental, le système n'a pas vraiment été victorieux dans sa croisade
pour le contrôle effectif de l'homme. Les gens dont le comportement est globalement celui qu'on lui a inculqué
sont ceux qu'on pourrait appeler des « bourgeois ». Mais il y a un nombre croissant de gens qui d'une manière ou
d'une autre se comportent en rebelles : laissés pour compte, jeunes des gangs, satanistes, nazis, écologistes
radicaux, miliciens, etc.
162. Le système est actuellement engagé dans un combat désespéré pour résoudre des problèmes qui le
menacent, parmi lesquels celui du contrôle comportemental est le plus important. Si le système réussit assez
rapidement dans son entreprise de contrôle du comportement humain, il pourra probablement survivre. Nous
pensons que cela pourrait se faire d'ici quelques décades, disons 40 à 100 ans.
163. Supposons que le système survive à la crise des prochaines décades. Il devra donc avoir résolu, ou du moins
maîtrisé, les principaux problèmes, particulièrement celui de « socialiser » les êtres humains. ; c.a.d avoir rendu
les gens suffisamment dociles pour qu'ils ne constituent plus une menace. Ceci fait, il apparaît qu'il ne pourra
plus y avoir aucun obstacle au développement sans frein de la technologie, et sa conclusion logique qui est le
contrôle absolu de tout ce qui vit sur terre, y compris les hommes et les animaux supérieurs. Le système pourra
devenir une organisation monolithique ou un ensemble de conglomérats coexistants dans un mélange de
coopération et de compétition, comme actuellement le gouvernements, les trusts, et autres groupes de pression.
La liberté humaine sera pratiquement anéantie, car l'individu ou les petits groupes seront impuissants contre les
gigantesques organisations disposant de moyens hi-tech et d'un arsenal de moyens psychologiques et biologiques
pour manipuler les êtres humains, en plus des outils de surveillance et de coercition proprement dite. Seul un
nombre limité de gens auront un pouvoir réel, et même ceux-ci n'auront qu'une liberté limitée, car leur
comportement sera par trop régulé, comme de nos jours nos politiciens ou nos dirigeants de multinationales.
164. Ne nous imaginons pas que le système s'arrêtera de développer des moyens de contrôle comportemental une
fois la crise des prochaines décades achevée, et qu'un contrôle croissant ne sera plus nécessaire à sa survie. Au
contraire, une fois la période difficile passée, le système augmentera sa puissance de contrôle encore plus vite,
car il ne sera plus freiné par ce que nous connaissons actuellement. La survie n'est pas la seule motivation pour
étendre son pouvoir. Comme nous l'avons expliqué aux paragraphes 87-90, les techniciens et les scientifiques
vivent leur travail comme une activité compensatrice ; c.-à-d qu'ils satisfont leur besoin de pouvoir en résolvant
des problèmes techniques. Il continueront donc à le faire avec un enthousiasme intact, et parmi les problèmes les
plus « exaltants » à résoudre, se trouveront les « comment » du corps et de l'esprit humain, et la manière de s'y
immiscer. Pour « le bien de l'humanité », bien entendu.
165. Mais d'un autre côté, supposons que la lutte des prochaines décades s'avère trop forte pour le système. S'il
s'effondre, il y aura certainement une période de chaos, une « ère de troubles » comme l'histoire en a déjà
enregistrées dans le passé. Il est impossible de prédire ce qui émergera de cette période troublée, mais la race
humaine n'aura pas d'autre chance. Le plus grand danger serait que la société industrielle se reconstitue peu à peu
après l'effondrement. Il y a certainement de nombreuses personnes (avides de pouvoir tout particulièrement) qui
seront pressés de voir les usines fonctionner de nouveau.
166. Par conséquent, ceux qui haïssent la servitude qu'impose le système s'attelleront à deux tâches.
Premièrement, ils doivent maintenir une tension sociale de façon à affaiblir le système pour que la révolution
devienne possible. Deuxièmement, il est nécessaire de développer et de propager une idéologie qui s'oppose à la
propagande techno-industrielle et qui permettra de l'éradiquer à jamais. Les usines doivent être détruites, les
livres techniques brûlés, etc.
LA SOUFFRANCE DE L'HOMME
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167. Le système techno-industriel ne s'effondrera pas simplement du fait d'une révolution. Il n'y sera vulnérable
que si ses propres problèmes de développement interne l'ont conduit à de graves dysfonctionnements. Ainsi, si le
système s'écroule, il le fera soit spontanément, soit suivant un processus en partie spontané, mais avec l'aide de
révolutionnaires. Si la chute est soudaine, de nombreuses personnes mourront, puisque démographiquement
parlant, ils ne peuvent plus être nourris que par le biais de la technologie avancée. Même si l'effondrement est
suffisamment graduel pour que la réduction de la population se fasse plutôt par le déclin du taux de natalité que
par celui du taux de mortalité, le processus de désindustrialisation sera certainement extrêmement chaotique et
entraînera de nombreuses souffrances. Il est naïf de croire que la technologie peut-être éliminée par phases
graduelles de manière contrôlée, tout particulièrement parce que les technophiles se battront avec acharnement à
chaque étape. En conséquence, n'y a-t-il pas de la cruauté à vouloir la fin du système ? Peut-être que oui, peutêtre
que non. Tout d'abord, les révolutionnaires ne seront capables d'abattre le système que s'il se trouve empêtré
dans de graves problèmes tels qu'il est probable qu'il se disloque de lui-même. Et plus le système devient
omnipotent, plus désastreuses seront les conséquences de son effondrement. Ainsi, il est possible qu'en hâtant la
chute, les révolutionnaires réduisent l'étendue des dégâts.
168. Deuxièmement, il faut mettre en balance la mort/la faim et la perte de liberté/dignité. Pour beaucoup d'entre
nous, le liberté et la dignité sont plus importantes qu'une longue vie exempte de douleur physique. De surcroît,
nous mourrons tous un jour, et il peut-être préférable de mourir pour sa survie ou pour une cause que de vivre
une vie longue mais vide et sans but.
169. En troisième lieu, il n'est pas du tout certain que la survie du système conduise à moins de souffrance que
son effondrement. Le système à déjà causé et continue à causer une immense souffrance partout dans le monde.
Les cultures traditionnelles, qui pendant des siècles ont assuré un équilibre entre les individus et leur
environnement, ont été laminées au contact de la société industrielle, et le résultat à été un immense champ de
problèmes économiques, sociaux, environnementaux et psychologiques. Un des effets de l'intrusion de la société
industrielle a été que les moyens traditionnels de contrôle de la population ont été anéantis. D'où une explosion
démographique, avec tout ce que cela implique. De plus, il faut tenir compte de la souffrance psychologique qui
s'étend sur les pays occidentaux, supposés fortunés (voir paragraphes 44, 45). Personne ne sait ce qu'il résultera
de la disparition de la couche d'ozone, de l'effet de serre, et autres problèmes environnementaux qui ne sont pas
encore visibles. Et comme la prolifération nucléaire l'a montré, la technologie ne peut être tenue hors des mains
des dictateurs irresponsables du Tiers-Monde. Avez vous envie de spéculer sur ce que l'Irak ou la Corée du nord
feront de l'ingénierie génétique ?
170. « Oh », disent les technophiles, « la science va arranger tout cela ! Nous allons éradiquer la famine, éliminer
la souffrance psychologique, rendre tout le monde heureux et en bonne santé ! » C'est ça… C'est ce qu'ils
disaient il y a deux cent ans. La Révolution Industrielle était censée éliminer la pauvreté, répandre le bonheur,
etc. On est loin du compte. Les technophiles sont désespérément naïfs (ou décevants) en ce qui concerne la
compréhension des problèmes sociaux. Il sont incapables de comprendre (ou feignent de l'être) que de grands
changements au sein d'une société, même s'ils semblent bénéfiques, conduisent à une chaîne d'autres
changements, dont la plupart sont impossibles à prévoir (paragraphe 103). Le résultat en est la désagrégation de
la société. Ainsi, il est probable que dans leurs tentatives pour mettre un terme à la pauvreté et à la maladie,
rendre les personnalités dociles, heureuses, et ainsi de suite, les technophiles créeront des systèmes sociaux
extrêmement troublés, peut-être plus qu'actuellement. Par exemple, les scientifiques se vantent de pouvoir
combattre la famine en créant génétiquement de nouvelles plantes. Mais ceci permettra à la population humaine
de continuer à s'accroître indéfiniment, et il est bien connu que la surpopulation conduit à une augmentation de
stress et d'agressivité. C'est au moins un exemple de problème PREVISIBLE qui pourrait advenir. Nous pouvons
en inférer que, comme l'a montré le passé, le progrès technique amène de nouveaux problèmes bien plus vite que
les anciens ne peuvent être résolus. Ainsi, une longue et pénible période d'ajustements sera nécessaire aux
technophiles pour débarrasser leur Meilleur Des Mondes de ses bugs (s'ils s'y arrivent). Dans le même temps la
souffrance s'accroîtra. Il n'est donc pas certain du tout que de la survie de la société industrielle résultera moins
de douleurs que de son effondrement. La technologie a placé la race humaine à un endroit d'où il n'est pas facile
de trouver une issue facile.
L'AVENIR
************
171. Mais supposons maintenant que la société industrielle survive aux prochaines décades, et que les bugs
soient éliminés, de façon à ce que le système fonctionne sans heurts. Quelle en sera sa nature ? Nous
envisagerons plusieurs possibilités.
172. Tout d'abord supposons que les ordinateurs soient devenus des machines telles qu'elles peuvent faire tout ce
que fait un homme, en mieux. Dans ce cas, vraisemblablement, tout travail sera fait par d'immenses systèmes de
machines hautement organisées et aucun effort humain ne sera plus nécessaire. Dans ce cas, de deux choses
l'une. Ou les machines opèrent sans aucun contrôle humain ou ce dernier a encore un droit de regard.
173. Si les machines sont complètement autonomes, nous ne pouvons faire aucune conjecture quant aux
résultats, car il est impossible de savoir comment de telles machines se comporteront. Nous voulons juste
signaler que le destin de la race humaine sera à la merci des machines. On rétorquera que la race humaine ne sera
jamais assez folle pour laisser tout le pouvoir aux machines. Mais nous ne voulons pas dire que la race humaine
abandonnera volontairement sa destinée aux machines, ni que ces dernières deviendront omnipotentes de leur
propre chef. Ce que nous suggérons, c'est que la race humaine pourrait facilement se mettre dans une position de
dépendance telle qu'il n'y aurait pas d'autre choix que d'accepter toutes les décisions des machines. Comme la
société et les problèmes auxquels elle est confrontée deviennent de plus en plus complexes, et, que dans le même
temps, les machines deviennent de plus en plus intelligentes, les gens laisseront les machines prendre les
décisions à leur place, pour la simple raison que les résultats fournis par les machines seront meilleurs que ceux
qu'aurait pu fournir un homme. Eventuellement, un niveau pourra être atteint où les décisions à prendre pour
maintenir le système à flot deviendront tellement complexes que les êtres humains seront incapables de le faire.
A ce moment là, les machines auront le pouvoir effectif. Les gens ne seront plus capables d'arrêter les machines,
car ils en seront trop dépendants pour risquer un suicide.
174. D'un autre côté, il est possible que le contrôle humain sur les machines puisse être maintenu. Dans ce cas,
l'homme moyen pourra contrôler certaines machines domestiques, comme sa voiture ou son ordinateur familial,
mais le contrôle des gros complexes cybernétiques sera entre les mains d'une élite très réduite — comme
maintenant, mais avec deux différences. Du fait du perfectionnement des techniques, l'élite aura un bien plus
grand contrôle sur les masses, et comme le travail humain sera devenu inutile, les masses deviendront superflues,
un fardeau encombrant pour le système. Si l'élite est sans pitié, elle peut simplement décider d'exterminer la plus
grande partie de l'humanité. Si elle est humaine, elle peut user de propagande ou de techniques biopsychologiques
pour réduire le taux de natalité, jusqu'à extinction des désoeuvrés, laissant ainsi le monde à l'élite
seule. Ou, si l'élite est constituée de libéraux « au coeur tendre », elle peut décider de jouer le rôle du bon berger
pour le reste de la population. Elle fera en sorte que les besoins physiques de chacun soient satisfaits, que les
enfants soient éduqués dans de bonnes conditions d'hygiène mentale, que tout le monde ait un hobby prenant
pour pouvoir s'occuper, et que celui qui devienne insatisfait se soumette au « traitement » qui le guérira de sa
« maladie ». Evidemment, une tel vie sera tellement vide de sens que les gens devront avoir été formatés
biologiquement ou psychologiquement pour éradiquer leur besoin de processus de pouvoir ou pour le
« sublimer » au travers de quelques activités sans danger. Ces êtres humains standardisés seront peut-être
heureux dans une telle société, mais il ne seront certainement pas libres. Ils auront été réduits au rang d'animaux
domestiques.
175. Mais supposons maintenant que les informaticiens n'arrivent pas à développer une intelligence artificielle
digne de ce nom, ce qui rendra le travail humain encore nécessaire. Même ainsi, Les machines prendront à leur
compte la majorité des travaux les plus simples, ce qui entraînera un accroissement des travailleurs à faible
qualification inemployés (C'est ce qui arrive actuellement. Beaucoup de gens ne trouve pas de travail ou avec les
plus grandes difficultés, parce que pour des raisons intellectuelles ou psychologiques, ils ne peuvent acquérir le
niveau de compétences requis pour se rendre utiles pour le système). Ceux qui travaillent sont soumis à des
pressions croissantes ; ils auront besoin de plus en plus de stages, de plus en plus de compétences diverses et
pointues, et devront même se montrer encore plus efficaces, conformes et dociles, car ils ne seront désormais
rien de plus que des cellules dans un organisme géant. Leurs tâches deviendront extrêmement spécialisées ce qui
fait que leur travail sera, en un sens, déconnecté du monde réel, puisqu'ils seront polarisés sur un infiniment petit
de la réalité. Le système utilisera tous les moyens dont il dispose (psychologiques/biologiques) pour formater les
gens, les rendre dociles, pour qu'ils acquièrent les compétences dont le système a besoin et qu'ils « subliment »
leur besoin de pouvoir au travers des tâches qui leur seront dévolues. Mais le fait que les gens d'une telle société
devront être dociles requière certaines capacités. La société peut trouver l'esprit de compétition utile, fournissant
à ceux qui ne vivent que pour la compétition des filières qui serviront les intérêts du système. Nous pouvons
imaginer le « dedans » de ces filières. Nous pouvons imaginer une société à venir dans laquelle n'existeront que
des compétitions sans fin pour le pouvoir et/ou le prestige. Mais très peu de gens arriveront au sommet, là où se
trouve le véritable pouvoir (voir la fin du paragraphe 163). Une société où une personne peut satisfaire son désir
de pouvoir en écrasant toutes les autres sur son passage, les privant ainsi de LEURS opportunités de pouvoir, une
telle société serait répugnante.
176. On peut encore envisager d'autres scénarios à partir des diverses possibilités dont nous venons de discuter.
Par exemple, il est possible que les machines s'emparent du travail vraiment important, vital, tandis que les
hommes ne se consacrent qu'à des tâches secondaires. On a suggéré, par exemple, que le développement de
l'industrie des services procurerait des emplois à beaucoup de personnes. Ainsi les gens passeraient leur temps à
cirer les chaussures des autres, à conduire autour des stations de taxis, à faire des paquets cadeaux, etc. Cela nous
parait une manière de finir des plus méprisables pour la race humaine, et nous doutons que beaucoup de
personnes s'épanouiront dans de telles activités ineptes. Ils voudront chercher d'autres, de plus dangereuses
alternatives (drogues, criminalité, cultes, « hate groups ») sauf s'ils sont psychologiquement ou biologiquement
formatés pour s'adapter à une pareille vie.
177. Inutile de le dire, les scénarios développés plus haut ne sont pas exhaustifs. Ils indiquent seulement les
possibilités qui nous paraissent les plus probables. Mais nous ne pouvons en envisager de plus agréables. Il est
extrêmement probable que si le système techno-industriel survit aux 40 à 100 années à venir, il aura dans
l'intervalle développé certaines caractéristiques : Les individus (au moins les « bourgeois », qui sont bien
intégrés dans le système et le font tourner, et qui de ce fait détiennent le pouvoir) seront dépendants comme
jamais des grandes superstructures ; ils seront « socialisés » à outrance et leur capacités mentales et physiques
pour une grande part (pour la plus grande part, probablement) seront celles pour lesquelles ils auront été
formatés et ne seront pas dues à la chance (ou à la volonté de Dieu, si on veut) ; et ce qu'il pourra rester de nature
sauvage sera réduit à des lambeaux préservés pour l'étude scientifique et gardés sous le contrôle des scientifiques
(et, ainsi, il n'y aura plus rien de sauvage). Dans longtemps (disons dans quelques siècles), il est probable que ni
l'homme, ni les organismes supérieurs n'existeront sous la forme que nous leur connaissons maintenant, car à
partir du moment où vous commencez à modifier des espèces à l'aide de l'ingénierie génétique, il n'y a pas de
raisons de s'arrêter en si bon chemin, et, donc, les transformations continueront jusqu'à ce que plus rien ne soit
reconnaissable.
178. Quoi qu'il en soit, il est certain que la technologie est en train de créer pour l'homme un environnement
physique et social radicalement différent de tous ceux auxquels la sélection naturelle avait adapté la race
humaine physiquement et psychologiquement. Si l'homme ne s'adapte pas à ce nouvel environnement en étant
artificiellement formaté, alors, il s'y adaptera au long d'un douloureux processus de sélection naturelle. Ce
dernier cas est de loin plus probable que le précédent.
179. Il serait préférable de jeter aux ordures tout ce système puant et d'en assumer les conséquences.
STRATÉGIE
************
180. Les technophiles nous embarquent tous pour un bond d'une rare inconscience dans l'inconnu. La plupart des
gens qui comprennent quelque peu ce que le progrès technologique est en train de nous faire n'en adoptent pas
moins une attitude passive car ils pensent que tout cela est inévitable. Mais nous (FC) ne sommes pas de cet avis.
Nous pensons que cela peut être arrêté, et nous donnerons ici certaines indications pour ce faire.
181. Comme nous l'avons établi au paragraphe 166, les deux tâches à mettre en oeuvre sont : l'augmentation du
stress et de l'instabilité sociale et le développement et la propagation d'une idéologie qui s'oppose à celle
dispensée par le système techno-industriel. Quand le système deviendra suffisamment instable et soumis à de
rudes pressions, une révolution contre la technologie deviendra possible. Les sociétés russes et françaises,
plusieurs décades avant leurs révolutions respectives, avaient montré des signes croissants de tensions et de
faiblesse. Dans le même temps, des idéologies étaient développées qui offraient une vue du monde radicalement
différentes de l'ancienne. Dans le cas russe, les révolutionnaires travaillaient activement à saper les fondements
de l'ordre ancien. Ainsi, lorsque le système fut soumis à des rudes pressions (crise financière en France, défaites
militaires en Russie), il fut balayé par la révolution. C'est ce que nous allons proposer dans cet esprit.
182. On pourrait objecter que les révolutions Russes et Françaises furent des échecs. Mais la plupart des
révolutions ont deux buts. L'un est de détruire une forme obsolète de société, et l'autre est de mettre en place une
nouvelle société selon les voeux des révolutionnaires. Les révolutions Françaises et Russes échouèrent
(heureusement !) à créer la nouvelle société qui avait été rêvée, mais elle furent victorieuses pour ce qui est de la
destruction de l'ordre ancien.
183. Mais une idéologie, si elle veut bénéficier d'un soutien enthousiaste, doit avoir des idéaux positifs tout
autant que négatifs ; il faut être POUR quelque chose tout autant que CONTRE autre chose. L'idéal que nous
proposons est la Nature. C'est à dire la nature VIERGE ; tout ce qui vit et se développe sur Terre en dehors de
toute interférence et contrôle humain. Et avec la nature vierge, nous incluons la nature humaine, c.a.d ces aspects
du comportement humain qui ne sont pas sujet aux régulations d'une société organisée, mais dus à la chance, au
hasard, ou à Dieu (selon vos croyances ou opinions philosophiques).
184. La Nature fournit un contre-idéal parfait à la technologie pour plusieurs raisons. La nature (qui est en
dehors du pouvoir du système) est à l'opposé de la technologie (qui cherche à accroître indéfiniment le pouvoir
du système). La plupart des gens estiment que la Nature est belle ; elle bénéficie certainement d'un très fort
attrait populaire. Les écologistes radicaux ont DEJA une idéologie qui exalte la nature et s'oppose à la
technologie30. Il n'est pas nécessaire dans l'intérêt de la nature de mettre en oeuvre des utopies chimériques ou un
quelconque ordre social nouveau. La nature s'occupe très bien d'elle-même : c'est une création qui a existé
longtemps avant que l'homme n'apparaisse, et durant des millénaires différents types de sociétés humaines ont
coexisté avec la nature sans lui infliger de sérieux dommages. Ce ne fut qu'avec la Révolution Industrielle que
les effets de la société contre la nature s'avèrent désastreux. Pour lever la pression sur la nature, il n'est pas
nécessaire de créer un nouveau type de rapports sociaux, il suffit de se débarrasser de la société technologique.
Nous vous accordons que cela ne résoudra pas tous les problèmes. La société techno-industrielle a déjà fait des
dégâts considérables à la nature, et la convalescence sera longue. D'un autre côté, même les sociétés
préindustrielles ont pu faire des dommages significatifs à la nature. Quoiqu'il en soit, se débarrasser de la société
industrielle sera en soit un grand acte. Cela débarrassera la nature de la majorité de ses tourments, et lui
permettra de panser ses plaies. Cela nous débarrassera de la capacité de la société organisée d'accroître son
contrôle sur la nature (nature humaine comprise). Quelque soit le type de société qui existera après la disparition
du système industriel, il est certain que la plupart des gens vivront près de la nature, car en l'absence de
technologie avancée, il n'y a pas D'AUTRE moyen pour les gens de vivre. Pour se nourrir, ils devront être
paysans ou bergers ou pêcheurs ou chasseurs, etc. Et, de manière générale, l'autonomie locale aura tendance à
accroître, puisque l'absence de technologie avancée et de communications rapides limitera la capacité des
gouvernements ou autres grandes organisations à contrôler les communautés locales.
185. Comme conséquences négatives de l'élimination de la société industrielle — eh bien, nous ne serons plus
des coqs en pâte, ni quoi que ce soit d'approchant. Pour obtenir une chose, vous devez en sacrifier une autre.
186. La plupart des gens détestent les problèmes psychologiques. Pour cette raison, ils évitent les réflexions
profondes à propos des problèmes sociaux, et préfèrent qu'on leur fournissent des options simples,
manichéennes : CECI est totalement bon, et CELA totalement mauvais. L'idéologie révolutionnaire doit en
conséquence être développée sur deux niveaux.
187. Au niveau le plus sophistiqué, l'idéologie doit s'adresser aux gens intelligents, cultivés, et rationnels.
L'objectif doit être de créer un noyau de personnes qui seront opposés au système industriel de façon censée et
réfléchie, capables d'apprécier tous les tenants et aboutissants, et d'assumer le prix à payer pour se débarrasser du
système. Il est particulièrement important d'attirer des gens de la sorte, car ils sont capables et susceptibles d'en
influencer d'autres. On doit s'adresser à ces gens de la manière la plus rationnelle possible. Les faits ne doivent
pas être intentionnellement déformés et un langage émotionnel doit être proscrit. Ceci ne signifie pas qu'on ne
doive pas faire appel à leur sensibilité, mais ce faisant, on ne doit distordre la réalité ou faire quoi que ce soit qui
pourrait détruire la respectabilité intellectuelle de l'idéologie.
188. A un second niveau, l'idéologie doit être propagée sous une forme simplifiée qui doit permettre à la masse
de percevoir le conflit entre la technologie et la nature en des termes dénués de toute ambiguïté. Mais même sur
ce second plan, l'idéologie ne doit pas s'exprimer dans un langage trop pauvre, trop irrationnel ou passionnel qui
pourrait nous aliéner les gens du premier groupe. Une propagande de bas niveau peut parfois apporter
d'impressionnants résultats à court terme, mais il est plus avantageux sur le long terme de conserver la loyauté du
petit noyau « d'intellectuels engagés » que de compter sur les passions d'une foule amorphe dont l'attitude peut
changer si de nouveaux gadgets propagandistes apparaissent. Toutefois, une propagande de bas niveau pourra
s'avérer nécessaire lorsque le système sera sur le point de s'effondrer et qu'il y aura un ultime combat entre
idéologies rivales pour déterminer laquelle deviendra dominante quand la vieille vue du monde aura disparu.
189. Avant ce combat final, les révolutionnaires ne doivent pas espérer avoir la majorité du peuple avec eux.
L'histoire est faite par des minorités agissantes, déterminées, pas par la majorité, qui a rarement une vue claire et
précise de ce qu'elle veut réellement. Avant que ne soit venue l'heure du coup de boutoir final de la révolution31,
la tâche des révolutionnaires sera moins d'avoir l'appui de la majorité que de fonder un noyau de gens
extrêmement décidés.
190. N'importe quel type de conflit social aide à déstabiliser le système, mais on doit être prudent sur le genre de
type de conflit que l'on encourage. Le conflit doit se dessiner entre la masse du peuple et l'élite détentrice du
pouvoir dans la société industrielle (politiciens, scientifiques, hommes d'affaires de haut niveau, etc.). Il ne doit
PAS se dessiner entre les révolutionnaires et le peuple. Par exemple, ce serait de la mauvaise stratégie que de
condamner les américains sur leurs habitudes de consommation. Au lieu de cela, l'américain moyen peut être
représenté comme une victime des industries du marketing et de la publicité, qui le leurre en lui faisant acheter
un tas de cochonneries qu'il ne désire pas et qui sont une piètre consolation à sa perte de liberté. Chaque
approche est cohérente avec les faits. C'est simplement une question d'optique selon que vous condamnez les
industries du marketing et de la publicité, ou que vous condamnez le public pour se laisser ainsi manipuler. Il est
de bonne stratégie de généralement éviter de condamner le public.
191. On doit y réfléchir à deux fois avant d'encourager d'autres conflits sociaux que ceux qui adviennent entre la
techno-élite et la masse. D'une part, les autres conflits tendent à distraire l'attention des conflits primordiaux
(entre la techno-élite et la masse, entre la technologie et la nature) ; d'autre part, les autres conflits peuvent
actuellement tendre à encourager le recours à la technologie, car chacune des parties dans le conflit veut utiliser
ce que peut offrir la technologie de façon à prendre l'ascendant sur son adversaire. C'est ce qu'on voit clairement
dans le cas des rivalités entre nations. Cela apparaît aussi lors de conflits ethniques dans un même pays. Par
exemple, aux Etats-Unis, les leaders noirs sont décidés à favoriser la cause noire en plaçant des noirs au sein de
la techno-élite. Ils veulent qu'il y ait beaucoup de noirs au gouvernement, beaucoup de scientifiques, chefs
d'entreprises noirs, et ainsi de suite. Ce faisant, il aide le système à absorber la culture noire. D'une manière
générale, on ne doit encourager que les conflits sociaux qui rentrent dans le cadre élite/masse ou
technologie/nature.
192. Mais le moyen de décourager les conflits ethniques n'est PAS de militer pour le droit des minorités (voir
paragraphes 21, 29). Au lieu de cela, le révolutionnaire doit mettre en avant que le fait qu'une minorité soit plus
ou moins lésée n'est qu'un problème secondaire. Notre véritable ennemi est le système techno-industriel, et dans
le combat contre le système, les distinctions ethniques n'ont aucune importance.
193. Le type de révolution que nous avons en tête n'implique pas nécessairement une insurrection armée contre
un gouvernement. Elle peut impliquer ou non l'usage de la violence, mais elle ne sera pas une révolution
POLITIQUE. Elle doit se polariser sur l'économie et la technologie, pas sur la politique32.
194. En fait, les révolutionnaires doivent même EVITER tout rapport au politique, de manière légale ou non,
jusqu'à ce que le système soit acculé et ait prouvé aux yeux de presque tous son échec. Supposons par exemple
qu'un parti écologiste ait la majorité au congrès suite à une élection. Pour éviter d'avoir à trahir ou édulcorer leur
propre idéologie, ils devront prendre des mesures drastiques pour passer d'une économie de développement à une
économie de « croissance zéro ». Le résultat apparaîtra désastreux à l'homme moyen : Le chômage grimpera en
flèche, etc. Même si les pires inconvénients peuvent être évités grâce à une habileté surhumaine, les gens devront
tout de même abandonner une partie du confort dont il étaient devenus dépendants. L'insatisfaction augmentera,
le parti écologiste sera discrédité et les révolutionnaires auront subi un sérieux revers. Pour cette raison, les
révolutionnaires ne doivent pas essayer d'acquérir un pouvoir politique jusqu'à ce que le système se soit mis dans
un tel pétrin que n'importe quel échec sera perçu comme provenant intrinsèquement du système lui-même et pas
du fait des révolutionnaires. La révolution contre la technologie devra probablement être une révolution des
outsiders, une révolution venue du bas et non pas du haut.
195. La révolution doit être internationale et à l'échelle de la planète. Elle ne peut être circonscrite dans un cadre
national. Si jamais il est suggéré que les Etats-Unis, par exemple, doivent en finir avec le progrès technologique
et la croissance économique, les gens deviendront hystériques et hurleront que si nous ne sommes pas à la pointe
de la technologie, les japonais le seront. Ces mêmes personnes deviendront comme folles s'il advient que les
japonais vendent plus de voitures que nous (Le nationalisme promeut grandement la technologie). Plus
raisonnablement, on peut avancer que si les pays relativement démocratiques laissent tomber la technologie
tandis que les pays totalitaires comme la Chine, la Corée du nord ou le Vietnam poursuivent sur le chemin du
progrès, les dictateurs risquent de finir par dominer le monde. C'est pourquoi la technologie doit être attaquée
dans tous les pays simultanément, dans la mesure du possible. Bien sur, il n'est pas certain que le système
techno-industriel puisse être détruit approximativement au même instant partout dans le monde, et il est même
concevable que les tentatives de se débarrasser du système puisse amener au contrôle du système par des
dictateurs. C'est un risque à prendre. Et on peut le prendre ; car la différence entre un système techno-industriel
« démocratique » et un contrôlé par des dictateurs est infiniment moindre que celle entre un système technoindustriel
et un qui ne l'est pas33. On peut même avancer qu'un système techno-industriel contrôlé par des
dictateurs pourrait être préférable, car ceux-ci se sont avérés généralement inefficaces, ce qui fait qu'ils auront
plus de chance de s'effondrer. Voyez Cuba.
196. Les révolutionnaires doivent être favorables aux mesures qui tendent à unifier l'économie mondiale. Les
accords libre-échangistes comme le NAFTA ou le GATT sont probablement préjudiciables pour l'environnement
à court terme, mais à long terme, ils peuvent probablement être avantageux car ils vont accroître
l'interdépendance économique entre nations. Il sera plus facile de détruire le système techno-industriel à l'échelle
planétaire si l'économie est tellement globalisée qu'un effondrement dans un pays du G7 entraînera la même
chose dans toutes les nations industrialisées.
197. Certaines personnes prennent pour argument que l'homme moderne a trop de pouvoir, trop de contrôle sur
la nature pour souhaiter une attitude plus passive en ce qui concerne la race humaine. Au mieux ces gens ne se
rendent pas bien compte de la réalité, car ils sont incapables de faire la différence entre le pouvoir des GROSSES
INSTITUTIONS et celui des INDIVIDUS ou des PETITS GROUPES. C'est une erreur de prôner la réduction de
pouvoir ou la passivité, car les gens ONT BESOIN de pouvoir. L'homme moderne en tant qu'entité collective —
c.a.d le système industriel — a un immense pouvoir sur la nature, et nous (FC) considérons cela comme
mauvais. Mais les INDIVIDUS modernes ou les PETITS GROUPES D'INDIVIDUS ont bien moins de pouvoir
que l'homme primitif n'en avait. De manière générale, l'énorme pouvoir de l'homme moderne sur la nature est
exercé non par des individus ou des petits groupes, mais par d'énormes institutions. Pour comprendre le pouvoir
que la technologie alloue à l'homme moderne moyen, il ne faut pas perdre de vue les limites étroites qui lui sont
imposées ainsi que le contrôle et la surveillance exercés par le système (vous avez besoin d'une autorisation pour
n'importe quoi, et viennent avec lois et réglementations). L'individu a seulement les pouvoirs technologiques que
le système choisit de lui octroyer. Son pouvoir PERSONNEL sur la nature est très faible.
198. Les INDIVIDUS des sociétés primitives et les GROUPES RESTREINTS avaient à l'époque un pouvoir
considérable sur la nature, ou il serait plus juste de dire qu'il avait du pouvoir AU SEIN de la nature. Quand
l'homme primitif avait besoin de nourriture, il savait où trouver et comment préparer les végétaux comestibles,
comment chasser et il le faisait avec des armes qu'il avait faites lui-même. Il savait aussi comment se protéger de
la chaleur, du froid, de la pluie, des animaux dangereux, etc. Mais l'homme primitif a fait des dommages
négligeables à la nature parce que le pouvoir COLLECTIF des sociétés primitives était ridicule comparé à celui
de notre société industrielle.
199. Au lieu de défendre la perte de pouvoir et la passivité, on devrait plutôt se dire que le pouvoir du
SYSTEME INDUSTRIEL doit être détruit, et que cela AUGMENTERA considérablement le pouvoir et la
liberté des INDIVIDUS et des PETITS GROUPES.
200. Jusqu'à ce que le système soit définitivement démantibulé, la destruction de ce système doit être l'UNIQUE
but des révolutionnaires. Tous les autres buts disperseront l'effort. Plus grave, si les révolutionnaires se
permettent de poursuivre d'autres buts, ils seront tentés d'utiliser la technologie comme moyen d'arriver à leurs
fins. S'ils donnent dans ce travers, ils retomberont dans le piège technologique, car la technologie moderne est un
système unifié, aux parties étroitement imbriquées, ce qui fait que vouloir n'en n'utiliser QU'UNE partie obligera
à l'utiliser dans sa QUASI-TOTALITE, ce qui au bout du compte la laissera presque intacte.
201. Supposons par exemple que les révolutionnaires prennent la « justice sociale » comme but. La nature
humaine étant ce qu'elle est, la justice sociale ne viendra pas de manière spontanée, il faudra lui donner un coup
de pouce. Pour ce faire, les révolutionnaires devront centraliser et contrôler. Pour cela, ils auront besoin de
moyens de communication et de déplacement longues distances rapides, et de ce fait, de ce tout ce qu'apporte la
technologie dans ces domaines. Pour nourrir et vêtir les pauvres, ils feront appel aux technologies industrielles et
agricoles. Et ainsi de suite. Ainsi, la volonté d'assurer la justice sociale maintiendra des pans entiers du système
techno-industriel. Ce n'est pas que nous ayons quelque chose contre la justice sociale, mais il ne doit pas être
permis d'interférer dans l'effort de destruction du système.
202. Il serait sans espoir pour les révolutionnaires d'essayer de s'attaquer au système sans utiliser QUELQUES
moyens qu'offre la technologie moderne. Au moins, les moyens de communications pour faire passer leur
message. Mais ils ne doivent le faire que dans un SEUL but : attaquer le système techno-industriel.
203. Imaginons un alcoolique assis devant un tonneau de vin. Supposons qu'il se dise : « le vin n'est pas mauvais
s'il est consommé avec modération. On dit même que de petites quantités de vin sont bonnes pour la santé… Ca
ne me fera pas de mal d'en boire un petit coup… ». Bien sur, vous savez ce qui arrive. N'oubliez jamais que vis
à vis de la technologie, la race humaine est comme un alcoolique devant un tonneau de vin.
204. Les révolutionnaires doivent avoir autant d'enfants qu'ils peuvent. C'est une évidence scientifique que les
attitudes sociales sont en grande partie héritées. Personne ne soutient qu'une attitude sociale est une conséquence
directe de la carte génétique d'un individu, mais il apparaît que c'est globalement le cas dans notre société. Des
objections contre ces assertions ont déjà été émises, mais elles sont discutables et semblent idéologiquement
motivées. Dans tous les cas, personne ne peut nier qu'un enfant aura à peu prêt les mêmes attitudes sociales que
ses parents. De notre point de vue, que ces attitudes soient le résultat de l'hérédité ou du milieu, cela ne nous
importe guère. Le fait est qu'elles SOIENT transmises.
205. L'ennui, c'est que la plupart des gens qui ont tendance à se rebeller contre le système techno-industriel sont
aussi préoccupés par les problèmes démographiques, ce qui fait qu'ils préfèrent avoir pas ou peu d'enfants. Ce
faisant, ils laissent le monde entre les mains de ceux qui soutiennent ou au moins acceptent le système technoindustriel.
Pour assurer la force de la prochaine génération de révolutionnaires, leurs contemporains doivent
avoir une importante descendance. En le faisant, ils n'augmenteront que légèrement les problèmes de
démographie. Ce qu'il y a de plus important, c'est de mettre à bas le système ; et comme vu au paragraphe 167,
une fois cela fait, la population mondiale ne pourra que décroître. Par contre, si le système techno-industriel
survit, il permettra de nourrir une population mondiale en croissance infinie.
206. Du point de vue de la stratégie révolutionnaire, le seul point sur lequel nous devons absolument insister,
c'est le fait que l'unique but doit être l'élimination de la technologie moderne, et qu'aucun autre ne doit interférer
avec celui-ci. Pour le reste, les révolutionnaires doivent rester pragmatiques. Si l'expérience montre que certains
conseils indiqués plus haut ne donnent pas de bons résultats, il ne faut pas hésiter à s'en débarrasser.
DEUX TYPES DE TECHNOLOGIE
***************************************
207. Un argument souvent avancé contre la révolution que nous proposons est qu'elle est vouée à l'échec, car
(prétend on) du fait que la technologie a toujours progressé au cours de l'histoire, il est impossible qu'elle
régresse. Mais cette affirmation est fausse.
208. Nous distinguerons deux types de technologie que nous appellerons technologie de base (à petite échelle) et
technologie systémique (dépendante de grosses infrastructures). La technologie de base est celle qui est utilisée
par de petites communautés sans assistance extérieure. La technologie systémique est celle des grosses
organisations sociales. Nous sommes d'accord que dans le cas de la technologie de base, aucun exemple de
régression significatif n'a eu lieu. Mais la technologie systémique REGRESSE quand l'organisation sociale dont
elle dépend s'effondre. Par exemple : quand l'empire Romain se désintégra, la technologie de base romaine
perdura car n'importe quel artisan adroit de village pouvait, par exemple, construire une roue à aube, ou un
forgeron faire de l'acier suivant les méthodes romaines, et ainsi de suite. Mais la technologie romaine systémique
, elle, REGRESSA. Leurs aqueducs finirent par être hors d'usage et ne furent jamais réparés. Leurs techniques de
construction furent perdues. Leur système sanitaire urbain fut oublié, ce qui fait que celui des villes européennes
n'atteint que récemment le niveau de celui de la Rome antique.
209. La raison pour laquelle la technologie a toujours semblé progresser est que, jusqu'à un siècle ou deux avant
la Révolution Industrielle, la majeure partie de la technologie était de la technologie de base. Mais depuis nous
sommes entrés dans l'ère de la technologie systémique. Prenons le réfrigérateur, par exemple. Sans le
développement industriel et l'infrastructure attenante, il aurait été impossible à des artisans de concevoir et
construire un réfrigérateur. Si par quelque miracle, ils eussent pu en construire un, il aurait été impossible de le
faire fonctionner sans une source fiable d'électricité. Ainsi, un barrage aurait été nécessaire avec une turbine.
Cette dernière nécessite une quantité considérable de fil de cuivre. Essayez d'imaginer de produire tout ce
câblage hors d'un environnement industriel. Et où auraient-ils trouvé le gaz nécessaire à la réfrigération ? Il
aurait été plus simple de construire une chambre froide ou de préserver les aliments en les séchant ou salant,
ainsi que cela fut fait avant l'invention du réfrigérateur.
210. Il est clair que si le système techno-industriel était mis à bas, la technologie de la réfrigération disparaîtrait
bien vite. Ce qui est vrai pour toute la technologie systémique. Et une fois que cette dernière aura été perdue
pendant à peu près une génération, cela prendrait des siècles pour la reconstruire, comme il a fallu des siècles
pour qu'elle voit le jour. Les livres techniques survivants seraient rares et dispersés. Une société industrielle, si
elle ne bénéficie pas d'aide extérieure, doit passer par des stades successifs : vous avez besoin des outils pour
fabriquer les outils pour fabriquer les outils pour fabriquer les outils… Un long processus de développement
économique et d'organisation sociale est nécessaire. Et même en l'absence d'une idéologie opposée à la
technologie, il n'y a pas de raison de croire que quiconque serait intéressé par la reconstruction d'une société
techno-industrielle. L'enthousiasme pour le « progrès » est un phénomène propre à notre société, et il ne semble
pas avoir existé avant environ le 17ème siècle.
211. A la fin du moyen-âge, il y avaient 4 civilisations à un stade d'avancement équivalent : l'Europe, le Monde
Islamique, l'Inde, et l'Extrême-Orient (Chine, Corée, Japon). 3 de ces civilisations demeurèrent plus ou moins
stables et seule l'Europe devint dynamique. Personne ne sait pourquoi ce fut le cas ; les historiens ont chacun
leurs théories, mais ce ne sont que des hypothèses. Quoi qu'il en soit, il est clair que le passage à une société
techno-industrielle ne peut se faire que sous certaines conditions. De ce fait, il n'y a pas de raison de supposer
que qu'une régression technologique à long terme ne puisse se faire.
212. Est-ce que, EVENTUELLEMENT, un nouveau développement d'une société techno-industrielle est
possible ? Peut-être, mais ce n'est pas la peine de se soucier de cela, car nous ne pouvons prévoir ou contrôler ce
qui pourrait advenir dans 500 ou 1000 ans. Ces problèmes seront résolus (ou pas) par les gens qui vivront à ce
moment là.
LE DANGER DU « GAUCHISME »
************************************
213. Du fait de leur besoin de rébellion et d'insertion dans un mouvement, les « gauchistes » ou les personnes
ayant une psychologie semblable, sont souvent attirés par un mouvement protestataire ou activiste dont les buts
et le personnel ne sont pas a priori « gauchistes ». L'arrivée de « gauchistes » peut alors facilement transformer
un mouvement non « gauchiste » en mouvement qui le soit, ce qui fait que des buts « gauchistes » remplacent ou
altèrent les buts initiaux.
214. Pour éviter cela, un mouvement qui exalte la nature et s'oppose à la technologie doit avoir impérativement
une attitude anti « gauchiste » et ne doit pas collaborer avec eux. Le « gauchisme » est sur le long terme
incompatible avec la Nature Sauvage, avec la liberté humaine et avec l'élimination de la technologie moderne.
Le « gauchiste » est un collectiviste ; il cherche à unifier le monde (la race humaine et la nature à la fois) en un
tout. Mais ceci implique l'administration de la nature et de la race humaine par une société organisée, et requière
une technologie avancée. Vous ne pouvez avoir un monde unifié sans moyens de communications (dans tous les
sens du terme) rapides, vous ne pouvez faire que chacun aimera son prochain sans des techniques
psychologiques sophistiquées, vous ne pouvez avoir une « société planifiée » sans une solide technologie. Par
dessus tout, le « gauchiste » est motivé par le besoin de pouvoir, et il recherche ce pouvoir sur des bases
collectivistes, au travers l'identification à un mouvement de masse ou à une superstructure. Le « gauchiste » n'est
pratiquement jamais pour abandonner la technologie, car celle-ci est un moyen trop précieux pour un pouvoir
collectiviste.
215. L'anarchiste34 est aussi à la recherche de pouvoir, mais sur des bases individualistes ou au sein de petits
groupes ; il veut que l'individu ou ces petits groupes puissent être en mesure de contrôler leurs destins. Il
s'oppose à la technologie car elle rend les petits groupes dépendants des grosses organisations.
216. Certains « gauchistes » semblent s'opposer à la technologie, mais ils ne s'y opposeront que tant qu'ils seront
des outsiders et que la technologie sera contrôlée par des non « gauchistes ». Si le « gauchisme » devient un jour
dominant dans la société, ce qui fait que le système techno-industriel deviendra une arme entre leurs mains, ils
en useront et favoriseront sa croissance avec enthousiasme. En faisant cela, ils répéteront un schéma que le
« gauchisme » a montré dans le passé à maintes reprises. Quand les bolcheviques étaient minoritaires en Russie,
ils étaient vigoureusement contre la censure et la police secrète, ils défendaient l'autodétermination des minorités
ethniques, et ainsi de suite ; mais dès qu'ils eurent le pouvoir, ils imposèrent une censure bien plus sévère,
créèrent une police secrète autrement plus efficace que du temps des tsars, et oppressèrent les minorités
ethniques au moins autant que dans le passé. Aux Etats-Unis, il y a une vingtaine d'années, quand les
« gauchistes » étaient minoritaires dans nos universités, les professeurs « gauchistes » y défendaient
farouchement la liberté de pensée, mais aujourd'hui, là où ils sont dominants, la situation s'est renversée (c'est le
political correctness). La même chose arrivera avec les « gauchistes » et la technologie : ils l'utiliseront pour
opprimer leurs opposants si jamais elle tombe sous leur contrôle.
217. Dans les révolutions dans le passé, les « gauchistes » les plus avides de pouvoir, ont toujours collaboré dans
un premier temps avec les révolutionnaires non « gauchistes », aussi bien qu'avec les « gauchistes » de tendance
plus libertaire, et dans un deuxième temps, les ont doublés pour conserver le pouvoir pour eux-mêmes. C'est ce
que fit Robespierre lors de la révolution française, ce que firent les bolcheviques pendant la révolution russe, les
communistes en Espagne en 1938, et Castro à Cuba. Au vu de ces exemples, il serait complètement aberrant
pour des révolutionnaires non « gauchistes » de collaborer avec ces derniers.
218. Un certain nombre de penseurs ont relevé que le « gauchisme » est une sorte de religion. Le « gauchisme »
n'est pas une religion au sens strict car cette doctrine ne postule pas l'existence d'un être surnaturel. Mais pour le
« gauchiste », l'idéologie joue le même rôle psychologique que la religion pour certaines personnes. Le
« gauchiste » a BESOIN de croire au « gauchisme » ; il joue un rôle central dans son économie mentale. Ses
croyances ne sont pas facilement modifiées par la logique ou les faits. Il a la profonde conviction que le
« gauchisme » est moralement Juste, avec un J majuscule, et cela implique que ce n'est pas un droit mais un
devoir que d'imposer ses convictions à qui que ce soit (toutefois, beaucoup de gens que nous qualifions de
« gauchistes » ne se pensent pas « gauchistes », et ne décriraient pas leur système de croyances comme
« gauchistes ». Nous utilisons le terme de « gauchiste » [guillemets dans le texte] car nous ne voyons pas de
meilleur terme pour désigner tout ce qui est commun au féminisme, au mouvement gay, au political correctness,
etc, et parce que ces mouvements ont une forte affinité avec l'ancienne Gauche — voir paragraphes 227-230).
219. Le « gauchisme » est une force totalitaire. Pour peu qu'il soit en position de force, il a tendance à s'immiscer
dans chaque recoin de la vie privée et à contraindre tout le monde à passer au moule « gauchiste ». Ceci est du en
partie au caractère quasi-religieux du « gauchisme » ; tout ce qui s'oppose aux « gauchistes » est assimilé au
Péché. Plus fondamentalement, c'est une force totalitaire à cause de la méthode de recherche de pouvoir du
« gauchiste ». Ce dernier cherche à satisfaire son besoin de pouvoir en s'identifiant avec un mouvement de masse
et tente de satisfaire son processus de pouvoir en collaborant pour que ce mouvement atteigne ses buts (voir
paragraphe 83). Mais peu importe le degré de réussite du mouvement car le « gauchiste » ne sera jamais
satisfait ; son activisme étant une activité compensatrice (voir paragraphe 41). Ce qui fait que la motivation
réelle du « gauchisme » n'est pas d'accomplir les buts annoncés du « gauchisme » ; en réalité, il est poussé par la
sensation de pouvoir que lui confèrent le combat pour un but social et son accomplissement35. En conséquence,
le « gauchiste » n'est jamais satisfait par ce qu'il a déjà obtenu ; son besoin de processus de pouvoir lui fait sans
cesse chercher de nouveaux buts. Le « gauchiste » veut des chances égales pour les minorités. Une fois ceci fait,
il insiste sur une répartition sociale statistique par minorité. Et aussi longtemps que quiconque abrite dans un
recoin de son esprit un quelconque ressentiment envers une minorité, le « gauchiste » se doit de le rééduquer. Et
les minorités ethniques ne sont pas suffisantes ; personne ne peut avoir quelque chose à reprocher aux
homosexuels, aux handicapés, aux obèses, aux vieux, aux moches, et ainsi de suite. Ce n'est pas suffisant que les
gens soient prévenus des dangers du tabac ; un avis doit être imprimé sur chaque paquet de cigarettes. Puis la
publicité pour le tabac doit être limitée sinon interdite. Les activistes ne seront jamais satisfaits avant que le tabac
ne soit mis hors la loi, et ensuite ce sera le tour de l'alcool, de la junk food, etc. Ils se sont battus contre les
mauvais traitements infligés aux enfants, ce qui raisonnable. Mais maintenant, ils veulent prohiber jusqu'à la
fessée. Ils ne seront satisfaits que lorsqu'ils auront un contrôle complet sur la façon dont sont éduqués les enfants.
Puis ils passeront à une autre cause.
220. Supposons que vous demandiez à un « gauchiste » de faire une liste de TOUT ce qui ne va pas dans la
société, et supposons que vous appliquiez TOUS les changements sociaux requis. Il est sûr et certain que d'ici
quelques années, la majorité des « gauchistes » trouveront quelque chose de nouveau à combattre, quelque
nouveau « tort » social à redresser, car, une fois de plus, le « gauchiste » est moins motivé par la détresse du
monde que par son besoin de satisfaire son désir de pouvoir en imposant ses solutions à la société.
221. A cause de leurs inhibitions du fait de leur haut niveau de socialisation, la plupart des « gauchistes » du type
sur-socialisés ne peuvent rechercher le pouvoir de la même façon que le reste de la population. Pour eux, cette
recherche ne peux se faire que d'une seule manière moralement acceptable, et c'est cela qui fait leur lutte ;
imposer cette morale à tous.
222. Les « gauchistes », surtout les sur-socialisés, sont des fanatiques [True Believers] dans le sens qu'en donne
Eric Hoffer dans son livre : « Les Fanatiques ». Mais tous les fanatiques n'ont pas le même type psychologique
que les « gauchistes ». Un fanatique nazi a probablement un profil mental très différent de celui d'un
« gauchiste ». Du fait de leur dévouement aveugle à une cause, les fanatiques sont un élément important, sinon
nécessaire, de tout mouvement révolutionnaire. Ceci pose un problème auquel nous avouons ne pas avoir trouvé
de solution. Nous ne sommes pas surs de savoir canaliser l'énergie des fanatiques lors d'une révolution contre la
technologie. Tout ce que nous pouvons dire, à priori, c'est qu'un fanatique n'est pas une recrue sure pour cette
révolution, à moins que son désir ne soit QUE la destruction de la technologie. S'il est engagé dans la poursuite
d'autres buts, il pourra utiliser la technologie comme un outil pour parvenir à ces (autres) fins (voir paragraphes
220, 221).
223. Certains lecteurs se disent : « Tout ceci n'est qu'un tissu d'âneries. Je connais John et Jane qui sont
« gauchistes » et ils n'ont absolument pas de tendances totalitaires. » Il est vrai que beaucoup de « gauchistes »,
si ce n'est la majorité, sont des gens honnêtes qui croient sincèrement à la tolérance (jusqu'à un certain point), et
ne voudraient pas user de moyens coercitifs pour faire advenir leurs buts sociaux. Nos remarques sur le
« gauchisme » ne s'applique en fait pas à chaque individu concerné, mais décrivent les caractères généraux du
« gauchisme » comme mouvement. Et « l'idéologie » d'un mouvement n'est pas déterminée par les proportions
statistiques des croyances des individus au sein de ce mouvement.
224. Les gens qui atteignent des positions de pouvoir dans les mouvements « gauchistes » sont les plus avides de
pouvoir (ce qui est normal puisqu'il s'agit de satisfaire leur appétit de pouvoir). Une fois que ces derniers ont pris
les rênes du mouvement, beaucoup de « gauchistes » plus modérés désapprouvent en leur fort intérieur les
décisions des leaders, mais sont incapables de s'y opposer. Ils ont BESOIN de leur foi dans le mouvement, et
ainsi, ne peuvent retirer aux leaders la foi qu'ils leurs ont confiée. Il est vrai que QUELQUES « gauchistes » ont
le courage de s'opposer aux tendances totalitaires qui émergent, mais ils perdent généralement, car leurs
adversaires sont plus organisés, plus impitoyables et machiavéliques et ont pris soin de se constituer de solides
fondations.
225. Ces phénomènes sont apparus clairement en URSS et dans les autres pays « conquis » par les
« gauchistes ». De la même façon, avant l'effondrement du communisme en URSS, peu de « gauchistes » ont
critiqué ce pays à l'ouest. Le cas échéant, ils admettaient que tout n'allait pas pour le mieux en URSS, mais
trouvaient des excuses aux communistes, et finissaient par parler des tares de l'Occident. Ils ont toujours excusé
les agressions communistes par les actions militaires occidentales. Les « gauchistes » du monde entier ont
protesté contre l'intervention américaine au Vietnam, mais personne n'a rien dit lors de l'invasion de
l'Afghanistan. Ce n'est pas qu'ils approuvaient les actions soviétiques ; mais du fait de leur foi « gauchiste », ils
ne pouvaient s'opposer formellement au communisme. Actuellement, dans nos universités où le political
correctness est devenu dominant, il y a probablement beaucoup de « gauchistes » qui désapprouvent en leur fort
intérieur la disparition de la liberté de pensée, mais ils ne se révolteront pas contre cet état de fait.
226. Ainsi, le fait que la plupart des « gauchistes » pris individuellement sont modérés et plutôt tolérants,
n'empêche pas que le « gauchisme » en tant que mouvement, soit de nature totalitaire.
227. Notre discussion sur le « gauchisme » présente une sérieuse faiblesse. Ce que nous entendons par le mot
« gauchiste » [entre guillemets dans le texte] est loin d'être clair. Il ne semble pas que nous puissions y faire
grand chose. Le « gauchisme » actuellement est fragmenté en une multitude de mouvement. De surcroît, tous les
mouvements activistes ne sont pas « gauchistes », et certains d'entre eux (par exemple, les écologistes radicaux)
semblent contenir un mélange de « gauchistes » et de non « gauchistes » qui auraient mieux à faire que de
collaborer avec des « gauchistes ». Certains types de « gauchistes » évoluent graduellement en non
« gauchistes », et nous sommes parfois nous-mêmes incapables de dire si un certain individu est « gauchiste » ou
non. Jusqu'à une définition meilleure, nous retiendrons celle qui a été élaborée tout au long de ce document, et
nous ne pouvons que laisser le lecteur décider de ce qu'est un « gauchiste ».
228. Mais il sera utile de faire une liste de quelques critères pour diagnostiquer le « gauchisme ». Ces critères ne
peuvent pas être appliqués tels quels. Certaines personnes peuvent présenter certains de ces symptômes sans être
« gauchistes » et vice-versa. De nouveau, il faut que vous en passiez par votre jugement personnel.
229. Le « gauchiste » est attiré par le collectivisme sur une large échelle. Il insiste sur le devoir qu'a l'individu de
servir la société et le devoir qu'a la société de prendre soin de l'individu. Il se méfie de l'individualisme. Il prend
souvent un ton moralisateur. Il a tendance à être pour le contrôle des armes, pour l'éducation sexuelle et pour
toutes les autres méthodes d'épanouissement psychologique, pour la planification, pour le multiculturalisme,
pour l'affirmative action. Il s'identifie aux victimes. Il s'oppose à la compétition et à la violence, mais trouvent
souvent des excuses pour les « gauchistes » qui en usent. Il adore utiliser les phrases-clichés de la gauche comme
« racisme », « sexisme », « homophobie », « capitalisme », « impérialisme », « néocolonialisme », « génocide »,
« changement social », « justice sociale », « responsabilité sociale », etc. Peut-être ce qui peut le mieux
caractériser le « gauchiste » est sa tendance à sympathiser avec les mouvements suivants : le féminisme, le
mouvement gay, le droit des minorités, des handicapés, des animaux, et la political correctness. Quiconque est
en accord avec TOUS ces mouvements est presque à coup sur un « gauchiste »36.
230. Les « gauchistes » les plus dangereux, c.a.d ceux qui sont le plus avides de pouvoir, se caractérisent souvent
par l'arrogance et une approche dogmatique de l'idéologie. Toutefois, les plus dangereux de tous, sont certains
sur-socialisés qui évitent les manifestations d'agressivité et de montrer leurs orientations, mais qui oeuvrent
tranquillement et sans bruit à promouvoir des valeurs collectivistes, des techniques d'épanouissement
psychologique pour socialiser les enfants, accentuer la dépendance de l'individu vis a vis du système, et ainsi de
suite. Ces « crytpo-gauchistes » (ainsi que nous les nommerons) sont proches du bourgeois du point de vue de
l'action pratique, mais en diffèrent beaucoup du point de vue psychologique et idéologique. Le bourgeois essaie
de faire en sorte que les gens restent sous le contrôle du système pour préserver son train de vie ou simplement
par pur conformisme. le « crypto-gauchiste » essaie de faire de même parce que c'est un fanatique [True
Believer] d'une idéologie collectiviste. Le « crypto-gauchiste » se différencie du « gauchiste » sur-socialisé
moyen par sa tendance à la rébellion plus faible et sa meilleure intégration sociale. Il se différencie du bourgeois
moyen parce qu'en lui, il y a quelque faille profonde qui l'oblige à se dévouer corps et âme à une cause et à
s'immerger dans une collectivité. Et peut-être, cette recherche de pouvoir (très sublimé) est-elle plus forte que
celle du bourgeois moyen.
NOTE FINALE
***************
231. Tout au long de ce document, nous avons fait des affirmations imprécises et d'autres qui nécessiteraient de
plus amples développements. D'autres enfin peuvent s'avérer carrément fausses. Le manque d'informations
suffisantes, et le souci de brièveté nous ont empêché de remédier à cet état de fait. Et, évidemment, dans une
discussion de cette sorte, il a été fait appel à des données intuitives, qui peuvent être inexactes. En vertu de quoi,
nous signalons que ce document décrit une approximation grossière plutôt que la vérité.
232. De la même façon, nous sommes raisonnablement certains que le tableau que nous avons ébauché est
globalement correct. Nous avons fait le portrait du « gauchisme » contemporain comme un phénomène lié à
notre époque et à la dissolution du processus de pouvoir. Mais peut-être nous sommes nous trompés. Les gens
sur-socialisés qui essaient de satisfaire leur besoin de pouvoir en imposant leurs vues aux autres existent
certainement depuis un certain temps. Mais nous PENSONS que le rôle décisif joué par le sentiment
d'infériorité, la faible estime de soi, le manque de pouvoir, l'identification aux victimes par des gens qui n'en sont
pas, est particulier au « gauchisme » moderne. L'identification aux victimes peut-être perçue dans la gauche du
19e siècle et le christianisme primitif, mais autant que nous le sachions, les sentiments de dévalorisation, etc.,
n'étaient pas aussi flagrants dans ces mouvements, ou dans n'importe quel mouvement, qu'ils ne le sont dans le
« gauchisme » moderne. Mais nous ne sommes pas en position d'affirmer que de tels mouvements n'ont pas
existé dans le passé. C'est une importante question sur laquelle les historiens devraient se pencher.
Durant la période Victorienne beaucoup de gens sur-socialisés souffrirent de problèmes psychologiques résultant
de la répression de leur libido. Freud a de toute évidence basé ses théories sur l'observation de ce type de
personne. Actuellement la socialisation se polarise désormais plus sur l'agression que sur la libido.
FIN
1 Nous avançons que TOUTES, ou presque toutes, les brutes et les compétiteurs impitoyables souffrent d'un
sentiment d'infériorité.
2 Durant la période Victorienne beaucoup de gens sur-socialisés souffrirent de problèmes psychologiques
résultant de la répression de leur libido. Freud a de toute évidence basé ses théories sur l'observation de ce type
de personne. Actuellement la socialisation se polarise désormais plus sur l'agression que sur la libido.
3 Cela n'inclue pas nécessairement les spécialistes des sciences « exactes ».
4 Il y a beaucoup d'individus des classes moyennes et supérieures qui résistent à certaines de ces valeurs, mais
leur résistance est plus ou moins souterraine. Une telle résistance ne rencontre que peu d'écho dans les mass
media.
5 On peut avancer que la majorité des gens ne veulent pas prendre des décisions par eux-mêmes, mais préfèrent
que des leaders le fassent pour eux. Il y a du vrai là dedans. Les gens aiment prendre des décisions sur des sujets
anodins, mais le faire sur des questions complexes, fondamentales impose de faire face aux conflits d'ego, et la
majorité des gens haïssent ce genre de conflits. C'est pourquoi ils se reposent sur d'autres pour s'occuper de ces
questions. En général, les gens sont des suiveurs, pas des leaders, mais ils veulent pouvoir être en
communication directe avec les dits leaders et participer par certains côtés aux décisions difficiles. Ils ont besoin
d'autonomie, au moins à ce niveau.
6 Certains des symptômes exposés sont similaires à ceux des animaux en captivité : Expliquons comment ces
symptômes apparaissent avec l'impossibilité de réaliser son processus de pouvoir. Le sens commun à propos de
la nature humaine nous enseigne que la perte de buts requérant des efforts conduit à l'ennui, et que cet ennui à la
longue amène à la dépression. L'impossibilité de parvenir à ces buts entraîne la frustration et l'affaiblissement de
l'estime de soi. La frustration conduit à la colère, puis à l'agressivité, souvent à l'encontre des femmes et enfants.
Il a été démontré qu'une frustration qui perdure se mue en dépression et que cette dernière génère culpabilité,
trouble du sommeil, , de l'appétit, et des sentiments antisociaux. Les dépressifs recherche le plaisir comme
antidote ; ce qui donne un hédonisme insatiable, une sexualité débridée, agrémentée de perversions comme
autant de stimulants. L'ennui aussi fait rechercher un plaisir excessif, puisque, en l'absence d'autres buts, le
plaisir devient un but en soi. Ce qui précède est une simplification. La réalité est plus complexe, et évidemment,
l'impossibilité de réaliser son processus de pouvoir n'est pas la SEULE cause des symptômes décrits. Ainsi,
lorsque nous parlons de dépression, nous ne pensons pas nécessairement à la dépression clinique. En général,
nous nous référons à des formes bénignes de dépression. Et quand nous parlons de buts, il ne s'agit pas de
nécessairement non plus de buts à long terme, hors d'atteinte. Pour la majorité des gens au cours de l'histoire
humaine, les buts de base (c.a.d, se nourrir soi-même et sa famille au jour le jour) ont été amplement suffisants.
7 Une exception peut être faite en ce qui concerne certains groupes passifs, contemplatifs, comme les Amish,
dont l'influence est faible sur le reste de la société. En dehors de ces derniers, quelques authentiques petites
communautés existent aux USA à l'heure actuelle. Par exemple, les gangs de jeunes et les « cultes ». Tout le
monde les considère comme dangereux, et ils le sont, car les membres de ces groupes sont d'abord loyaux les uns
envers les autres, plutôt qu'envers le système ; ce qui fait que ce dernier ne peut les contrôler. Ou prenons les
gitans. Les gitans se débrouillent généralement par des larcins et des fraudes car leur loyauté est telle qu'ils
peuvent toujours trouver d'autres gitans pour témoigner de leur innocence. Évidemment le système serait secoué
si trop de personnes appartenaient à de pareils groupes. Certains des penseurs chinois du début du 20e siècle qui
voulaient moderniser la Chine reconnurent la nécessité de détruire les petits groupes sociaux, comme la famille :
« (suivant Sun Yat-sen) le peuple chinois a besoin d'une nouvelle vague de patriotisme qui transférerait la
loyauté de la famille à l'état… (suivant Li Huang) les attaches traditionnelles, particulièrement celles de la
famille, doivent être abandonnées si le nationalisme doit se développer en Chine » (Chester C. Tan, La pensée
politique chinoise au 20e siècle, page 125 et 297).
8 Oui, nous savons que les USA du 19e siècle avaient leurs problèmes, et sérieux, mais dans un souci de
concision, nous avons du nous exprimer de manière simplifiée.
9 Nous laissons de côté la « sous-classe ». Nous parlons de la majorité.
10 Certains sociologues, éducateurs, professionnels de la « santé mentale », et ainsi de suite, font de leur mieux
pour placer les désirs sociaux dans le groupe 1 en essayant de faire en sorte que chacun ait une vie sociale
satisfaisante.
11 Le désir d'acquisition matérielle sans fin est il vraiment une création artificielle de la publicité et du
marketing ? Il n'y a certainement aucune pulsion innée chez l'homme pour l'accumulation de biens matériels. Il y
a eu de nombreuses cultures qui ne désiraient que peu de chose en plus de la satisfaction de leurs besoins
élémentaires (Arborigènes d'Australie, Culture traditionnelle paysanne Mexicaine, quelques cultures Africaines).
D'un autre côté, ont existé de nombreuses cultures préindustrielles où l'accumulation a joué un grand rôle. Ainsi,
nous ne pouvons affirmer qu'aujourd'hui, cette particularité n'est qu'une création de la publicité et du marketing.
Mais il est certain que la publicité et le marketing ont une part importante dans la création de cette culture de
l'accumulation. Les gros trusts qui dépensent des millions en publicités ne le feraient pas si elles n'étaient pas
sûres qu'en retour leurs ventes augmenteraient. Un membre de FC a rencontré il y a de cela 2 ans un directeur
des ventes qui fut assez franc pour lui dire : « Notre boulot, c'est de faire acheter aux gens des choses qu'ils ne
veulent pas et dont ils n'ont pas besoin ». Puis il décrivit comment un vendeur novice pouvait présenter au public
un produit avec ses seules qualités sans rien vendre, alors qu'un professionnel entraîné pouvait en vendre des tas
au même public. Ceci montre que les gens sont manipulés pour acheter des choses qu'ils ne veulent pas vraiment.
12 Le problème du sentiment d'inutilité semble être devenu moins aigu depuis environ 15 ans, car les gens se
sentent moins en sécurité physiquement et économiquement qu'ils ne l'étaient avant, et le besoin de sécurité leur
a fourni un but. Mais le sentiment d'inutilité a été remplacé par la frustration de ne pouvoir atteindre à cette
sécurité. Nous avons mis en avant le sentiment d'inutilité car les libéraux et les « gauchistes » voudraient
résoudre nos problèmes sociaux en faisant en sorte que la société garantisse à chacun la sécurité ; mais si cela
peut être fait, le problème du sentiment d'inutilité reviendra au premier plan. Le vrai malaise ne vient pas du fait
que la société assure bien ou mal la sécurité de chacun ; c'est plutôt que les gens sont dépendants du système
pour leur sécurité plutôt que de l'assurer eux-mêmes. Ceci, entre autres, explique pourquoi certaines personnes se
remuent pour le droit de posséder des armes à feu ; la possession d'un fusil leur permet d'assurer cette partie de la
sécurité.
13 Les efforts des conservateurs pour diminuer l'ingérence gouvernementale sont de peu de profit pour le citoyen
moyen. D'abord, seulement une partie des réglementations peut être éliminée car elles sont majoritairement
indispensables. Ensuite, la majeure partie de la réglementation concerne le commerce plutôt que l'individu, ce
qui fait que le principal bénéfice de l'opération est de prendre le pouvoir des mains du gouvernement pour le
donner à des firmes privées. Ce qui signifie pour le pékin moyen, que les ingérences gouvernementales dans sa
vie privée sont remplacées par celles des trusts, ce qui peut leur permettre, par exemple, de rejeter plus de
produits chimiques dans son eau et lui donner le cancer. Les Conservateurs prennent l'électeur pour un crétin,
exploitant son ressentiment contre l'Etat Tout Puissant pour promouvoir le pouvoir du Grand Capital.
14 Quand quelqu'un approuve le dessein pour lequel une certaine propagande est utilisée, il la nomme
généralement « éducation » ou emploie un quelconque autre euphémisme. Mais la propagande reste de la
propagande quel que soit le but visé.
15 Ce n'est pas dans notre intention d'approuver ou désapprouver l'invasion du Panama. Nous illustrons
simplement un point de raisonnement.
16 Quand les colonies américaines étaient sous domination britannique, il y avait moins de garanties pour la
liberté qu'il y en eut après la Déclaration d'Indépendance. mais il y eut plus de liberté individuelle dans
l'Amérique préindustrielle, que ce soit avant ou après la Guerre d'Indépendance, qu'après que la révolution
industrielle ait mis le grappin sur ce pays. Nous avons extrait de « Violences en Amérique : perspectives
historiques et comparatives », édité par Hugh Davis Graham et Ted Robert Gurr, au chapitre 12 par Roger Lane,
pages 476 à 478 : « L'accroissement progressif des standards de propriété, et avec lui, l'augmentation de la
confiance dans le renforcement des lois officielles (dans l'Amérique du 19e siècle)… était commun à toute la
société… Le changement dans le comportement social est tellement profond et généralisé qu'on peut suggérer un
lien avec les plus fondamentaux des processus sociaux actuels, tel l'urbanisation industrielle, elle même… Le
Massachusetts en 1835 avait une population d'environ 660940 âmes, dont 81% de ruraux. Ces citoyens
bénéficiaient d'une considérable liberté individuelle. Que ce soient les charretiers, les fermiers ou les artisans, ils
étaient tous habitués à gérer leurs propres problèmes, et la nature de leur travail les faisait physiquement
dépendre les uns des autres… Les problèmes individuels, les délits, voire les crimes n'avait généralement pas de
répercussions au niveau social… Mais l'impact du double mouvement vers les villes et les usines, qui gagna en
intensité vers 1835, eut un effet sur le comportement individuel qui s'accentua du 19e au 20e siècle. L'usine
demanda de la régularité dans les attitudes, une vie gouvernée par l'obéissance au rythme de l'horloge et du
calendrier, et aux demandes des contremaîtres et contrôleurs. En ville, l'obligation de vivre dans une promiscuité
relative inhiba de nombreuses actions qui n'auraient posé aucun problème auparavant… Le résultat de cette
nouvelle organisation de vie et de travail devint apparent vers 1900, quand environ 76% des 2.805346 habitants
du Massachusetts furent classés comme citadins. Des comportements violents ou hors normes qui avaient été
tolérés dans une société indépendante et débonnaire ne purent plus être acceptés dans l'atmosphère formalisée et
coopérativiste de cette période. Le mouvement vers la ville, en résumé, a produit une génération plus docile, plus
socialisée, plus « civilisée » que la précédente. »
17 Les zélateurs de ce système sont friands de pouvoir citer quelques élections où le sort s'est décidé à une ou
deux voix près. Mais de tels cas sont rares.
18 « Aujourd'hui dans les pays technologiquement avancés, la vie des gens est très semblable, en dépit des
différences religieuses, politiques ou géographiques. La vie de tous les jours d'un caissier chrétien à Chicago,
d'un caissier bouddhiste à Tokyo, d'un caissier communiste à Moscou est bien plus proche que celle d'un homme
ayant vécu il y a un millier d'années. Ces similarités sont dues à une technologie commune » L. Sprague de
Camp, « Les anciens ingénieurs », Ballentine, page 17. Les vies de ces 3 caissiers ne sont pas IDENTIQUES.
L'idéologie peut avoir son mot à dire. Mais toutes les sociétés industrielles, pour survivre, doivent évoluer A
PEU PRES de la même façon.
19 Pensons simplement à un ingénieur en génétique fou qui fonderait un groupe terroriste.
20 Comme autre exemple de conséquences indésirables dues aux progrès médical, imaginons qu'un traitement
efficace contre le cancer soit découvert. Même si le traitement est tellement onéreux qu'il ne peut être réservé
qu'à une élite, cela réduira considérablement les efforts pour empêcher les émanations de substances
cancérigènes dans la nature.
21 Comme beaucoup de gens peuvent trouver paradoxal qu'une quantité de bonnes choses puissent s'accumuler
pour en donner une mauvaise, prenons une analogie. Supposons que M. A joue aux échecs avec M. B. M. C, un
maître, regarde par dessus l'épaule de M. A. Evidemment M. A veut gagner, donc si M. C lui indique un bon
mouvement à faire, il lui fait une faveur. Mais imaginons maintenant que M. C indique à M. A TOUS les
mouvements à faire. A chaque fois, il fait une faveur à M. A, en lui montrant le meilleur mouvement, mais en
faisant TOUS les mouvements pour lui, il gâche le jeu, ce qui fait que M. A n'a plus aucune envie de jouer à un
jeu où quelqu'un lui indique tout ce qu'il a à faire. La situation de l'homme moderne est similaire à celle de M. A.
Le système rend la vie de l'individu plus facile de bien des façon, mais ce faisant il le prive du contrôle de son
destin.
22 Ici nous considérons seulement les conflits d'intérêt au sein de la majorité. Pour des raisons de simplicité, nous
avons laissé de côté des idées « marginales » comme l'idée que la nature à l'état sauvage est plus importante que
la prospérité économique de l'homme.
23 Les intérêts particuliers ne sont pas forcément d'ordre MATERIEL. Ils peuvent consister en la satisfaction d'un
besoin psychologique, comme par exemple promouvoir une idéologie ou une religion.
24 Une réserve : Il est dans l'intérêt du système de permettre un certain degré de liberté dans des domaines bien
particuliers. Par exemple, la liberté économique (avec les contraintes et limitations d'usage) a prouvé son
efficacité pour la croissance économique. Mais seules des libertés contrôlées, circonscrites servent l'intérêt du
système. L'individu doit toujours être maintenu en laisse, même si la laisse peut être parfois longue (voir
paragraphes 94 et 97).
25 Nous ne voulons pas suggérer que l'efficience ou la capacité à survivre d'une société soit inversement
proportionnelle au degré de pression ou de contrainte à laquelle cette société soumet son peuple. Ce n'est
certainement pas le cas. Il y a de bonnes raisons de croire que la plupart des sociétés primitives ont soumis leur
peuple à moins de pression que ne le fit la société européenne, mais cette dernière s'est montré de loin plus
efficace et a vaincu les sociétés primitives du fait de l'avantage que lui conférait la technologie.
26 Si vous pensez qu'un accroissement de l'arsenal répressif est indubitablement bénéfique parce qu'il
supprimerait le crime, rappelez vous que ce qui est défini comme crime par le système n'est pas nécessairement
ce que VOUS nous appelleriez crime. Aujourd'hui fumer de la marijuana est un « crime », et, dans certaines
parties des Etats-Unis, la possession d'armes à feu — avec permis ou non, peut l'être aussi, et la même chose
arrive avec certaines méthodes pour éduquer les enfants, comme la fessée. Dans certains pays, la dissidence
politique est un crime, et il n'est pas certain que cela n'arrivera pas aux Etats-Unis, car aucune constitution ou
système politique ne dure éternellement. Si une société a besoin d'un très puissant arsenal répressif, c'est qu'il y a
quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette société ; ce peut être parce qu'elle soumet les gens à de telles
pressions que ceux-ci se rebellent ou ne marchent dans le rang que contraints et forcés. Beaucoup de sociétés s'en
sont sorti avec un faible système policier ou pas de système du tout.
27 Soyons en sûrs, les sociétés de jadis avaient des moyens d'influencer le comportement, mais ils étaient
primitifs et d'une faible efficacité en regard de ce que permet maintenant la technologie.
28 Toutefois, certains psychologues ont publiquement exprimé leur mépris pour la liberté humaine. Et le
mathématicien Claude Shannon a écrit dans Omni (août 1987) : « je pressens une ère où nous serons aux robots
ce que les chiens sont aux humains, et je suis du côté des machines ».
29 Ce n'est pas de la science-fiction ! Après avoir écrit le paragraphe 154, nous sommes tombés sur un article
dans Scientific American relatant que des scientifiques étaient en train d'activement mettre au point des
techniques pour identifier les criminels potentiels et pour les traiter par une combinaison de moyens biologiques
et psychologiques. Certains d'entre eux plaidaient pour un emploi obligatoire du procédé, qui pourrait être au
point très prochainement (« A la recherche du facteur criminel », par W. Wayt Gibbs, Scientific American, mars
1995). Vous pourriez être d'accord parce que le traitement pourrait être appliqué à ceux qui pourraient devenir
des chauffards alcooliques (ils mettent la vie des autres en danger aussi), puis, dans la foulée, à ceux qui fessent
leurs enfants, ensuite aux écologistes qui endommagent du matériel, et éventuellement à tous ceux dont le
comportement est préjudiciable au système.
30 Un autre avantage de la Nature comme contre-idéal, est, que pour beaucoup de gens, elle inspire une sorte de
respect associé à la religion, ce qui fait que la Nature peut éventuellement être idéalisée sur des bases religieuses.
C'est vrai que dans beaucoup de sociétés, la religion a servi de support et de justification à l'ordre établi, mais il
est aussi vrai qu'elle a fourni des fondements pour la rébellion. Ainsi, il peut être utile d'introduire un élément
religieux dans la révolte contre la technologie, d'autant plus que la société occidentale n'a plus de solides
fondations religieuses de nos jours. Actuellement, la religion est soit utilisée comme un moyen dérisoire et
évident pour l'égoïsme à courte vue (beaucoup de conservateurs en font cet usage) ou même est cyniquement
employée pour faire de l'argent facile (par la plupart des évangélistes), soit a dégénéré en un irrationalisme trivial
(sectes fondamentalistes, « cultes »), soit stagne (Catholicisme, majeure partie du Protestantisme). Ce qu'il y a eu
de plus proche d'une religion ces dernières années est la para-religion du « gauchisme », mais le « gauchisme »
actuellement est émietté, et n'a plus de but clair et unificateur. Ainsi, il y a un vide religieux dans notre société
qui peut éventuellement être comblé par une religion basée sur la nature par opposition à la technologie. Mais ce
serait une erreur de concocter artificiellement une religion pour tenir ce rôle. Une telle religion « inventée »
serait probablement un échec. Prenons l'exemple du mysticisme « Gaïa ». Ses adhérents y croient-ils
VRAIMENT ou jouent-ils un rôle ? Si c'est le cas, leur « religion » finira par faire un flop. Il vaut mieux ne pas
essayer d'introduire la religion dans le conflit Nature/technologie, à moins que vous ne croyiez VRAIMENT à
cette religion et trouviez qu'elle ne réponde à de profondes et authentiques aspirations chez beaucoup d'autres
gens.
31 Supposons qu'un tel coup de boutoir final advienne. En pratique, le système techno-industriel devra être
éliminé pans par pans, graduellement (voir paragraphes 4, 167, et note 4).
32 Il est même concevable que la révolution pourra consister simplement en un changement d'attitude globale vis
à vis de la technologie qui provoquera un lent déclin sans douleur du système techno-industriel. Mais si c'est le
cas, nous aurions beaucoup de chance. Il est bien plus probable que le passage à une société non industrielle sera
très difficile et générera de nombreux conflits et désastres.
33 La structure économique et technologique d'une société est de loin plus importante que la structure politique
pour déterminer la façon dont l'homme moyen vit (voir paragraphes 95,119, et notes 16 et 18).
34 Cette affirmation s'applique à une forme particulière d'anarchisme. De nombreuses attitudes sociales sont
qualifiées « d'anarchistes » et il est possible que beaucoup de ceux qui se considèrent comme anarchistes
récusent notre affirmation du paragraphe 215. Par exemple, on doit noter que les anarchistes non violents ne
considèrent pas FC comme un mouvement anarchiste et n'approuvent pas les méthodes violentes de FC.
35 Beaucoup de « gauchistes » sont aussi motivés par l'hostilité, mais cette dernière est probablement due à un
besoin de pouvoir frustré.
36 Il est important de comprendre ce que nous entendons par quelqu'un qui sympathise avec ces
MOUVEMENTS. Quelqu'un qui croit que les femmes, les homosexuels, etc, doivent avoir les mêmes droits que
les autres n'est pas nécessairement un « gauchiste ». Les mouvements féministes, gay, etc, qui existent dans notre
société ont le côté idéologique qui caractérise le « gauchisme », et si quelqu'un, par exemple, pense que les
femmes doivent bénéficier de droits égaux, il n'est pas obligatoire que cette personne ait de la sympathie pour les
mouvements féministes tels qu'ils existent actuellement.
1 commentaire:
l'oeuf magique
boreen...
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